Les Grands Voisins, la cité rêvée

2020

Avec : Adrien Collet, Maël, Kamel, William Dufourcq, Thierry Miekisz, Néji ll Ayachi, Mathurin Maine. 1h36.

Juin 2015. hôpital Saint-Vincent-de-Paul, ancienne maternité d'importance au cœur du XIVe arrondissement de Paris, est désaffecté. En attendant al construction d'un écoquartier, la mairie accepte que, pour deux ans, les quatre hectares de bâtiments et terrains soient mis à disposition du projet des Grands Voisins mené par des travailleurs sociaux sous la direction de William Dufourcq afin de proposer des hébergements d'urgence. Le projet des Grands Voisins se monte ainsi avec trois associations ; "Aurore", chargée de la médiation et de l'hébergement d'urgence, "Yes we camp" qui accueille artistes en résidence et "Plateau urbain" pour l'aménagement des lieux.

Bastien Simon, accueilli en résidence va alors suivre le parcours de Maël, résident sans papier, artiste peintre à ses heures, Adrien Collet, luthier musicien mais surtout animateur des cours de musiques qui seront l'occasion de rencontrer d'autres résidents.

Adrien qui fabrique des guitares artisanes est heureux d'avoir trouvé là des occasions de rencontres exceptionnelles et il se donne sans compter pour monter un groupe avec des résidents ayant pour la plupart des problèmes d'addiction. Ce sera KaceKode, groupe qui enregistrera un disque et jouera en plein air devant Anne Hidalgo et la maire du XIVe pour une fête réunissant quelques 400 jeunes.

Maël, qui souhaiterait faire venir sa femme et ses trois filles en France, obtient son acte de naissance mais le statut de la Mauritanie, dont une partie était Française à sa naissance, ne lui permet pas d'obtenir la nationalité française.

Le Conseil des Voisins se réunit une fois tous les deux mois pour échanger, discuter, décider des améliorations et des projets collectifs. Quelques rares résidents y participent alors qu'interviennent de nombreux travailleurs sociaux et bénévoles.

François Hollande vient visiter les lieux ainsi que, plus tard, après les élections présidentielles d'avril 2017, Nicolas Hulot et Édouard Philippe. Ces derniers le font à l'occasion d'un colloque sur l'économie solidaire.

En juin 2017, le projet est prolongé pour six mois. L'association Aurore réunit le conseil et la grande majorité accepte de partir à cette date pour respecter la parole donnée, obtenir la garantie de reloger les 600 résidents et espèrer essaimer dans d'autres lieux. Seul un "traitre" veut s'accrocher.

En mars 2018, la politique sociale de Macron excessivement restrictive entraine la fermeture de nombreux centres d'hébergement et d'urgence rendant encore plus difficile le relogement des anciens résidents des Grands voisins.

Des cartons apprennent que tous les résidents seront finalement relogés et qu'un projet, sur une partie du terrain, se prolonge jusqu'a l'été 2020. Grâce à Adrien, KaceKode se produit sur différentes scènes parisiennes avec succès. Maël a trouvé un studio a louer mais n'a pas obtenu la nationalité française et la venue de sa famille.

Dans le contexte des attentas de Charlie hebdo en janvier 2015 et du Bataclan en novembre, Bastien Collet assume de réaliser un "feel good movie" où sont mis en avant les réussites du projet : le dévouement des bénévoles et des travailleurs sociaux, la mixité (peu apparente pourtant) du public, des artistes et des résidents...et même des animaux (moutons et poules). Sont laissés à l'arrière plan les échecs relatifs de la monnaie locale, de la radio libre tout comme la situation des femmes dans un contexte de violence possible (trafic, intervention de la police). Ainsi du projet affirmé au départ de rendre autonomes les résidents, on a bien plutôt le sentiment d'un rêve d'autarcie, d'autosuffisance.

Le film est emporté par l'énergie du luthier, Adrien Collet, qui, contre vent (alcoolisme) et marée (absentéisme), parvient à faire vivre et parler ensemble les résidents autour de leur passion pour la musique. Un art capable de rapprocher tous les âges et  tous les publics.

La sortie du film était programmée le mercredi 1er avril, ce qui n'a pu avoir lieu du fait du confinement obligatoire. Il est ainsi proposé en séances de e-cinéma, à voir chez soi avant de participer, sur certaines séances, au débat avec le réalisateur et les spectateurs présents dans un rayon de 40 kilomètres autour de la salle qui diffuse le film. En achetant sa place ici, vous verrez vos 6€ se partager entre la salle et le distributeur. Une excellente manière de faire vivre les cinémas pendant cette période si difficile.

Ci-après, captures d'écrans pendant le débat au Café des images, le 10 avril 2020:

Jean-Luc Lacuve, le 11 avril 2020