Soundtrack to a Coup d’État

La batterie de Max Roach et la voix Abbey Lincoln rythment les cartons où s'affichent des phrases tirées de The Heart of A Woman (1981) de Maya Angelou, sa fierté du jour où elle et d'autres activistes femme ont perturbé une réunion de l'ONU et sa rage qu'on ait tué Patrice Lumumba. Extrait d'un rapport d'ambassadeur anglais rapportant qu'en septembre 1960, Eisenhower aurait souhaité qu'on puisse jeter Lumumba dans une rivière aux crocodiles. interview de Bruce Bartlett, mercenaire sud africain au Congo au début des années 60 reconnaît avoir participé aux tueries.

Louis Armstrong déclare qu'on lui a demandé d'être l'ambassadeur de l'Amérique en Russie. Qui pourrait ne pas aimer le jazz ? Americans's secret weapon is a blue not in a minor key affirme le New York Time le 6 novembre 1955. Un autre article parle du dédain de Khrouchtchev pour le jazz en 1963.

Louis Armstrong arrive au Congo ce qui met Kroutchev en colère y dénonçant une opération de diversion. Déclaration de Lumumba en 1960 n'aimant pas qu'on l'interroge pour savoir s'il est communiste : il est Africain. Malcom X déclare qu'on ne peut considérer que l'Amérique fasse partie du monde libre quand 22 millions de ses citoyens n'ont pas les droits de la citoyenneté.

Eisenhower fait du jazz une arme diplomatique pour conquérir les esprits. Willis Conover, animateur de l'émission de radio nocturne de Voice of America Jazz Hour est diffusé partout dans le monde.

C'est sur la musique de Dizzy Gillespie qu'est montrée une séance houleuse de la 15e Assemblée générale de l’ONU qui se tient du 20 septembre 1960 au 20 décembre 1960. L’ONU est engagée dans la crise congolaise après l’indépendance. Khrouchtchev accuse Hammarskjöld d’aider les Occidentaux et demande sa démission. Khrouchtchev appelle à un désarmement complet et au bannissement des armes nucléaires. C’est aussi une façon de mettre la pression politique sur les États-Unis. Khrouchtchev attaque violemment les puissances coloniales occidentales (France, Royaume-Uni, Belgique). Il se pose en défenseur des 16 pays africains nouvellement indépendants, espérant gagner leur soutien dans le Tiers-Monde. Coup de la chaussure. La délégation reconnue par l’ONU était celle du gouvernement du président Joseph Kasa-Vubu, représentée principalement par Justin Bomboko, ministre des Affaires étrangères.

Dizzy Gillespie, Nina Simone. Andrée Blouin, activiste noire est expulsée, elle garde le message de Lumumba dans ses cheveux et le fait parvenir à Rome Khrouchtchev aux Nation-Unies est acclamé par la foule. Il veut visiter Disneyland, ce à quoi s'oppose un temps Allen Dulles, directeur de la CIA .

Pour Jean Bofane, auteur de Congo Inc., Eisenhower pensait que la guerre nucléaire devait libérer l'humanité du fardeau de l'armement. Le Congo belge a fourni l'uranium nécessaire à la bombe en 44 et son approvisionnement doit être sécurisé. Léopold II était déjà le premier fournisseur du caoutchouc en 1914 et il y aura besoin du cuivre pour la guerre de l'espace. Il y a donc convergence avec La Belgique nationaliste de 1956.

La conférence de Bandung se tient du 18 au 24 avril 1955 en Indonésie, réunissant pour la première fois les représentants de vingt-neuf pays africains et asiatiques dont Gamal Abdel Nasser (Égypte), Jawaharlal Nehru (Inde), Soekarno (Indonésie) et Zhou Enlai (Chine). Cette conférence marqua l'entrée sur la scène internationale des pays décolonisés du « tiers monde ». Ceux-ci ne souhaitant pas intégrer les deux blocs qui se font face, menés par les États-Unis et l'URSS, choisissent le non-alignement.

