Chien enragé

1949

Genre : Film noir

(Norainu). Avec : Toshiro Mifune (Goro Murakami), Takashi Shimura (le commissaire Sato), Keiko Awaji (Harumi Namaki), Eiko Miyoshi (sa mère), Isao Kimura (Yusa, le voleur), Gen Shimizu (le commissaire Nakajima), Reizaburô Yamamoto (Hondo). 2h02.


Voir : édition DVD

Une voix off explique la situation  :  un été torride dans le Tokyo d'après-guerre, après un exercice de tir épuisant, dans un tramway bondé, le jeune policier Murakami s'aperçoit qu'on lui a volé son colt, ce qui est considéré comme un fait très grave.

Terriblement culpabilisé, Murakami présente sa démission à son chef, le commissaire Nakajima. Celui-ci, loin d'accepter la démission, demande au contraire au jeune policier d'effectuer lui-même l'enquête sur ce vol.

Ichikawa, l'inspecteur responsable des vols à la tire lui conseille d'examiner le fichier des voleurs opérant dans les transports. Murakami finit par identifier, Ogin, une "voleuse à la tire" qui était auprès de lui dans le tram. Ichikawa la connait depuis longtemps et emmène Murakami dans le restaurant où elle est entraineuse. Ogin refuse de parler mais, comme il la suit toute une journée, elle finit par lui donner une indication pour contacter les revendeurs d'armes dans les bas-fonds. Elle lui conseille de se déguiser en ancien combattant et de fréquenter les quartiers les plus populaires de Tokyo où il sera contacté pour acheter une arme d'occasion.

Murakami parcourt ainsi pendant quatre jours les quartiers les plus marginaux d'une population qui survit difficilement à la défaite. On lui donne rendez-vous au Conga, dans la rue Suzuran. Là, il arrête la vendeuse qu'il interroge dans le misérable commissariat du quartier. Elle lui avoue qu'elle l'avait loué la veille et que l'homme allait le rendre le soir même mais qu'il a probablement eu peur en le voyant. Il aurait par ailleurs été arnaqué à la remise du colt : les loueurs d'armes ont les papiers de leurs clients et les font chanter à leur retour. Mais c'est son chef, en fuite, qui a les papiers du client au colt.

Le commissaire reproche à Murakami d'avoir arrêté la loueuse d'armes sans remonter le réseau. Il l'informe aussi que, la veille, un vol à main armé a eu lieu à Yodobashi. La balle d'un colt a été retiré du bras de la victime, une jeune femme. Le commissaire le réconforte et lui applique une sanction mineure pour la perte de son arme, salaire réduite de moitié pendant trois mois. Murakami, refuse de profiter d'une journée de repos et demande à l'expert en balistique si la balle retirée du bras de la victime vient de son arme. Il va pour cela récupérer celle qui s'était perdue dans une souche lors de l'exercice de tir qui précéda le vol. La conclusion de l'expert, comme quoi les balles proviennent la même arme, foudroie Murakami.

Murakami présente pour la seconde fois sa démission au commissaire Nakajima. Pour la seconde fois aussi celui-ci la refuse et l'exhorte à poursuivre l'enquête avec son collègue de Yodobashi, l'expérimenté commissaire Sato. Celui-ci est déjà en train d'interroger la vendeuse d'armes. Le loueur portait un costume et était gaucher. Elle fournit aussi un nom, Honda, et indique qu'il est amateur de base-ball. Dans le fichier de la police, Murakami découvre le vrai nom de Honda, Tachibana. Le commissaire plaint la jeune fille victime du vol de 40 000 yens sa dot, qui, envolée, va l'empêcher de se marier. Murakami lui avoue que c'est le vol de son colt qui est responsable. Celui-ci contenant 7 balles, combien de méfaits aura-t-il sur la conscience s'il ne retrouve pas l'arme avant qu'elle ait de nouveau servi ?

Murakami et le commissaire Sato tentent d'arrêter Honda, à l'occasion du 9e match de base-ball entre les Giants et les Fox. Murakami est perclus de remords: s'il n'avait pas arrêté la fille, celle-ci airait recupéré l'arme. Ainsi il est doublement responsable de ce qui va arriver par la suite. Sato craint le pire, le malfrat est maintenant un chien errant et, comme tel, va devenir chien enragé. Il va recommencer à se procurer de l'argent. Sato a fait diffuser la photo de Honda aux placiers qui doivent le reconnaitre dans la foule des 50 000 personnes du stade. Le piège fonctionne. Honda est arrêté. Mais il s'avère que ce n'est pas lui le coupable, mais seulement le chef de la loueuse d'armes. Il remet néanmoins à la police les papiers de celui auquel a été loué le colt : Yuza Shinjiro.

