Les rendez-vous de Paris

1995

Avec : Clara Bellar (Esther), Antoine Basler (Horace), Mathias Mégard (le dragueur), Judith Chancel (Aricie), Malcolm Conrath (Felix), Cécile Parès (Hermione), Olivier Poujol (Le garçon de café) / Aurore Rauscher (Elle), Serge Renko (Lui), Michael Kraft (Le peintre), Bénédicte Loyen (La jeune femme), Veronika Johansson (Anita, la suedoise). 1h34.

LE RENDEZ-VOUS DE 7 HEURES. Esther apprend par son ami Félix que son amant Horace a été souvent aperçu en galante compagnie chez «Dame Tartine», un café sur le parvis de Beaubourg. Ébranlée, elle se confie à Hermione, sa meilleure amie, qui lui conseille de rendre Horace jaloux en se montrant elle aussi avec d’autres garçons.

Le lendemain, en faisant son marché Boulevard Edgar-Quinet, Esther se laisse aborder par un dragueur à qui elle donne rendez-vous le soir même à sept heures chez Dame Tartine. À peine se sont-ils quittés qu’elle constate la disparition de son portefeuille et en conclut que son dragueur est aussi un voleur. Aricie trouve le portefeuille, qu’elle rapporte aussitôt à Esther. Toutes deux sympathisent et Esther décide d’accompagner Aricie… qui doit retrouver un nouvel amoureux chez «Dame Tartine». Le garçon en question est Horace, qu’Esther fait d’abord mine de ne pas connaître, puis rabroue lorsqu’il la suit dans la rue. Restée seule, Aricie règle les consommations, puis s’en va. À sa table, vient s’asseoir le dragueur, ponctuel au rendez-vous.


LES BANCS DE PARIS. Lassée de Benoît, un amant qu’elle n’aime plus mais qu’elle n’a pas le courage de quitter, une jeune femme retrouve sur les quais puis à la Fontaine Médicis du jardin du Luxembourg un professeur très épris d’elle. Désirant changer de quartier, elle entraîne son soupirant à la découverte des parcs et squares de la capitale, le cimetière saint Vincent, Le bateau-lavoir, 7 rue Ravignan, rendez-vous des peintres cubistes, le parc de Belleville, le parc de La villette, le parc de Montsouris, les jardins du Trocadéro, les serres d'Auteuil. Mais à mesure que l’hiver approche, ces rencontres sont de plus en plus inconfortables. Benoît devant se rendre à Lyon, elle propose au professeur de passer un week-end «en touristes» dans un petit hôtel de Montmartre. Arrivée sur les lieux, elle aperçoit Benoît entrer dans l’hôtel avec une autre fille. Écœurée, elle décide de rompre à la fois avec son amant et avec son nouveau soupirant, au grand dam de celui-ci.


MÈRE ET ENFANT, 1907. Un artiste-peintre du Marais reçoit souvent de belles et blondes Nordiques que lui adresse une amie suédoise. La dernière en date, Anita, le dérange en plein travail. En outre, elle n'aime pas ses œuvres qu'elle trouve "tristes". Après l'avoir accompagnée jusqu'au Musée Picasso, il la quitte en lui donnant rendez-vous le soir même à La Coupole.

Mais sur le trottoir, il croise une jolie brune venue superviser la qualité du tirage d'une reproduction pour un livre sur la mère et l'enfant. Il la suit dans le musée où elle compare les couleurs du tableau Mère et enfant, le tableau de Picasso de 1907 à celles des épreuves. Il retrouve Anita qu'il plante à nouveau pour aborder l'inconnue dans la rue. Elle le décourage immédiatement : jeune mariée en pleine lune de miel, elle est sure d'elle et rejoint son mari dans 20 minutes avant de décoller dans deux heures pour Genève où son mari est éditeur d'art. Elle accepte néanmoins d'aller chez lui voir ses peintures, sans pour autant répondre à ses avances.

Le soir, la Suédoise n'est pas au rendez-vous. Le peintre rentre chez lui et retouche ses tableaux de teintes plus "gaies". Finalement, la journée n'a pas été totalement perdue.

Dans le premier épisode, le hasard dédaigné par Esther ne lui permet pas de rencontrer le dragueur. Elle reste dans sa situation amoureuse difficile et fragile. Dans le second épisode, le hasard permet de mettre fin à deux relations moribondes.

Dans le troisième enfin, le hasard permet in extremis au peintre de modifier sa toile dans une direction qu'il n'avait pas prévue. Le peintre n'a que peu de goût pour Anita qui n'est à Paris que pour un court séjour. Anita refuse sa tentative de drague rapide et trop voyante et ne se gêne pas pour lui dire tout le mal qu'elle pense de sa peinture sinistre, pas gaie voire franchement concentrationnaire. Le peintre, agacé par les conseils d'une simple décoratrice d'intérieur, en rajoute sur ses goûts artistiques : "Si Paris est trop propre, je n'aurai plus envie de le peindre". Il plante ensuite Anita devant le musée avec une formule toute faite : "Il faut parler de la peinture quand on l'a vu pas quand on la voit" puis en trouve une autre quand il la revoit : "L'emprise de Picasso est redoutable : c'est encore plus contraignant de ne pas le voir que de le voir". Ses commentaires sur le peintre ("Picasso n'est jamais Picasso, c'est pourquoi il est toujours Picasso") ou sur son tableau Mère et enfant, sont pourtant pertinentes (Comment Picasso est à la fois influencé par Matisse avec des couleurs saturées où le vert s'oppose aux deux rouges-brique tout en s'en détachant avec un tableau qui annonce le cubisme). Face à cela, Anita, qui préfère l'exubérance violente de la période surréaliste, se moque des deux rouges : "du bifteck et du jambon".

Ainsi, lorsque le peintre se met à suivre la jeune femme, il semble avoir bien raison, même si son discours semble largement improvisé : il a cessé de s'intéresser aux femmes qui ne lui plaisent plus vraiment mais se sent dès lors corrélativement obligé de suivre celles qui lui plaisent vraiment. En partant, l'inconnue lui conseille d'amener sa blonde chez des amis, lui faisant remarquer que son physique a de quoi inspirer un peintre. Cette remarque fait son chemin dans la tête du peintre qui retouche alors sa toile dans la direction plus gaie que lui avait suggéré Anita.

Tableau avant la visite d'Anita
Tableau retouché pendant la nuit

A noter les deux premiers travellings du cinéma de Rohmer avant ceux de Conte d'été : celui d'une minute depuis la sortie du musée Picasso et toute la filature rue de Thorigny et le suivant de deux minutes avec cinq changements de trottoirs pour la discussion qui suit.

Devant les tableaux qui ont été peint auparavant par Pierre de Chevilly, le peintre dit ne pas partir d'une photographie mais se transformer lui-même en appareil photographique.

Mère et enfant (Picasso, 1907)
montré plein cadre
L'inconnue comparant les couleurs du tableau
à celle de l'épreuve

Jean-Luc Lacuve le 26/11/2013.

 

Test du DVD

Editeurs : Potemkine et Agnès B. Novembre 2013. 30 DVD et leur déclinaison blu-ray pour les 22 films restaurés HD. 200 €.

DVD20, Les rendez-vous de Paris. Suppléments : Jeux de société (1989, 57'). Entretien avec Diane Baratier (18').