Dizzy en Iran avec Quincy Jones en Syrie. Malcolm X fait le lien entre les révoltes en Afrique et celles aux États-Unis. La crise de Suez est une défaite pour la France et l'Angleterre, le colonialisme tremble.

Abbey Lincoln. En mai 53 Armstrong refuse d'aller en Russie du fait de la discrimination sur le territoire américain. Album Dizzy président. C’était en 1963, lorsque Dizzy Gillespie tient meeting au festival de Monterey en Californie...

L'Union des États africains fut une éphémère union de tout d'abord deux, puis trois, États africains d'Afrique de l'Ouest, dans les années 1960. Ces États étaient le Ghana, la Guinée et le Mali. L'Union était politiquement socialiste et panafricaniste, et était dirigée par les révolutionnaires africains Kwame Nkrumah du Ghana, Sékou Touré de Guinée et Modibo Keïta du Mali.
Malcolm X va au Ghana. Quelques jours après son arrivée à Accra en 1964, il écrit une lettre saisissante appelant à l’unité politique et culturelle entre l’Afrique et sa diaspora. Ce texte, peu connu, révèle la dimension panafricaine de son combat, bien au-delà des frontières américaines.

Andrée Blouin organise la révolte des femmes. Répression. Après la table ronde qui rassemble les mouvements congolais à Bruxelles en janvier 1960, l'indépendance est fixée au 30 juin.Des élections sont organisées en mai, dont le parti nationaliste MNC sort vainqueur. Lumumba, considéré par Bruxelles comme un radical, prend la tête du gouvernement, tandis que le « modéré » Kasavubu devient président. Le 30 juin, il y a d'abord le vol de l'épée du roi dans la rue puis l’affrontement verbal entre le roi Baudouin, venu célébrer la mémoire de son sanguinaire ancêtre Léopold II (Kinshasa s’appelle alors encore Léopoldville), et Patrice Lumumba, qui dénonce les années d’oppression et de répression. Patrice Lumumba déclare que des gens meurent tous les jours, que la loi n’est pas la même pour les Noirs et pour les Blancs, que les richesses du pays sont pillées. Il n’était pas censé parler lors des cérémonies, alors qu’il était le dirigeant démocratiquement élu du Congo. Le premier ministre belge Gaston Eyskens va jusqu'à demander que Lumumba s’excuse auprès du roi.

Cinq jours après l'indépendance, la force publique congolaise se mutine contre l'encadrement belge qui s'oppose à une africanisation des cadres. L'annonce de viols d'Européennes par des soldats provoque l'exode des Belges, qui exerçaient l'essentiel des fonctions d'encadrement, et la panique des soldats qui craignent les représailles des troupes belges. Le désordre est général. Lumumba crée l'Armée Nationale Congolaise (ANC), avec une africanisation précipitée des cadres ; le colonel Mobutu est nommé chef d'état-major. Parallèlement Bruxelles envoie des troupes au Katanga qui interviennent aussi dans le reste du Congo. L'union minière est privatisée, des ministres viennent en visite pour asseoir la Sécession

Lorsque le 11 juillet le Katanga proclame son indépendance, avec à sa tête Tshombe soutenu par les militaires belges, la crise est ouverte entre les autorités congolaises et belges. Le gouvernement de Léopoldville sollicite le 12 une aide militaire de l'ONU contre l'agression belge, afin de rétablir la sécurité et l'intégrité de l'État, sans mentionner le désordre intérieur sur lequel la Belgique justifie son intervention. Le Conseil de sécurité prend le 14 juillet une résolution invitant le gouvernement belge à retirer ses troupes et accordant une assistance militaire jusqu'à ce que les soldats de l'ANC soient en mesure de « remplir leurs tâches ». Mais afin d'éviter tout veto occidental, cette résolution rejette la thèse de l'agression extérieure en ne prévoyant aucun dispositif pour contraindre les troupes belges à se retirer. Il s'agit pour l'ONU d'une question d'ordre intérieur, tandis que le gouvernement congolais souligne l'agression belge. La question du Congo se transforme en crise internationale dans un contexte de guerre froide. Lumumba menace alors de faire appel à l'Union Soviétique, qui demande le retrait des troupes belges. Après la résolution du Conseil de sécurité du 22 juillet les soldats belges se retirent de Léopoldville.

