Les saisons

1975

(Vremena goda). 0h29.

Un berger dans un fleuve tentant de sauver un mouton. Des nuages sur une colline boisée. Un village de montagne, un jeune berger, des habitans, hommes, femmes, les moutons...transhumance des moutons et des boeufs...

J’évoquerai celles des bergers des Saisons, dévalant sur le dos une pente neigeuse puis caillouteuse, leurs moutons dans les bras,

Peut-être l'un des plus beaux films du cinéaste. C'est en tout cas celui qui lui assure aujourd'hui une reconnaissance internationale. Les Saisons, est un très beau poème où sont évoqués, en une vaste parabole, les moments déterminants de l'histoire arménienne, depuis les origines volcaniques, jusqu'à la période industrielle.

Mais au-delà de cette symbolique où l'on peut lire aussi l'histoire des migrations du peuple arménien, demeurent des séquences étonnantes et inoubliables : l'inertie lente et aventureuse d'une transhumance, des corps en apesanteur, comme passant, infiniment, par-dessus les terres, ou par-dessus les flots, méprisant tous les ancrages, une vision ludique, apaisée, de la moisson et de la fenaison, et ce rythme, surtout, ce rythme qui nourrit l'émotion, sans discours et sans commentaire, et qui fait de toute épreuve le témoignage d'un humanisme salutaire et sublime.

l’acteur et cinéaste Serge Avedikian, ami de longue date d’Artavazd Péléchian, fait remarquer que la vision qu’on en a ne laisse pas aisément percer l’invraisemblance de ce qu’elle représente. « Peut-on imaginer une seule seconde que des bergers passent leurs bêtes à cet endroit précis où le torrent est agité ? S’il y a bien des gens qui doivent avoir du bon sens, ce sont les paysans ! Après plusieurs visions du film, je me suis rendu compte de ce non-sens, je lui en ai parlé et ça l’a fait sourire. “Ben oui, m’a-t-il répondu, ils l’ont fait pour le film. Il m’a fallu huit mois pour les convaincre ! Quand je venais au village et que je leur disais avoir choisi cet endroit pour tourner, ils répondaient : ‘Tu te fous de nous ? On ne va pas perdre du temps et des moutons à passer là plutôt qu’à 500 mètres, où les eaux sont plus calmes ! D’autant qu’il y a un pont !’ Il leur répondait : “C’est pour vous que je veux tourner là. C’est pour l’humanité.” Et, revenant un mois après, il demandait s’ils avaient réfléchi. A force d’insister, il a fini par les convaincre. »