Black tea

2024

Avec : Nina Melo (Aya), Han Chang (Cai), Wu Ke-Xi (Ying), Michael Chang (Li-Ben). 1h49.

Abidjan. Une grande cour où va être célébrée une série de mariages. Aya, une jeune femme ivoirienne d’une trentaine d’années, persuadée qu’elle et son mari ne seront pas heureux ensemble dit non à son mariage, à la stupeur générale.

Quelques mois plus tard, Aya a émigré en Chine. Dans le quartier baptisé Little Africa, surnommé également "Chocolate City", à Guangzhou, elle travaille dans une boutique d'exportation de thé avec Cai, un Chinois de 45 ans. Aya et Cai tombent amoureux mais leur histoire survivra-t-elle aux tumultes de leurs passés et aux préjugés ?

Abderrahmane Sissako porte ce sujet depuis le début des années 2000 et le tournage de En attendant le bonheur dans lequel apparaît un couple sino-africain. L'histoire de Black Tea se déroule quasi-intégralement en Chine mais les instances qui valident les autorisations de tournage estimaient que cette histoire d’amour entre une Ivoirienne installée à Guangzhou et un Chinois ne cadrait pas avec les valeurs qu’elles cherchent à véhiculer. C’est dommage car Black Tea n’a rien de critique vis-à-vis de la Chine.

Avec Black Tea, Sissako veut simplement rendre compte des relations qui existent entre ces deux cultures.Pour bon nombre d’Africains, l’Europe a longtemps symbolisé la promesse d’un autre monde possible. Les choses se déplacent et c’est tant mieux. La mondialisation permet aux êtres qui le peuvent de circuler, de construire des ponts entre les cultures. Nous sommes à un moment de l’histoire où le continent africain, fort de sa démographie et de ses richesses économiques, pèse de plus en plus sur la scène internationale. C’est le cas aussi de la Chine.

Cette histoire, censée s’inscrire dans un lieu très précis, le quartier baptisé Little Africa à Guangzhou – surnommé également « Chocolate City » – où se trouve une forte diaspora africaine, a ainsi dû être filmée à Taïwan. Certes, Timbuktu n’a pas été tourné au Mali mais à Oualata, en Mauritanie, où les rues sont très différentes. Mais là, il n'était pas possible de reconstituer Chocolate City à Guangzhou, anciennement Canton, l'une des plus grandes villes chinoises, capitale de la province de Guangdong. Le film qui aurait ainsi pu avoir un coté documentaire, s'est orienté dans la direction du conte avec une photographie particulière. Le film est tourné majoritairement de nuit. Les ambiances nocturnes renforcent le caractère intimiste de cette histoire. Les personnages sont souvent saisis derrière une vitre avec les reflets de la rue, les lumières scintillent dans une ambiance très asiatique. Le personnage feminin exceptionnel, sorte de déesse de la vérité, devra néanmoins s'interroger sur la possibilité d'une telle exigence dans le monde contemporain.

JeanLuc Lacuve, le 7 mars 2024.

Retour