C'est dans ce contexte que Lumumba intervient à l'ONU le 25 juillet pour rappeler sa position sur l'agression de la Belgique, élément essentiel du désordre intérieur. Mais Lumumba ajoute une nouvelle demande : celle d'un maintien des troupes onusiennes après le départ des belges pour "aider notre jeune armée dans son organisation". C'est ainsi reconnaître la difficulté pour l'ANC d'assurer l'ordre. 

Le 17 janvier 1961, Patrice Lumumba et deux de ses partisans, Maurice Mpolo et Joseph Okito, sont conduits par avion à Élisabethville, au Katanga, et livrés aux autorités locales. Lumumba, Mpolo et Okito seront conduits sous escorte militaire dans une petite maison, où ils seront ligotés, humiliés et torturés par des responsables katangais. Ils seront ensuite fusillés le soir même par des soldats sous le commandement d’un officier belge.

le 15 février 1961 la chanteuse Abbey Lincoln, son compagnon, le batteur Max Roach, l’écrivaine Maya Angelou et quelques dizaines de militants afro-américains réussirent à se glisser dans la tribune du public au Conseil de sécurité des Nations unies pour perturber l’intervention du délégué américain, Adlai Stevenson, qui tentait de convaincre les jeunes nations de la bienveillance des États-Unis.

Documentaire politique qui met en mouvement toutes les composantes des forces à l'œuvre sur la scène internationale du début des années 50 aux années 60 avec un épilogue contemporain. Le film oblige à rechercher par la suite les informations distillées mais rend compte par sa métaphore musicale de l'enchevêtrement des rythmes qui ont produit aveuglements, complots, et résistants oubliés.

Le film est composé de plusieurs matériaux, extraits de livres, de journaux, interview, d'images d'archives, de captation de concert. Il entremêle les strates de temps ainsi que les lieux géographiques: Congo, Belgique New-York, Russie. Commence par une phrase The Heart of A Woman de l’écrivaine Maya Angelou se disant fière d'avoir avec Abbey Lincoln, Max Roach,et quelques dizaines de militants afro-américains réussi à perturber la séance le 15 février 1961 de l'ONU où les États-Unis, qui ont fomenter l'assassinat de Lumumba, voulait se donner le beau rôle. C'est ensuite une interview d'un mercenaire sud-africain; puis Armstrong assumant son rôle d'ambassadeur du Jazz lorsqu'il vient au Congo en 1960 puis Malcom X reliant la lutte des noirs aux USA avec celles de ceux en Afrique.

C'est la musique qui donne le rythme de ce coup d'état capitaliste et colonial mené par la Belgique, les États-Unis et le Royaume-Uni et des congolais affiliés dont Joseph Désiré Mobutu chef de l'armée et Joseph Kasa-Vubu, président en vue de non seulement renverser mais éliminer physiquement (torturé démembré et dissout à l'acide) Patrice Lumumba, premier ministre peu disposé à contribuer à l’ordre postcolonial, menaçant les réserve d'uranium dont avaient besoin les États-Unis ; menaçant de sonner la révolte sur le territoire américain en pleine bataille des droits civiques et de basculer du côté de la Russie mieux à même de garantir son indépendance.Pire peut être le plus grands des pays africains allait rejoindre la création d'un état pan-américan, avec Le Ghana et le Guinée déjà en pourparlers.

Jean-Luc Lacuve, le 24 novembre 2025.