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(1882-1963)
Cubisme
Grand nu 1908 Paris, MNAM
Port en Normandie 1909 The Art Institute of Chicago
La guitare 1910 Tate Modern, London
Femme tenant une Mandoline 1910 Munich, Bayerische Staat.
Barque sur la grève 1956 Collection particulière
Vitraux des églises de Varengeville 1956 Varengeville
L'oiseau et son ombre 1959 Collection particulière

Georges Braque, nait à Argenteuil le 13 mai 1882. Son père est entrepreneur en bâtiment et peintre amateur. Braque est âgé de huit ans quand la famille déménage en Normandie, au Havre, port en pleine expansion. Charles prospère et se fait bâtir un grand immeuble de cinq étages face à la mer. Le dimanche, Georges suit son père qui peint sur le matif en bord de Seine et commence à peindre lui-même vers 18 ans. Elève médiocre, même en dessin, c'est le journal illustré Gil Blas qui lui sert d'éducation artistique. Il en recopie de nombreux dessins. A 17 ans, il quitte l'école et son père le prend en apprentissage. Il travaille ensuite chez un peintre décorateur. Puis à Paris, il suit les cours d'un maître décorateur où il apprend à peindre de faux marbres et de faux bois. Il obtient son certificat d'artisanat en 1901.

Il s'installe à Montmartre, rue des trois frères. En 1902, il entre à l'Académie Humbert qu'il fréquente jusqu'en 1904. C'est là qu'il rencontre Marie Laurencin et Francis Picabia. Il décide de devenir peintre et son père ne s'y oppose pas. En 1903, il fréquente l'école des beaux-arts où il rencontre deux autres havrais, Raoul Dufy et Othon Friesz.

Il peint ses premières œuvres sous l'influence de l'impressionnisme jusqu'à ce qu'il découvre au Salon d'Automne de 1905 les toiles d'Henri Matisse et d'André Derain. Puis débute une collaboration artistique avec Othon Friesz avec qui il fait un séjour à Anvers, d'où il rapporte des tableaux fauves aux couleurs pures et aux compositions géométriques. Il descend à L'Estaque avec Othon Friesz d'octobre 1906 à février 1907. En mars, il envoie sept tableaux au salon des indépendants. Le marchand d'art Henri Kahnweiler lui en achète un ce qui affermit sa vocation.

En septembre, octobre et novembre 1907, marqué par l'exposition de tableaux de Paul Cézanne au Salon d'Automne, il retourne à l'Estaque rendre la construction plus lisible tempère sa palette abandonne la peinture sur le motif et privilégie le travail en atelier plus favorable à la concentration. Il commence à élaborer un nouveau système de représentation en se basant sur la simplification et la géométrisation des formes et la mise à plat de la perspective.

Fin novembre et décembre 1907, Guillaume Apollinaire qui a déjà écrit sur son travail et qu'il a rencontré chez Kahnweiler l'amène au Bateau-Lavoir de Montmartre où il rencontre Pablo Picasso qui peint alors Les Demoiselles d'Avignon. C'est pour lui une révélation. "C'est comme si quelqu'un buvait du pétrole pour cracher du feu". il reconnait au tableau la grande qualité d'évoquer le volume sans utiliser la perspective traditionnelle ce qu'il cherche lui aussi à faire. Il supporte en revanche mal la brutalité des visages qui évoquent des masques primitifs. Mis au défi de faire une toile en réponse, il peent Le grand nu, un nu couché mais montré à la verticale comme si on avait pris le lit et le modèle pour les accrocher à la verticale comme un tableau. Picasso lui présente Marcelle qui devient sa femme.

Devant les paysages rapportés de l’Estaque par Braque pour son exposition à la galerie Kahnweiler, en novembre 1908, le critique Louis Vauxcelles déclare : "Braque réduit tout, paysages, figures, maisons, à des figures géométriques, à des cubes".

