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Manhattan : la nuque d'une femme, Amy, qui se détourne soudainement vers son mari, Nick Dune. Celui-ci s'interroge off sur ce que l'on peut connaître des pensées de celle qui partage sa vie.
North Carthage dans le Missouri. "5 juillet, le matin où..." Nick Dunne quitte son domicile pour se rendre dans un bar que tient sa sœur, Margo. Tout ne va pas au mieux dans son couple : c'est aujourd'hui son cinquième anniversaire de mariage et il ne sait quel cadeau faire à sa femme, le dernier, un échange de fleurs ayant été un fiasco. Alors qu'il entreprend un jeu de société avec Margo, il est appelé au téléphone chez lui. Lorsqu'il arrive, il ne trouve pas son épouse Amy et découvre quelques meubles renversés et leur table de salon brisée. Nick Dunne, inquiet, signale la disparition de sa femme, Amy.
L'inspecteur Rhonda Boney et le sergent Jim Gilpin interviennent rapidement, trouvent quelques traces de sang, posent quelques questions et découvrent ainsi que Amy, c'est Amazing Amy, l'héroïne d'une bande-dessinée à succès qui a permis à ses parents d'amasser une belle fortune. Rhonda Bonney interroge Nick sur sa vie de couple et sur les occupations de sa femme, apparemment toujours seule à la maison, sans travail ni amies mais ne consommant ni drogue ni alcool.
Amazing Amy, écrit Amy dans son journal intime, vient de tomber amoureuse du type le plus cool qu'elle connaisse, loin des branchés et bizarres. Idyllique fut leur rencontre, scellée d'un baiser, sa demande en mariage au milieu de journalistes voulant voir le vrai visage d'Amazing Amy, leurs premières années de mariage : emplis de passion sexuelle et de cadeaux mutuels.
L'étau se resserre sur Nick qui ment aux policiers, ment à sa sœur et aux parents d'Amy. Celle-ci raconte dans son journal comment il devient de plus en plus violent et comment elle prit peur de lui. Mais la chasse aux trésors dans laquelle Amy a entrainé son mari bien malgré lui, lui fait comprendre qu'Amy a manigancé sa disparition pour le faire accuser de meurtre.
C'est bien le cas : au matin de sa disparition, Amy a simulé un combat chez elle, a répendu son sang sur le sol puis l'a mal nettoyé et s'est enfui en voiture avec pour projet de faire condamner à mort son mari pour sa propre mort qu'elle a d'ailleurs l'intention de se donner comme ultime preuve de sa vengeance.
Pour Nick la vie devient en enfer alors qu'Amy distille les ultimes étapes de son plan: la venue des policiers chez Margo afin qu'ils découvrent le trésor caché. Mais Amy ne s'est pas suffisamment méfiée de ses voisins de mobil-homes. Ils la dévalisent. Restée toute seule au bord d'une route et sous la pluie, elle est contrainte d'appeler Collins à son secours.
L'interview à la télévision de Nick est un succès mais il est bientôt incarcéré alors d'Amy est elle-même enfermée par Desi Collins. L'un s'en sortant grâce à son avocat l'autre en égorgeant son chevalier servant trop empressé.
Lorsqu'Amy revient au domicile conjugal comme une victime d'enlèvement, Nick lui fait savoir qu'il n'est pas dupe. Mais le monde médiatico-policier contraint Nick et Amy à vivre ensemble.
Gone Girl est probablement l'un des films les plus brillamment construits de l'histoire du cinéma. Composé de cinq parties, il utilise d'abord le montage parallèle pour décrire deux idées différentes du mariage, l'une appartenant à un passé fantasmatique, l'autre à un présent beaucoup plus terne. Sont ensuite montés en parallèle les plans de vengeance dans le passé avec les jours qui continuent de défiler dans la continuité de l'histoire racontée par Nick. C'est ensuite un montage alterné classique entre les deux lieux différents où sont enfermés le mari et la femme. La cinquième partie revient à une unité narrative pour mieux montrer l'incommensurable océan de mystère et de frustrations qui lie un couple que tout l'espace médiatique a consacré comme modèle à ses propres imperfections.
Les cinq actes du drame
La première partie narre les premiers jours de la disparition d'Amy. Parallèlement au cheminement de Nick qui dans le Missouri, apparait de plus en plus trouble et mystérieux alors que les parents ont lancé un médiatique appel à témoin, Amy raconte leur histoire à Manhattan. Ces flashes-back espacés narrent comment idyllique fut leur rencontre, scellée d'un baise dans un nuage de sucrer ; la demande en mariage avec une bague au milieu d'un carnet de prises de notes dans une assemblée de journalistes voulant voir le vrai visage d'Amazing Amy ; leurs premières années de mariage, emplies de passion sexuelle et de cadeaux mutuels.
Alors que l'étau se resserre sur Nick qui ment aux policiers, ment à sa sœur et aux parents d'Amy. Celle-ci raconte dans son journal comment il devient de plus en plus violent et comment elle prit peur de lui. Mais la chasse aux trésors dans laquelle Amy a entrainé son mari bien malgré lui, lui fait comprendre qu'Amy a manigancé sa disparition pour le faire accuser de meurtre. C'est deux premiers actes se concluent en effet sur la découverte terrible des cadeaux amassés dans l'abri de jardin et sur la signification des deux marionnettes.