Murakami et le commissaire Sato interrogent la sœur de Yuza qui le laissait habiter dans une baraque sordide à côté de chez elle. Yuza y ruminait des pensées de suicide se sentant floué d'avoir été volé au retour de la guerre. Il fréquentait un yakusa, Sei, qui se disait propriétaire de l'hôtel Sakura. Sei n'est que serveur. Il utilisait Yuza pour approcher les danseuses du Blue bird. Yuza était en effet l'ami de l'une d'elles : Harumi Namaki

Murakami et Sato l'interrogent dans son club mais Hurami s'écroule en pleur et Sato décide de ne l'interroger plus avant que le lendemain. Le soir, il emmène Murakami chez lui et les deux hommes passent la soirée ensemble, assistant au coucher des enfants. Le lendemain, c'est un crime qui est découvert. Un mari en déplacement  est rentré pour découvrir sa femme tuée et probablement violée. Il enrage de ce malheur commis pour 50 000 yens.

Il est confirmé que la balle provient du colt volé à. Murakami. Celui-ci et Sato se sont remis sur la piste de Hurami alors que l'orage menace.  Sato l'affirme : "Un homme qui a tué est un chien enragé (...). Passé la torpeur, il ne reste au chien enragé qu'une ligne droite". Il en conclut qu'il va aller voir Hurami qu'il aime. Le metteur en scène du Blue Bird leur déclare que Hurami est en congé et leur donne son adresse, chez sa mère. Hurami refuse de parler, en dépit des exhortations de sa mère. Sato découvre une boite d'allumette qui appartient à Yuza. Il file dans cet hôtel laissant Murakami poursuivre l'interrogatoire d'Hurami, amère face au malheur injuste qui frappa Yuza. La réceptionniste  de l'hôtel indique à Sato l'entreprise de taxi venue chercher son client qui s'est soulé chez elle pendant deux nuits; le chauffeur indique une maison de rencontre à Kôgetsu. La geisha Kintaro, le met sur la piste de l'hôtel Yayoi à Kanda.

En essayant de poursuivre Yuza, Sato y est touché d'une balle tiré par le malfrat. Soigné à l'hôpital, il est bientôt hors de danger au grand soulagement de Murakami. Hurami vient lui dire que Yuza sera à six heures à la gare d'Ohara. Il refuse qu'elle l'accompagne car il reste trois balles dans son chargeur.  A la gare, Murakami tente d'identifier Yuza sachant qu'il à 28 ans, porte un costume de lin blanc, est gaucher et doit encore avoir des taches de boue après sa fuite de la veille sous l'orage.

Une poursuite s'ensuit dans la nature, et Murakami se bat sauvagement avec Yuza  qui tire sur lui les trois balles restantes alors qu'une jeune femme s'exerce au piano dans la maison voisine isolée... Finalement, Murakami met les menottes à Yuza, et les deux hommes s'écroulent faca à face dans un champ de fleurs,  épuisés : l'un satisfait d'avoir retrouvé son colt, l'autre hurlant dans les hautes herbes, désespéré que le printemps ne soit pas pour lui qui sera bientôt exécuté.

Murakami, promu par son chef, vient retrouver Sato à l'hôpital. Les remords ne l'ont pas quitté se sachant si proche d'avoir été celui qu'il vient d'arrêter. Sato le rassure, c'est à eux de veiller à la sécurité de ceux qui sont dans la rue. Ils doivent être protégés de ceux devenus des chiens enragés.

L'un des thèmes récurrent dans le cinéma asiatique, est la proximité entre le policier et le voleur : les deux hommes ont sensiblement le même âge ; ils se sont tous les deux fait volé leurs affaires à leur retour de la guerre ; et Murakami confesse un jour à Sato qu'il lui semble comprendre le geste du voleur : policier ou hors-la-loi, ce n'est qu'une question de milieu, de destin. Murakami comprend que Yusa n'est comme lui qu'une victime de la guerre et de la défaite. Yuza, n'avait pas au départ l'intention de se servir de son arme. Il se trouve pris dans une spirale de la violence (" Chien perdu devient enragé… ", dit le commissaire Sato à propos du voleur).

scène finale dans la grande tradition des films de Kurosawa : dans les bois à proximité de la gare, les deux hommes se roulent dans les hautes herbes, disparaissant parfois complètement de l'écran. Le policier arrive à passer les menottes au meurtrier et les deux hommes, exténués, s'écroulent dans l'herbe, dans une attitude parfaitement symétrique.

On trouve aussi le thème de la confrontation de deux mondes : un jeune policier encore enthousiaste et un vieux commissaire désabusé sont conduits à travailler ensemble et, au delà, à devenir amis.

Une séquence utilise des plans d'un documentaire sur la ville de Tokyo ravagée par la guerre, réalisé par Ishirō Honda, un ami de Kurosawa et futur réalisateur de Godzilla.

Test du DVD

Editeur : Wild Side Video, 2006. Japonais Mono | 2.35 - 16/9e comp. 4/3 | Sous-titres : Français

Bonus :

  • Akira Kurosawa écrit des romans (30')
  • Entretien avec Jean Douchet (13')
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