Grizzly man

2005

Genre : Documentaire

Avec : Timothy Treadwell et Amie Huguenard (images d'archives), Franc G. Fallico (le médecin légiste), Jewel Palovak (amie de Timothy, fondatrice de Grizzly people) Willy Fulton (le pilote) Carol et Val Dexter (les parents de Timothy), Larry Van Daele (le biologiste), Marc et marnie Gaede (Ecologistes), Sam Egli (le responsable de la base), Sven Haakanson (directeur du musée), Kathleen Parker (amie du campement d'été), Warren Queeney (l'ami acteur). 1h43.

Timothy Treadwell n'est pas un homme comme les autres. Au début des années 90, il se lance dans une aventure hors du commun : vivre chaque été au milieu des grizzlys d'Alaska, en solitaire, et ce, sans aucune arme. Son but : protéger les ours des braconniers et se fondre dans leur écosystème.

Durant les cinq dernières années, accompagné d'une petite caméra, il a filmé ces géants de la nature comme personne ne l'avait fait, mais finit par se faire dévorer par l'un d'eux en 2003.

Treadwell était un illuminé, ancien champion déchu, ancien acteur raté, ancien alcoolique et drogué, il avait trouvé dans la défense des ours un combat rédempteur.

Le film est moins un documentaire animalier ou même un documentaire sur le travail de Treadwell qu'une tentative de redonner de la folie à des images d'archives. Il s'agit ainsi d'un documentaire de fabulation où Herzog tente de restituer la folie de Treadwell comme Perrault dans La bête lumineuse ou Deligny dans Le moindre geste.

Herzog tente ainsi d'insuffler au documentaire la folie de Treadwell dont il se sent proche. Il a lui-même tourné dans la jungle dit-il en prenant pour sujet des personnages d'exception : Aguirre ou Fitzgeraldo, aussi excessifs l'un que l'autre dans leur désir de trouver l'Eldorado ou de faire traverser la forêt à un bateau. Comme eux, Treadwell a franchit une limite que lui, Herzog n'a pas franchi. Ici Treadwell se prenait pour l'un des animaux alors que ceux-ci n'ont jamais rien pu comprendre de lui ou de son combat.

Classiquement, Herzog convoque des experts. Ils disent l'inanité du combat de Treadwell. Herzog convoque aussi ses proches pour redonner son innocence à Treadwell. Dans le camp des experts le biologiste, le directeur du musée, et le patron de l'aérodrome. Dans le camp des amis proches : les parents, l'ami acteur, les amis écologistes et Kathleen Parker qui préparait le camp d'été.

Trois acteurs

Willy Fulton, le pilote de l'avion, Jewel Palovak, amie de Timothy, fondatrice de Grizzly people et le médecin légiste ont, eux, un statut bien particulier : celui d'acteurs dans le film d'Herzog.

Le premier conduit le spectateur sur les lieux où Treadwell s'est fait dévorer et explique longuement la découverte du corps ainsi que la seconde expédition où les autorités ont tué l'ours mangeur d'hommes. A la fin du commentaire, il reviendra pour la cérémonie de dispersion des cendres avec Jewel Palovak et Kathleen Parker. Jewel Palovak joue le rôle de l'amie éplorée qu'il faut protéger de l'écoute de la bande sonore enregistrant les derniers instants de Timothy. Il y a fort à parier que Herzog a préféré cette mise à distance de la terreur plutôt que de faire écouter une bande-son sans image probablement moins suggestive que son commentaire.

Mais le clou du film d'Herzog est l'intervention du médecin légiste. La première scène dans laquelle il intervint est probablement improvisée. Il est là pour la remise sentimentale de la montre de Timothy à Jewel. Pour cette transmission hautement symbolique, il a pourtant omis de retirer le sac plastique de l'enquête qui l'entoure encore. Il s'en tire néanmoins très bien, découpant le sac et se montrant gentiment paternaliste avec Jewel. Herzog reconnait sans doute là un frère car il le fait jouer en costume de médecin légiste une reconstitution de l'examen du corps de Timothy. Filmé en grand angle, le médecin présente un cercueil dans une mise en scène digne de Nosferatu avant de nous faire, toujours en grand angle, la description de l'autopsie de Timothy.

Images d'archives

Herzog met aussi en scène les images d'archives de Timothy. Il souligne ses talents (fort discutables) d'acteur et s'extasie sur ses capacités de mise en scène sous prétexte qu'une fois un renard surgit à l'improviste dans le champ consacré à l'étude de l'ours. Parfois pourtant Timothy est pris d'excès dignes d'intérêt (lorsqu'il rejoue plusieurs fois la même prise, lorsqu'il assiste à l'orage impuissant sous sa tante) et peut-être surtout lorsqu'il invective les touristes entrés dans son périmètre.

Pour le reste les images d'archives sont un peu gâchées par le jugement omniprésent de Herzog sur Treadwell. Les témoiganges du patron de l'aéroport, du guide du musée et du biologiste plein de bon sens suffisent pour se faire une opinion sur l'intérêt écologique du travail de Treadwell.

Jean-Luc Lacuve le 10/04/2008