Le signe du lion

1959

Avec : Jess Hahn (Pierre Wesserlin), Michèle Girardon (Dominique Laurent), Van Doude (Jean-François Santeuil), Paul Bisciglia (Willy), Gilbert Edard (Michel Caron), Stéphane Audran (La patronne de l'hôtel), Marie Dubois. 1h43.

Pierre Wesserlin, compositeur d'origine étrangère, mène à Paris une vie de bohème, passant son temps en beuveries et accumulant les dettes. Un matin de juin, il apprend qu'une riche tante dont il est avec son cousin Christian, le seul héritier, vient de décéder. Afin de célébrer dignement l'événement il emprunte de l'argent à son ami Jean-François, journaliste à Paris-Match, et organise une grande fête avec tous ses amis. Il se moque de son horoscope qui lui prédit jusqu'à la fin de l'été, une période difficile (suivie, il est vrai, de beaucoup de chance)...

Aussitôt après, Jean-François part en reportage. A son retour, il apprend que Pierre a été déshérité. Il a changé de domicile et l'on a perdu sa trace. Jean-François se lance à sa recherche, mais il est obligé de repartir pour l'étranger.

Pendant ce temps, la situation se dégrade pour Pierre. Les amis qui pourraient l'aider sont en vacances. La patronne de son hôtel le jette à la rue en gardant ses bagages. Affamé, sans logis, il dort à la belle étoile et tente maladroitement de dérober de la nourriture. Un clochard pittoresque, apitoyé par sa détresse, le prend sous sa protection et lui apprend à faire la manche.

A son retour d'Afrique, Jean-François tente à nouveau de contacter son ami. A sa dernière adresse, il récupère son courrier et apprend que le cousin Christian s'étant tué en voiture, Pierre est désormais le seul héritier de la fortune de sa tante. Mais comme le musicien, honteux de sa déchéance, évite les quartiers où il pourrait rencontrer ses anciens amis, il demeure introuvable.

Un soir cependant le clochard l'emmène jouer de la musique aux terrasses de Saint-Germain-des-Prés. C'est là que Jean-François le retrouve et lui apprend la bonne nouvelle. L'horoscope, finalement, ne s'était pas trompé.

Tourné en 1959, entre Les quatre cents coups, de Truffaut et A bout de souffle, de Godard, le premier long métrage d'Eric Rohmer ne devait sortir que trois ans plus tard à la sauvette et dans une version tronquée. Sans doute parce qu'il n'avait ni la brillance de l'un ni la charge émotionnelle de l'autre.

A le revoir aujourd'hui, on est en effet frappé par la retenue du ton et la noirceur du propos. A Paris, un musicien américain, insouciant et bohème, apprend qu'il va hériter d'une fortune. Il tape un copain, réunit tous ses amis et fait la fête. Ses amis partent en vacances. Il est déshérité. Et, peu à peu se clochardise. C'est un film sur l'indifférence. Sur la solitude. Et quand le conte - car c'est déjà un conte que nous conte Rohmer - connaît, grâce au hasard, un dénouement heureux, notre clochard redevenu milliardaire se montrera lui aussi indifférent envers le seul type qui l'aura aidé.

Le goût de la déambulation, cette façon de filmer l'essence même des lieux, le rôle accordé au hasard - ou au destin -, tout cela nous le retrouverons, vingt-deux ans plus tard, dans les Comédies et proverbes. La noirceur en moins. La grâce en plus. Claire Vassé

 

Test du DVD

Editeurs : Potemkine et Agnès B. Novembre 2013. 30 DVD et leur déclinaison blu-ray pour les 22 films restaurés HD. 200 €.

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