Partie de campagne

1936

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D'après Guy de Maupassant. Avec : Sylvia Bataille (Henriette), Georges D'Arnoux (Henri), Jane Marken (Madame Dufour), André Gabriello (Monsieur Dufour), Jacques Brunius (Rodolphe), Paul Temps (Anatole), Gabrielle Fontan (La grand-mère), Jean Renoir (le père Poulain), Marguerite Renoir (La servante). 0h40.

En ce beau dimanche de l'été 1860, M. Dufour, quincaillier à Paris, part pour la campagne en compagnie de sa belle-mère, de sa femme, de sa fille Henriette et de son commis Anatole (son futur gendre et successeur) dans la voiture de son voisin, le laitier. Ils choisissent l'auberge du père Poulain pour déjeuner sur l'herbe.

Deux "canotiers", Henri et Rodolphe, entreprennent de faire la cour aux deux femmes. Après le repas, tandis que M. Dufour et son commis s'en vont pêcher avec les lignes prêtées fort obligeamment par les deux compères, ceux-ci emmènent les dames faire une promenade en barque.

La mère se laisse entraîner dans un fourré par l'entreprenant Rodolphe. Sa fille connaît une étreinte brève mais passionnée dans les bras du timide Henri. La pluie met fin à l'idylle.

"Des années ont passé, avec des dimanches tristes comme des lundis. Anatole a épousé Henriette". Le jeune ménage revient chez le père Poulain. Henriette rencontre son ancien amoureux sur le lieu même de leur étreinte. Ils ont à peine le temps d'échanger quelques mots que le mari s'éveille de sa sieste. La séparation sera définitive.

La méchanceté de Maupassant se combine à la chaleur humaine de Renoir, et cette très belle chronique d'un dimanche d'été est aussi un conte inquiet, tendre et mélancolique, caustique et troublant.

Une peinture impressionniste

Il est incontestable que dans ce film, Renoir rend hommage à son père dans un certains nombre de scènes. Il recherche le frémissement de la lumière sur les vêtements, les effets d'ombre au travers des feuillages.

Motifs d'Auguste et Jean Renoir
 
 
 
 
La yole, 1875
 
 
 
 
 

Jean Renoir interprète le rôle du père Poulain, propriétaire de l'auberge fréquentée par les deux canotiers où la famille Dufour décide de déjeuner sur l'herbe. Pour Daniel Serceau : "C'est un rôle accessoire, en soi inutile à la narration qui ne perdrait à peu près rien à sa disparition. Superflu dans le système des personnages, absent de la nouvelle de Maupassant, il ne l'est pas dans le projet symbolique du film où il assure une fonction d'incitateur au plaisir. Sur le plan de la nourriture d'abord en proposant aux deux jeunes hommes "une omelette à l'estragon", puis sur le terrain érotique en les invitant à passer l'attaque "si j'étais à votre place j'sais bien c'que je ferais", non sans avoir vanté les charmes de la mère précisément pour leur opulence : " la p'tite ! J'l'ai pas regardée ! Elle est trop maigre (...) la mère ! Parlez-moi d'un morceau !". Une profession de foi sensualiste où se mêlent tous les plaisirs de la chair, pourvu qu'elle soit abondante. Ainsi le personnage semble disparaître derrière l'auteur, ou celui-ci se dissimuler derrière celui-là. Plus que d'une fonction narrative, il convient donc de parler d'une fonction symbolique."(Analyse de Daniel Serceau, plus complète dans : Jean Renoir post-celluloïd dans CinémAction n°124. Le cinéma au miroir du cinéma. 2007.)

- Je viens souvent ici. Tu sais, j'y ai mes meilleurs souvenirs.
- J'y pense tous les soirs !