Une histoire immortelle (Orson Welles, 1968)
Le festin de Babette (Gabriel Axel, 1987)

Karen Blixen naît le 17 avril 1885. Elle est la fille d'Ingeborg Westenholz et de l'écrivain et officier Wilhelm Dinesen qui, semble-t-il, aurait été atteint de syphilis, et en conséquence se suicide par pendaison alors que Karen n'a que neuf ans, en 1895. Elle fait ses études à Copenhague, puis des études d'art à Paris et à Rome.

Riche, elle rejette le mode de vie bourgeois et se tourne vers la peinture et l'écriture. Elle disait "Je n'ai jamais tant aimé en ce monde que la peinture et l'écriture. Mais si j'avais à choisir, je ne serais ni peintre ni écrivain mais fermière."

Elle fait ses débuts d'écrivain en 1907 par la publication d'un conte Les Reclus (Eneboerne), d'autres suivront jusqu'en 1909, mais Karen Blixen cesse d'écrire devant leur peu de succès. En 1909, elle éprouve une grande passion non partagée pour son cousin issu de germain, Hans von Blixen-Finecke, suivie d'une longue période de désespoir. En décembre 1912, elle se fiance avec le baron Bror von Blixen-Finecke, frère jumeau de son ancien amour. L'année suivante, les fiancés projètent l'achat de la plantation de café M'Bagathi, qu'ils parviennent à réaliser grâce à un important investissement financier de la famille de Karen. Bror Blixen est nommé directeur des Cafés Karen, choix qui se révèlera malheureux en raison de ses faibles talents pour la gestion et l'agriculture.

Le 14 janvier 1914, Karen Blixen débarque à Mombasa et se marie le jour-même avec Bror. Peu après son mariage, elle apprend que son mari lui a transmis la syphilis. En raison de la difficulté d'un traitement sur place, Karen Blixen viendra se faire soigner au Danemark en 1915. Son frère et confident, Thomas Dinesen, vient la rejoindre pour l'aider à la plantation de 1918 à 1923. Les deux époux s'éloignent de plus en plus, notamment en raison de la gestion calamiteuse de Bror et de ses infidélités (d'ailleurs tolérées). Ils divorcent en 1925, mais restent en bons termes.

En 1918, elle rencontre Denys Finch Hatton, pilote de l'armée de l'air britannique. Il devient son grand amour africain même si leurs relations sont parfois orageuses. Il meurt dans un accident d'avion le 14 mai 1931, à l'âge de 44 ans.

Grâce à Denys, Karen Blixen accueille le 9 novembre 1928 dans sa ferme le prince de Galles, futur Édouard VIII, héritier du trône d'Angleterre. Mais la situation financière de l'exploitation se dégrade d'année en année, la ferme est alors vendue, et Karen Blixen doit quitter définitivement l'Afrique en juillet 1931 avant d'accoster à Marseille le 19 août suivant. Elle rejoint le domaine familial de Rungstedlund le 31 août 1931. Elle est alors financièrement ruinée, sentimentalement désespérée ; en quittant sa ferme et l'Afrique son échec lui semble total. Pour combler le vide de sa vie, elle se met à écrire. "Personne n'a payé plus cher son entrée en littérature", dira-t-elle plus tard.

Après de nombreux refus, ses Sept contes gothiques sont enfin acceptés par un éditeur américain, Robert Haas en 1934. Karen Blixen décide de les publier sous le pseudonyme d'Isaac Dinesen. L'accueil du public américain est enthousiaste. La Ferme africaine (Den afrikanske farm, titre en danois ; Out of Africa en anglais) sort en 1937. Confinée au Danemark occupé pendant la guerre, elle publie Les contes d'Hiver (Winter's Tales) en 1942.

Après la Seconde Guerre mondiale, son domaine de Runstedlund devient un petit cercle littéraire où Karen Blixen reçoit de nombreux jeunes écrivains et intellectuels danois, principalement issus de la revue littéraire Heretica. Elle engage Clara Selborn qui devient sa secrétaire, ainsi que sa conseillère artistique et économique. Elle s'affirme peu à peu comme une figure de premier plan de la vie artistique danoise, notamment par le biais de nombreuses causeries radiophoniques.

