Amanda

2018

Avec : Vincent Lacoste (David Sorel), Isaure Multrier (Amanda), Stacy Martin (Léna), Ophélia Kolb (Sandrine Sorel), Marianne Basler (Maud Sorel), Jonathan Cohen (Axel), Nabiha Akkari (Raja), Greta Scacchi (Alison), Bakary Sangaré (Le directeur de la Maison des Enfants). 1h47.

Juin 2017. David, 24 ans, attend la venue de touristes indiens auxquels il loue pour des vacances l'un des studios de l'immeuble où il habite. Il arrive ainsi en retard pour chercher Amanda, sa nièce de sept ans, à sa sortie de l'école. Lorsque sa sœur, Sandrine, professeure d'anglais, rentre tard le soir, elle n'a que faire de la complicité entre sa fille et son frère. Elle est en colère d'avoir été appelée pour lui signaler qu'Amanda avait du attendre longtemps toute seule devant l'école. Sandrine regarde les devoirs de sa fille. De son côté, Amanda est intriguée par le livre qu'elle lit, "Elvis has left the building". Sandrine en profite pour lui expliquer ce qu'est une expression, une formule imagée, et notamment celle-ci qui fut employée lorsqu'un entrepreneur de spectacle, pour décourager les fans qui attendaient Elvis Presley à sa sortie de la salle pour un autographe. Elle en retrouve même l'origine sur internet.

La querelle entre le frère et la sœur est sans suite tant ils s'entendent et s'aident au quotidien. Sandrine a même acheté des billets pour les matches de Wimbledon le mois suivant sachant son frère passionné par ce sport dont il fut autrefois un excellent joueur. David loue l'un des appartements de l'immeuble à Lena, une pianiste de province. Les deux jeunes gens entament bientôt une relation amoureuse. Pour fêter son permis, Sandrine invite son frère, Lena et ses amis à un pique-nique dans un parc. David comme toujours en retard est éberlué parce qu'il voit : des corps étendus et ensanglantés, victimes de rafales de mitraillettes de terroristes.

David doit annoncer la terrible nouvelle à Amanda et doit se décider à devenir son tuteur car ni Maud, sa tante compréhensive mais trop âgée, ni Alison sa mère qui les a quitté il y a longtemps, ne lui paraissent en mesure de le faire. Traumatisée par l'attentat qui l'a laissée avec un bras handicapée, Lena s'éloigne de David. Mais celui-ci s'accroche et finit par la convaincre que leur histoire n'est pas détruite par l'attentat.

David emmène Amanda à Londres comme cela était prévu avec Sandrine et accepte même de voir Alison. Si celle-ci parviendra sans doute à revoir Amanda, la fracture avec son fils semble plus profonde.

Le matin, David emmène Amanda à Wimbledon. Tomas Berdych affronte Ryan Harrison au 2e tour. Il est en perdition et est mené 30-0 puis 40-0, les yeux d'Amanda s'embuent puis elle éclate en sanglots. "Elvis has left the building" donne-t-elle comme explication à David. Celui-ci tente de redonner courage à Amanda comme Berdych sauve une, deux puis trois balles de jeu. "Tout espoir n'est pas perdu, il faut être patient" conclut David qui a compris d'où remontait la tristesse de sa nièce. L'arbitre annonce "égalité".

Sur un sujet de mélodrame, une petite fille perd sa mère, Hers réussit à faire un film lumineux qui joue la carte du réalisme avec une succession de scènes justes, émouvantes mais pas trop. Ainsi cette discussion sur par quoi faut-il commencer, par ce qu'on aime ou ce qu'on n'aime pas, dans son assiette, ou encore le rituel du Paris-brest après l'école. La scène finale est totalement bouleversante tant le refoulé d'Amanda trouve à s'y exprimer et la tranquillité d'âme de David à s'affirmer. Jamais plus on n'oubliera l'expression "Elvis has left the building"

Toutes les scènes sont construites, non en fonction de clichés sur les rôles familiaux, mais des personnages, tous bien dessinés. Les moments de bonheur dans cet été parisien ravagé par un attentat qui évoque ceux de novembre 2015 est magnifié par la lumière et le grain mouvant de la pellicule ainsi que par la guitare douce et mélancolique du compositeur américain Anton Sanko.

Jean-Luc Lacuve le 5 décembre 2012