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(1871-1957)
Post-cubisme

František Kupka est un artiste tchèque considéré aux côtés de Hilma af Klint, Vassily Kandinsky, Paul Klee, Piet Mondrian et Robert Delaunay, comme l’un des pionniers de l’art abstrait.

Les mystères de la construction du métropolitain 1905 Collection privée
La game jaune 1907 Prague, galerie Národní
Les touches de piano. Le lac 1909 Paris, MNAM
Plans verticaux I 1913 Paris, MNAM

Né le premier de cinq enfants dans une famille modeste d'un notaire et officier dans la petite ville Opočno, en Bohême, František Kupka a quinze ans quand il invente un alphabet mélangeant les écritures grecque, cyrillique et latine dont il se sert pour rédiger son journal. Il a appris le métier de sellier. Il s'intéresse assez vite à la peinture et apprend en autodidacte jusqu'à ses dix-sept ans, où il reçoit un enseignement à l'école de métiers de Jaroměř, avec un professeur féru de spiritisme (très à la mode en cette fin de siècle), pour le préparer au concours de l'Académie des beaux-arts de Prague, qu'il réussit en 1889. Il s'inscrit dans la section peinture sacrée et historique et sera diplômé de l'Académie de Prague (dans l'atelier du professeur František Sequens). Il part rejoindre l'Académie de Vienne en 1892, qui jouit d'un grand renom.

En 1896, Kupka s'installe à Paris, à Montmartre, lieu où se concentre la bohème de l'époque, artistes et poètes. Il vit d'abord très pauvrement, puis, en 1898, il loue un atelier et commence à gagner sa vie comme illustrateur pour des revues ou créateur d'affiches pour des cabarets, tout en continuant ses tableaux en parallèle. Il illustre également des nouvelles d'Edgar Allan Poe, avec en particulier l'aquatinte en couleur, L'Idole noire, où une statue colossale se dresse à contre-jour dans la pénombre d'un paysage désolé.

À partir de 1901, et jusqu'en 1907, après avoir participé à des périodiques humoristiques et littéraires comme Le Rire et Cocorico, il se met à collaborer intensément à L'Assiette au beurre, hebdomadaire satirique à tendance anarchisante, à laquelle participeront notamment Juan Gris, Félix Vallotton, Jacques Villon. Kupka prend une orientation anti-cléricale et anti-monarchiste, qui l'éloigne de la théosophie et du spiritisme de ses jeunes années. Il réalise trois numéros spéciaux : L'Argent (11 janvier 1902), Religions (7 mai 1904) et La Paix (20 août 1904). Il y est dur et offensif envers ceux qu'il dénonce comme les profiteurs et les oppresseurs : les marchands cupides, le Kaiser, le Tsar. Ses dessins sont beaucoup plus élaborés que ceux des autres peintres qui ont participé à la revue. De plus, Kupka souhaite qu'on ne sous-estime pas son œuvre d'illustrateur : dans La Création dans les arts plastiques, il affirme que l'illustration est « un genre qui peut fort bien figurer dans les plus hautes sphères de l'art. Le livre est un véritable ami de l'Homme. Lorsque les proportions chantent, que les équilibre sont heureux, que le blanc des gravures fait entendre un soprano, soutenu par l'alto ou la basse des noires typographies, l'illustration ainsi comprise n'est pas indigne d'un grand artiste. Mais combien le comprennent ? Quel champ magnifique laissé en friche ! ».

Sa vie se stabilise en 1904, date à laquelle il s'installe définitivement avec Eugénie Straub à Puteaux, à côté de chez son ami Jacques Villon. En 1905, il suit des cours de physiologie à la Sorbonne. Il travaille également au laboratoire de biologie et s'intéresse à des problèmes d'optique et de mécanique, en plus de son étude de l'histoire et de l'archéologie. Il pense que ces études vont l'aider dans son art, dont il n'est pas satisfait depuis quelque temps.

En 1905, il réalise des planches pour illustrer l'ouvrage de Jean de Bonnefon, qui adapte à la scène le Cantique des Cantiques. Il poursuivra cette œuvre jusqu'en 1909, œuvre qui comprendra 134 dessins qui seront publiés en 1931 par l'industriel et mécène tchèque, Waldès. Au cours de la même période, il illustre L'Homme et la Terre, d'Élisée Reclus, édité en 6 volumes (1905-1908). Il livre aussi des illustrations à Je sais tout, dont les sept merveilles du monde, en novembre 1909.