En 1958, Karen Blixen prend l'initiative de créer une fondation pour la pérennité de son domaine de Runstedlund, avec la création d'une réserve pour les oiseaux dans le parc. Elle publie la même année Les annecdotes du destin, comprenant notamment Le Festin de Babette qu'elle traduit et amande par raport à son etxte inititial en anglais.

Affaiblie et malade, elle entreprend un voyage de quelques mois aux États-Unis en 1959, où l'accueil de son public est triomphal. Elle réalise un vieux rêve, dîner avec Marilyn Monroe et son mari Arthur Miller. Elle voyage encore à Paris en 1961, puis meurt dans sa maison de Rungstedlund, le 11 septembre 1962. Elle est enterrée dans le parc de sa demeure.



Les oeuvres de Karen Blixen et leurs adaptations

C'est l'une des principales héritières du style gothique anglo-saxon, qu'elle prolonge par un fantastique personnel.

1934 : Sept contes gothiques : Le raz de marée de Norderney, Le vieux chevalier errant, Le singe, Sur la route de Pise, La soirée d'Elseneur, Les rêveurs, Le poète
1937 : Out of Africa (La ferme africaine)
1942 : Contes d'hiver : Histoire du petit mousse, Le jeune homme à l'œillet, Les perles, Les irréductibles propriétaires d'esclaves, L'héroïne, L'enfant rêveur, Alcmène, Le poisson, Peter et Rosa, Le champ de la douleur, Une histoire consolante
1944 : Les Voies du châtiment
1957 : Les Derniers Contes (recueil rassemblant plusieurs séries de contes) : Contes tirés du roman "Albondocani" : Le premier conte du cardinal, Le Manteau, Promenade de nuit, Sur les pensées cachées et sur le Ciel, Les contes des deux vieux messieurs, Le troisième conte du cardinal, La page blanche. Nouveaux contes gothiques : Les Caryatides, histoire inachevée, Échos. Nouveaux contes d'hiver : Une histoire campagnarde, Saison à Copenhague, Conversation nocturne à Copenhague
1958 : Anecdotes du destin : Le plongeur, Le festin de Babette, Tempêtes, L'éternelle histoire, L'anneau
1960 : Ombres sur la prairie : Ombres sur la prairie, Barua a Soldani, Le grand geste, Échos des montagnes
1975 : Les chevaux fantômes (posthume) : Ehrengarde, Seconde rencontre, Le gros homme, Les Chevaux fantômes
1975 : Les fils de rois (posthume) : Les deux solitaires, Le Laboureur, En attendant les mariés, La Famille de Cats, Oncle Théodore, Carnaval, Le dernier jour, Les Fils de rois, Oncle Sénèque, Anna, L'Orgueilleuse, L'Ours et le baiser.



Out of Africa
(Den afrikanske farm / La ferme africaine)
1937

La ferme africaine qui ne devait être au départ qu'une série de tableaux réalistes, de récits de voyages, relate la vie de l'auteure sur sa ferme au Kenya, sur laquelle elle règne en maître, à la manière d'un seigneur féodal, mais pourvu de la sensibilité d'une Européenne cultivée du XXe siècle.

Dans un style sobre, serti de descriptions sublimes du paysage et du monde animal africains, elle raconte ce qui fut une découverte déterminante dans sa vie: celle de l'âme noire. Elle s'insurge contre la médiocrité et les préjugés raciaux des colons anglais et estime supérieurs à bien des égards les Africains :" Les Noirs, en effet, sont en harmonie avec eux-mêmes et leur entourage, intégrés à la nature… Dès que j'ai connu les Noirs, je n'ai eu qu'une pensée, celle d'accorder à leur rythme celui de la routine quotidienne que l'on considère souvent comme le temps mort de la vie . [...] Ils entrèrent dans mon existence, comme une sorte de réponse à quelque appel de ma nature profonde."

Le roman paraît pour la première fois en français en 1942 dans une traduction d'Yvonne Manceron basée sur la seconde version du roman, celle de 1938 en anglais. La nouvelle traduction du danois par Alain Gnaedig en 2005 se base sur la toute première version de 1937.

1985 : Sidney Pollack, Out of Africa. Avec : Meryl Streep (Karen Blixen-Finecke), Robert Redford (Denys Finch Hatton), Klaus Maria Brandauer (Baron Bror Blixen-Finecke), Michael Kitchen (Berkeley), Joseph Thiaka (Kamante), Stephen Kinyanjui (Kinanjui), Michael Gough (Delamere), Suzanna Hamilton (Felicity), Malick Bowens (Farah), Rachel Kempson (Lady Belfield). 2h41.