Le mot est dit, de 1909 à 1912, Braque et Picasso élaborent les théories du cubisme. Ils quittent Montmartre pour Céret dans le Roussillon décidés à rompre avec la perspective qui part d'un point de vue et n'en sort pas. Quand, en 1909, Braque visite au Grand Palais le premier salon de l'aviation, il trouve confirmation de ses expérimentations en voyant des photographies aériennes à la verticale du sol, du jamais vu, renversent les repères de la perspective traditionnelle. Plus de regard frontal mais le monde vu sous un angle inédit, sous une perspective nouvelle. L'artiste ne va plus chercher à copier la nature, mais à la décomposer en masses pour la recomposer. Il représentera le modèle selon plusieurs points de vue, mais en une seule image fixe (comme si le peintre tournait autour du modèle pour en peindre l’intégralité). Ainsi aura lieu une multiplication des facettes. Les formes seront alors géométrisées et simplifiées ainsi que les couleurs qui seront majoritairement des camaïeux de gris et de bruns. Il s’agit d’une peinture toujours figurative, mais complexe. Parallèlement, Georges Braque poursuit sa peinture de paysages influencée par Cézanne, paysages qu'il finit par abandonner pour les natures mortes pour lesquelles il est très connu (Guitare et Compotier en 1909).

Braque introduit pour la premier fois la lettre d'imprimerie dans la peinture d'abord en trompe l'œil avec Le pyrogène (1910) puis à l'aide d'un pochoir dans Le Portugais (1910). Ce sont des signes : le tableau ne montre pas le monde tel qu'on le voit mais tel qu'on le sait un signe pour évoquer une guitare et de quelques autres pour la représenter simultanément sous toutes ses faces.

En 1911, Braque s’aperçoit que sa peinture s’éloigne trop du modèle (Torse de femme, 1911). Sa peinture tend vers l’abstraction et cela lui déplaît. Pour renouer avec le réel, il innove avec l’introduction directe dans sa peinture d'objets du réel. Pablo Picasso loue la villa des Clochettes le 25 juin 1912 à Sorgues dans le Vaucluse. Georges Braque le rejoint en louant la villa Bel-Air début août. Picasso fit emporter les pierres où il avait peint un tableau ovale. Si Picasso effectue le premier collage en novembre, c'est Braque qui introduit l'usage du faux bois et du faux marbre et des vrais papiers. Chez un marchand de couleurs, il repère des galons de tapisserie qui imitent le faux bois des peintres en bâtiment et, aussitôt de retour à la villa bel-air, il en découpe trois morceaux. Il introduit du sable de la sciure de bois de la limaille de fer car il voit combien la couleur dépend de la matière (Femme à la guitare, 1913)

La Première Guerre mondiale interrompt l'étroite collaboration avec Picasso. Braque est mobilisé et doit participer à ce qu'il appelle le "grand carnage". Envoyé au front il est gravement blessé à la tête en mai 1915 et doit être trépané. Il ne pourra recommencer à peindre qu'en 1917. Il dessine sur des cahiers. Il travaille plusieurs toiles à la fois qu'il met parfois des années à terminer. Il déploie de garnds espaces colorés dans un espace cubiste : La musicienne (1918), Café-bar.

Il peind, de manière plus traditionnelle, dès 1918, des séries de guéridons et de cheminées de 1922 à 1927. Il fait une sorte de « retour à l'ordre » en peignant des Canéphores évoquant les porteuses d'offrandes de l'Antiquité grecque. Il peint de grands formats verticaux pour la salle à manger de la villa construite pour lui par Benjamin Perret prés du Parc Montsouris, des natures mortes verticales aux hanches de cariatides. Il broie ses couleurs, préoccupé de la matière : il y a autant de sensibilité dans la technique que dans le résultat dit-il.

Braque travaille avec des verts, des bruns et des noirs jusqu'en 1928 où les couleurs réapparaissent et la matière devient plus fluide. Vers 1930, il exécute plusieurs séries : baigneuses, plages, falaises. Puis jusqu’en 1938, il peint des natures mortes décoratives comme la Nappe rose (1933) et la Nappe Jaune (1935).