À partir de 1908, ses illustrations dans sa revue Prométhée traduisent une grande recherche artistique : Kupka s'interroge longuement sur la perspective, faisant de nombreux essais, dans ses illustrations mais aussi dans ses tableaux, Les touches de piano. Le lac (1909) ou Grand Nu (1909). Il étudie également le mouvement à travers le tableau Femme cueillant des fleurs (1909-1910). Ses personnages deviennent peu à peu flous, comme dans une photographie « bougée ». Le mouvement et le temps sont travaillés par les ombres et par les changements de couleur de la gauche vers la droite du tableau. Il produit ensuite une toile intitulée Madame Kupka parmi les verticales (1910-1911), sur laquelle le visage de sa femme est enfermé entre des traits verticaux. Dès lors, les formes géométriques s'imposent à lui, et il passe à l'abstraction.

En 1912, le Salon d'automne accepte d'exposer des œuvres non-figuratives comme Fugue en deux couleurs.

Au Salon des Indépendants, Kupka est exposé avec les peintres cubistes, mouvement qui l'intéresse beaucoup, mais il refuse d'y être assimilé. À cette époque, il se regroupe chez son ami Jacques Villon avec de nombreux artistes, tels que Marcel Duchamp, Jean Metzinger, Francis Picabia et Albert Gleizes, dans un groupe qu'on appellera le groupe de Puteaux, ou le groupe de la Section d'or. On y discute d'art, de sciences, de mathématiques et de divers concepts à la mode, tout en présentant ses peintures et ses théories aux autres artistes. Le groupe s'intéresse de très près aux travaux cubistes : Metzinger et Gleizes les défendent, tandis que Duchamp, Picabia et Kupka sont plutôt sceptiques. Kupka écrira d'ailleurs dans La Création dans les arts plastiques : "Les expériences réalisées par Picasso et Braque sont intéressantes comme tentatives pour approcher la nature autrement que n'avaient fait les peintres du passé. Mais elles n'aboutissent qu'à une interprétation de plus." Les membres produisent un unique numéro d'une revue appelée La Section d'Or, parue le 9 octobre 1912, auquel collaborent Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Pierre Reverdy, André Salmon, Roger Allard, Maurice Princet. En 1913, il publie La Création dans les arts plastiques, un recueil de textes écrits directement en français depuis 1910.

Dès la déclaration de guerre d'août 1914, bien qu'il fréquente les milieux anarchistes parisiens et soit antimilitariste, Kupka s'engage comme volontaire, et se retrouve sur le front dans la Somme, dans la même compagnie que le poète Blaise Cendrars. En 1915, il tombe gravement malade et est évacué à Paris, où il active la résistance tchèque anti-allemande. Il devient même président de la Colonie tchèque de France, qui fédère les associations d'immigrants en France et qui se donne comme but d'enrôler des volontaires tchèques dans la Légion étrangère, et surtout les légions tchécoslovaques. En 1918, il est à nouveau mobilisé, et sert sous les ordres du maréchal Foch. Il termine la guerre avec le grade de capitaine et reçoit la Légion d'honneur.

Après la guerre, il reprend plusieurs toiles laissées inachevées, poursuit ses recherches sur la lumière et le mouvement et réoriente son style vers une peinture plus figurative. En 1921, sa première exposition monographique est organisée à la galerie Povolozky, à Paris. En 1923, il est nommé professeur aux Beaux-Arts de Prague, mais il reste cependant à Paris avec la charge de s'occuper des boursiers tchèques. Il rencontre un industriel tchèque, Jindrich Waldes, qui devient son mécène.

En 1931, il participe à la fondation du mouvement Abstraction-Création, créé par Auguste Herbin, en opposition à la peinture de la Nouvelle Objectivité allemande et au surréalisme. Alors qu'il l'a depuis longtemps délaissé, Kupka réintroduit le noir dans sa palette. Il quitte le groupe en 1934.

En 1936, il participe à l'exposition « Cubism and Abstract Art » au MoMA de New York. De 1939 à 1945, il est réfugié à Beaugency avec sa femme, Eugénie Straub.

En 1946, il participe au premier Salon des Réalités nouvelles.

En 1958, le Musée d'art moderne de Paris organise une rétrospective posthume, un an après sa mort.