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2007

Genre : Drame social

Avec : Kierston Wareing (Angie), Juliet Ellis (Rose), Leslaw Zurek (Karol), Joe Siffleet (Jamie), Colin Caughlin (Geoff), Davoud Rastagou (Mahmoud). 1h33.

Angie se fait virer d'une agence de recrutement pour mauvaise conduite en public. Elle fait alors équipe avec sa colocataire, Rose, pour ouvrir une agence dans leur cuisine. Avec tous ces immigrants en quête de travail, les opportunités sont considérables, particulièrement pour deux jeunes femmes en phase avec leur temps

Les motivations psychologiques d'Angie sont clairement mises en place. Premièrement : elle est dégoûtée de se faire perpétuellement avoir par les patrons d'entreprises de recrutement qui ramassent l'argent qu'elle contribue en grande partie à leur faire gagner. Deuxièmement : elle aimerait bien prouver à elle-même, son fils et son père qu'elle est capable d'être une gagnante. Elle aimerait aussi venir en aide aux émouvants émigrants clandestins. Troisièmement: elle aimerait bien respecter la légalité mais, devant les difficultés, repousse toujours à plus tard les difficiles démarches légales. Energique, elle n'écoute qu'elle et pense, qu'après les coups vaches (dénoncer ceux-là même qu'elle a contribué à aider), elle pourra prouver qu'elle a du cœur.

La dynamique du film repose ainsi sur la description du constat social, l'analyse des sentiments d'Angie et le suspens quant à l'échec ou la réussite de son entreprise. Chacune des saynètes du film tente de faire s'interpénétrer ces trois axes.

Côté constat social, on n'apprend pas grand-chose. Le film fonctionne en vase clôt : aucun représentant de l'autorité ne vient perturber le cheminement d'Angie. Le rapport évoqué dans le film comme quoi le gouvernement se contente d'envoyer des lettres d'avertissement aux plus gros employeurs de clandestins sans les sanctionner doit donc être pris pour la vérité.

Côté sentiment, les histoires du fils, violent pour compenser son manque d'amour, des parents, représentants de la bourgeoisie prolétaire en voie de disparition affirmant leurs valeurs de solidarité, de l'amant polonais, beau et moral, sont littéralement bâclés en trois ou quatre clichés. Seul, le comportement de drague très masculin d'Angie (call boys dans la boite) est un peu original.

La déchéance morale d'Angie, qui va de pair avec le succès de son entreprise, est donc un pur choix de Ken Loach qui ne lui donne à aucun moment un instant pour faire autre chose et bâcle toutes les relations qu'elle entretient. A aucun moment, il ne donne l'impression que quelque chose va pouvoir se passer en dehors du scénario de l'échec moral qu'il a prévu d'assener sur son héroïne.

C'est finalement moins l'indigence formelle du film (esthétique efficace d'un téléfilm) qui gêne que l'impression de vouloir nous faire ingurgiter de force le scénario d'un échec moral. Difficile de montrer le moindre goût pour un film dont le réalisateur sanctionne aussi tranquillement son personnage.

Jean-Luc Lacuve le 06/01/2008