La guerre est pour Georges Braque synonyme d'austérité et d'accablement. Il fuit Paris durant la débâclemais revient à Paris en juillet. Il refuse de peindre un emblème pour le gouvernent de Vichy. Sa peinture ne plait pas au nazis ce qui lui évite d'être convié en Allemagne sous prétexte de libérer des prisonniers. Il de tourne encore plus vers les objets de la quotidienneté de cette période d'occupation, le verre de vin ou le morceau de pain, les poissons. En 1942 sa production devient encore plus féconde, il achève le poêle, plusieurs guéridons et des compositions réintroduisant la figure humaine : La patience (entre l'angoisse et l'espoir, face de lumière et profil noir, sa main de squelette protège des cartes étalées sur une table étirée et longue comme un cercueil). En 1945, atteint d'une grave maladie, un ulcère à l'estoma,c il doit s'arrêter de peindre pendant plusieurs mois. Il remporte la prix de la Biennale de Venise en 1948.

De 1949 à 1956, il compose les Ateliers, série entamée en 1938 et interrompue par la guerre, huit toiles aux tons légèrement funèbres (aux couleurs éteintes). Atelier 1, est une référence l'autoportrait de Poussin sauf que la tête est remplacée par un pichet blanc. Picasso dit ne pas comprendre cette série. Braque ne s'en offusque pas : "Picasso est un virtuose. Le talent sert à masquer beaucoup de choses et quand on fait appel à lui c'est que l'imagination est en défait. Moi je me réjouis de ne jamais avoir donné dans l'art de peindre car il est triste de réduire l'art à la victoire du pinceau sur le mystère". Déjà apparaît dans ces travaux, le thème de l'oiseau à la forme très schématisée.

La série des billards, espaces verticaux et horizontaux, ne rencontre que peu d'échos. "Les objets n'existent plus pour moi sauf qu'il y a un rapport harmonieux entre eux et aussi entre eux et moi. Quand on arrive à cette harmonie tout devient possible et la vie est une éternelle révélation. C'est ça la varie poésie.

Varangeville, découvert en 1929, devient le lieu de villégiature de l'été et de l'automne. "Les impressionnistes ont évacué de la peinture le sens tactile le rétablir a été ma grande préoccupation. Ce n'est pas assez de faire voir ce que l'on peint, il faut encore le faire toucher. Quand j'introduis du sable dans la toile c'est simplement pour émouvoir le sens tactile."

Ses derniers tableaux, relativements petits, ont des formats très allongés avec des cadres qu'il peint lui même, une simple ligne d'horizon pour délimiter la mer et la terre. "La terre c'est le limon dont parle la bible et j'aime ce mot il est le fondement de tout art : c'est du limon de la terre que l'homme a été crée. J'essaie de tirer mon œuvre du limon de la terre. Plus on explore plus on approfondit le mystère. Il faut respecter le mystère si l'on veut qu'il conserve sa puissance

Saint John Perse accepte, pour ses 80 ans, pour accompagner ses poèmes, L'ordre des oiseaux, une série de 12 d'eaux fortes. Dans les années 1930, Ambroise Vollard lui avait proposé d'illustrer la théogonie d'Hésiode que Maegh publiera. Pierre Reverdy accueille dans sa revue ses pensées sur la peinture. Il entretient des dialogues créatifs avec Guillaume Apollinaire, Jean Paulhan, Saint John Perse, Jacques Prévert et René Char avec Lettera amorosa.

Reconnu internationalement comme l'un des peintres majeurs du XXe siècle, il meurt le 31 août 1963 à Paris. Des funérailles nationales ont lieu devant la colonnade du Louvre le 3 septembre , André Malraux y prononce un discours émouvant. Il est enterré le lendemain au cimetière marin de Varengeville-sur-Mer.

Source : Michael Gaumnitz, Georges Braque, autoportrait, DVD RMN, 2013.