Le dîner de Babette
1958

La ville de Berlevaag dans le fjord du même nom en Norvège. Filippa et Martine, deux vieilles demoiselles, filles d'un pasteur puritain autrefois célèbre ont pour servante une française, Babette, et passent leur vie à entretenir le souvenir de leur père et à s'occuper des pauvres de leur village. Autrefois, elles étaient jeunes et belles et tous les garçons du village se pressaient à l'église pour les voir. Mais chaque demande en mariage était repoussée par le pasteur, fier de la petite secte dont il était le chef et comptant sur ses deux filles pour l'aider : "Dans ma vocation mes deux filles sont ma main gauche et ma main droite". voir la suite de l'histoire dans l'adaptation de Gabriel Axel)

 

1987 : Gabriel Axel, Le festin de Babette. Avec : Stéphane Audran (Babette Harsant), Birgitte Federspiel (Martina), Bodil Kjer (Philippa), Jarl Kulle (Lorenz Lowenhielm), Jean-Philippe Lafont (Achille Papin), Bibi Andersson (une dame), Ghita Nørby (la narratrice), Asta Esper Hagen Andersen (Anna), Thomas Antoni (Lorenz, jeune). 1h42.

Karen Blixen a écrit Le festin de Babette directement en anglais et il parait sous le titre Babet's feast dans la revue américaine Ladies' home journal en juin 1950. Il est repris tel quel dans le volume Anecdotes of destiny (1958) sous le pseudonyme habituel de Isak Dinesen. En 1952, le conte est publié au Danemark sous le titre Babettes Goestebug (le festin de Babette) traduit par Jorgen Claudi, le traducteur officiel de Karen Blixen en danois.

Enfin ce conte paraît en 1958 au Danemark dans le recueil Skoebne Anekdoter. Mais Karen Blixen ne se contente pas de traduire elle-même. Elle amande, modifie, l'allonge, bref le réécrit. Karen Blixen a quitté l'Afrique anglophone depuis 1931, elle parle aussi fort bien le français et l'allemand mais son style en danois est plus riche et plus précis. La version de 2007 chez Folio remplace donc celle de 1961, le dîner de Babette, traduit par Marthe Metzger à partir des deux premières versions anglo-danoise.

Le conte comporte une forte concentration de citations ou allusions à la bible, ancien et nouveau testament. Le livret de Don Juan, qui apparaît dans presque tous les contes des sept textes gothiques est ici introduit par Achille Papin. En revanche pas de citations de Shakespeare.

L'opposition entre les deux sœurs Martine et Philippa, qui doivent leurs prénoms à Martin Luther et son ami Philippe Melanchthon d'une part et Babette d'autre part s'incarne dans les les cheveux blonds des unes et les cheveux noirs de l'autre : l'esprit contre la beauté. Elle s'incarne aussi dans l'esprit de sacrifice, de choix déchirant des unes d'un côté et l'acceptation du bonheur comme du mlaheurde l'autre dans els nourrituers aust-ères des unes et le dieu sans péché de l'église catholique et romaine où l'homme peut se considèrer comme un dieu (Don Juan) ; le dieu de l'art. Babette la cuisinière communarde, est perçue comme la sorcière envoyée par le diable mais elle reussit à vaincre Philippa (a combien tu raviars els anges). L'artiste Babette désire comme client une élite de gourmets pour leur servir des mets coûteux, délicats et raffinés art fin de siècle, celui de l'esthétique symboliste de Karen Blixen.

 


L'éternelle histoire
1958

Un riche et vieux marchand est fasciné par une légende qui court parmi les marins : un jeune marin aurait été payé par un riche vieillard pour donner un héritier à la femme de ce dernier. Désirant donner vie à cette légende, il paie un jeune marin danois pour coucher avec sa femme, qui est en fait la fille d'un associé qu'il a autrefois conduit au suicide. L'évènement se produit et, incapable de supporter l'accomplissement de son ultime rêve, le vieil homme meurt.

 

1968 : Orson Welles, Une histoire immortelle. Avec : Orson Welles (Mr Clay et la voix du narrateur), Jeanne Moreau (Virginie), Roger Coggio (Elishama Levinsky), Norman Eshley (le marin, Paul), Fernando Ray (un habitant de Macao). 0h58.

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