La machine à écrire et autres sources de tracas

2024

Genre : Documentaire
Thème : Psychiatrie

Avec : Patrice d'Hondt, Muriel Thourond, Ivan Vdovine et Gad Abécassis, Frédéric Prieur (Les patients) et Walid Benziane, Goulven Cancouët, Jérôme Délia, Bruno Voillot, Céline Fogler (Les soignants) et Nicolas Philibert . 1h12.

Patrice d'Hondt montre sa machine à écrire à Walid Benziane et Goulven Cancouët, deux soignants qui sont venus lui rendre visite avec deux boites de tournevis et autres outils pour le dépanner. La machine est auscultée, c'est une petite barre qui n'élève plus le rouleau quand les lettres viennent frapper le papier. Les deux soignants entreprennent de la démonter, dévissant par dessous et par dessus. Pendant ce temps Nicolas Philibert, qui restera toujours hors champ, interroge Patrice qu'il avait déjà rencontré sur l'Adamant en train d'écrire un poème. Chaque jour de la semaine, il en compose deux qu'il tape ensuite à la machine. Celle-ci étant en panne depuis quelques temps, ce sont cent poèmes qui sont en attente pour venir rejoindre les huit mille écrits au fil des années, bien classés dans des chemises de couleur. Alors que Walid et Goulven parviennent tout juste à extraire le capot de la machine à écrire se produit un petit miracle : le ruban se lève au moment de la frappe des lettres. Une petite barre articulée devait être coincée. Patrice est absolument ravi et remercie chaleureusement Walid et Goulven.

Nicolas Philibert filme Muriel, également rencontrée sur L'Adamant, allongée sur son lit, avec sur sa table de nuit, des canettes de coca-cola vides et diverses photographies. Elle se plaint du silence qui la rend folle, une mort blanche dit-elle. Elle ne sort pas voir les autres locataires des chambres voisines.Elle dédaigne ces "clochards et gitans". Bientôt entrent Walid et Jérôme venus réparer son lecteur de CD. Elle se désespère de ne plus pouvoir l'écouter pour rompre ce silence qui la gêne tellement. Jérôme suspecte que c'est la poussière et les quelques rayures sur le disque qui empêchent la lecture. Son diagnostic est bon. Muriel est ravie de pouvoir de nouveau écouter Janis Joplin et Joan Baez dont elle veut que l'on diphtongue le nom. Elle offre un café à Walid et Jérôme qui l'acceptent bien volontiers mais pas Nicolas qui avait déjà refusé une crotte en chocolat. Elle le lui reproche gentiment. Avant de partir elle distribue de nouveau des chocolats sans en offrir à Nicolas qui, pince sans rire, en réclame.

Walid et Jérôme sont chez Ivan dont l'imprimante est en panne. Il faudrait sans doute remplacer les cartouches mais Ivan se désintéresse de la réparation. Il préfère jouer du piano. Gad, son colocataire, survient. Il voudrait travailler, son médecin référent lui a suggéré de retourner dans la boulangerie industrielle où il travaillait mais il est rebuté par la piqûre préalable qui sera nécessaire. Le lecteur DVD ne marche pas non plus, mais Ivan ne souhaite pas aller plus avant dans la réparation; Walid lui écrit un mode d'emploi.

Bruno est venu aider Frédéric à ranger chez lui, un vrai capharnaüm de livres, de disques et de dessins ayant envahi toutes les pièces. Bruno va ainsi chercher une pile de disques dans la cuisine pour les trier. Frédéric raconte qu'il est allé jusqu'au faubourg saint Honoré pour chercher de l'argent. Il a fait des études de dessin et a raté magistralement son BTS ce dont il est fier. Grâce à cet échec, comme Jean Cocteau le disait, il est devenu quelque chose de plus grand : dessinateur de bandes-dessinées. Il est très inspiré par sa proximité d'autrefois avec le logement de Jim Morrison et Pamela, sa compagne. Il fredonne Sous quelle étoile suis-je né ? quand il redécouvre le disque de Michel Polnareff . Céline vient seconder Bruno et rappelle que Frédéric possède une cave où il pourra ranger ses précieux souvenirs. Bruno et Céline proposent d'aller dans un magasin de bricolage acheter des étagères et il les remboursera. Frédéric s'endort avec un disque des bruits de la nature.

Dernier volet du triptyque sur la psychiatrie débuté avec Sur l’Adamant (avril 2023) puis prolongé avec Averroès & Rosa Parks (mars 2024), La machine à écrire et autres sources de tracas (avril 2024) clôture sur un ton léger et réjouissant les relations entre soignés et soignants du Pôle psychiatrique Paris-Centre ; même Nicolas Philibert, toujours hors champ, y va de sa touche d'humour dans trois des quatre séquences du film. Par sa durée nettement plus courte que les deux autres volets, il en constitue une sorte d'épilogue.

Les soignants qui vont visiter les patients à l'occasion d'un problème domestique (machine à écrire en panne puis lecteur de CD, imprimante et lecteur de DVD ou rangement nécessaire) rencontrent chez eux, les patients qui visitaient l’Adamant qui entretient leur goût pour l'art et la création. Patrice écrit des poèmes, deux par jour, soigneusement rangés dans des pochettes qui en rassemblent 8000. Muriel écoute Janis Joplin et Joan Baez. Ivan joue du piano et cherche à obtenir un diplôme de musique. Frédéric est un auteur de bande dessinée dont l'encombrement de livres et de disques indique l'immense culture et un joli brin de voix lorsqu’il fredonne Sous quelle étoile suis-je né ? de Michel Polnareff

L'empathie, l'écoute et l’aide que leur apportent les soignants les maintiennent dans une bulle protectrice que la saison du tournage, la lumière de l'été fait miroiter d'un possible accès au bonheur. Ainsi, Frédéric, urbain à l'esprit si plein, s'endort aux bruits de la nature enregistrés sur un disque; une sorte de fable sur un retour au bonheur.

Jean-Luc Lacuve, le 19 avril 2024.

Retour