Le troisième acte s'ouvre sur la reprise de l'histoire au matin de la disparition d' Amy. Sont montés en parallèle les plans de vengeance dans le passé avec les jours qui continuent de défiler dans la continuité de l'histoire racontée par Nick. Sa vie devient un enfer avec la venue des policiers chez Margo qui, informés par Amy, découvrent les trésors cachés. Mais Amy ne s'est pas suffisamment méfiée de ses voisins de mobil-home. Ils la dévalisent et elle est contrainte d'appeler Collins à son secours. Cette partie qui monte en parallèle deux séries situées dans un espace et un temps disjoints se termine avec la réunification du temps de la femme et du mari lorsqu'ils regardent simultanément la confession d'Andy, habillée pour la télévision d'un bien trop innocent col Claudine.
Le quatrième acte a pour premier point d'orgue l'interview à la télévision de Nick vue non pas quand elle est donnée mais quand elle est diffusée, le jour d'après, et qu'elle est vue simultanément par Amy et Nick. L'interview est un succès mais Nick est bientôt incarcéré alors d'Amy est elle-même enfermée par Desi Collins. L'un s'en sortant grâce à son avocat, l'autre en égorgeant son chevalier servant trop empressé.
Lorsqu'au cinquième acte, Amy revient au domicile conjugal comme une victime d'enlèvement, Nick lui fait savoir qu'il n'est pas dupe. Mais le monde médiatico-policier contraint Nick et Amy à vivre ensemble.
Le couple sous contrôle.
L'hystérie sociale contemporaine fait revenir aux temps de La poursuite impitoyable où police et justice rendent les armes devant les apparences. Le monde médiatique se déchaine contre Nick, le trouvant indifférent (ce qui est bien le cas) au malheur censé le frapper. Il ne rend pas l'image du mari dévoré d’angoisse, yeux en larmes et voix brisée. Ne correspondant pas au cliché de l'innocent, les médias en font un coupable et déchaînent les journalistes et les voisins contre lui. Il est moins surveillé par la police que par les cars de télévision et les chasseurs de selfies et de clichés de presse. Logiquement, l'expert l’avocat qui vient au secours de Nick quand tout l’accable est plus un communicant, un coach, qu'un juriste. L'inspectrice doit aussi renoncer. Face à vingt enquêteurs du FBI, tout contents que la disparue réapparaisse, il ne lui est pas laissé l'opportunité de poser les questions que son métier est en droit de lui faire poser.
Cette hystérie sociale, c'est justement celle sur laquelle compte l'hystérique Amy. celle-ci, fragilisée par des parents qui ont donné plus de temps et d'amour à l'Amazing Amy qu'à leur fille, espérait trouver en Nick un équilibre qui le ferait renoncer à sa propre volonté de remodeler ses petits amis sur un "amazing" modèle de perfection avant de les rejeter violemment en cas d'échec.
Un temps soignée, la blessure d'Amy ne s'en ouvre que plus violemment et c'est justement en comptant sur ce qu'elle voit dans les séries télévisées, les déballages de la télé-réalité et les romans policiers qu'elle manigance, un an durant, sa terrible vengeance. Car, contrairement a ce quelle a affirmé d'abord dans son journal intime, elle sait que le "Le mariage c'est du travail" et, d'expérience, qu'elle a été bien au-delà de ces épouses dont elle feint de se moquer qui promènent leur mari en laisse comme un chien savant. Mais de son côté, Nick se comporte plus que de raison en gars du Missouri, du sud profond. Il collectionne dorénavant les clichés de la crise de la quarantaine, n'ayant plus foi dans son métier et son couple. Il cherche dans les jeux vidéo et une jeune maîtresse de quoi redonner des couleurs à son quotidien. Pire même, il préfère divorcer et se résoudre à une vie sans éclat.
Quand elle s'enfuie, Amy abandonne son travail sur son image et c'est d'un gros sandwich qu'elle déjeune dans des habits grossiers et dans une voiture passe-partout. Elle abandonne aussi le contrôle minimum qu'elle donne d'elle-même et de sa fortune de billets. Les marginaux iront sans plus de manière à l'essentiel, l'argent, dès qu'ils l'ont découvert.
Cette obsession du contrôle est en revanche poussée à l'extrême par Collins qui, traumatisé par son échec adolescent avec Amy, a surdéveloppé le contrôle de sa vie et de son chalet. Amy ne peut alors que le prendre à son propre jeu et utilise les images vidéo à son avantage, rejouant encore la scène du viol simulé, meilleure encore qu'avec son second petit ami, et la concluant dans une apothéose de sang.
Nick a parfaitement décrypté les signes laissés pour lui par Amy mais ne peut toutefois que rejoindre sous la douche sa lady Macbeth triomphante qui se lave tranquillement du sang de sa victime qui se répand jusqu'à lui pour en faire un complice. Le passé de la cellule familiale, le souvenir d'une mère aimante et la relation fraternelle avec sa sœur jumelle, salie par les soupçons de "tweenceste" développés par les média, sont de peu de poids vis à vis de l'enfermement médiatique qui les définit comme nouveau couple ayant vaincu les épreuves de l'infidélité et de l'usure.
La même séquence qui ouvre et clôture le film en constitue le mince espoir : en dépit du médiatique contrôle, le mystère demeure. Car vivre pour les medias, c'est accepter de vivre sous le contrôle des signes les plus attendus. Vivre selon le cinéma, ce flash-forward initial, les ellipses et les figures du montage mais aussi le baiser de sucre, la bague, le journal intime à moitié brûlé, les cadeaux accumulés dans l'abri de jardin ; c'est choisir la romance et la violence, l'exaltation des signes les plus beaux et les plus dangereux. .. Ou alors vivre comme le chat du couple, resté indifférent à l'hystérie avec laquelle le monde s'empresse de contrôler nos vies.
Jean-Luc Lacuve le 15/10/2014.