1977

Une belle journée d’été, à la fin du XIXème siècle, dans la campagne russe. Anna Petrovna, veuve du général Voïnitsev, reçoit avec faste parents et amis dans sa somptueuse propriété.

Parmi les invités, Serguei, son beau-fils, et sa femme Sofia, qui clament leur adhésion aux idéaux de Liberté, d’Égalité et de Fraternité. C’est ainsi que Sofia songe sérieusement à se lever plus tôt le matin pour donner le biberon aux nouveau-nés des moujiks auxquels son époux ferait, de son côté, cadeau de ses costumes. « Des paysans en frac ! », ironise Platonov, instituteur et libre-penseur accompagné de son épouse Sachenka. Cette dernière, fragile et timide, est la sœur du docteur Triletski, praticien fatigué de ne traiter que diarrhées et choléra, qui fait le pitre et boit, tout comme son père, vieillard alcoolique qui s’endort et ronfle dès qu’il s’assoit.

Dans cette assemblée de gens qui se prétendent intelligents et issus d’une vieille noblesse, paradent encore de puissants hobereaux, Glagolev et Chtcherbouk ; le premier, déjà âgé, courtise Anna Petrovna, à laquelle il garantirait, en l’épousant, une sécurité financière qui lui fait défaut depuis le décès de son mari ; le second se présente avec emphase comme le défenseur des nobles, ces "fleurs de l’humanité", face aux rustres qui menacent de les écraser. Le plus discret de tous est un prêteur sur gages, Pétrine, auquel Anna Petrovna doit son apparente mais trompeuse aisance. Ce Pétrine saura rappeler à ses hôtes que leur "noblesse" jette ses derniers feux grâce à des "rustres" comme lui qui détiennent le vrai pouvoir, celui de l’argent.


Les heures passent : on boit, on danse, on joue à des jeux dont les gages, grivois ou stupides, déclenchent une grasse hilarité. On s’extasie à l’écoute d’un piano qui joue, seul, du Liszt. Et surtout, l’ivresse aidant, on se dévoile et se déchire. Platonov et Sofia, amants autrefois, se jettent dans les bras l’un de l’autre alors que, la nuit tombée, éclate un feu d’artifice. "Je suis un mari cocu !", vient pleurer Serguei dans le giron de sa belle-mère qui fut, aussi, la maîtresse de l’instituteur. Glagolev prend violemment à partie ce dernier : “Vous semez la débauche autour de vous !”.

Conscient du mal dont il est la cause, Platonov s’enfuit dans la campagne, hurlant : « Je suis un zéro, un raté, je n’ai rien fait de cette vie ! ». Il se jette dans l’étang, comme pour se suicider, mais l’eau ne lui arrive qu’aux genoux ! Sachenka, qui l’a suivi, le réconforte : « Quel que tu sois, je t’aime ». Trempé, ridicule, mais vivant, Platonov lui rend ses baisers : « Ma chérie, tu me sauves ».

Le film est adapté de Ce fou de Platonov et de trois nouvelles de Tchekov. Anton Tchekhov (1860-1904) écrivit “Platonov”, sa première pièce, au début des années 1880. Il en confia le manuscrit à la directrice du Théatre Maly de Moscou, qui refusa de l’inscrire au répertoire. Retrouvé en 1920, ce drame en quatre actes fut imprimé en 1923 et intégré en 1949 à l’édition soviétique des “Œuvres Complètes” de Tchekhov. Jean Vilar le créa au T.N.P., en mai 1956, sous le titre “Ce fou de Platonov”. À la fin de la pièce, Sofia abat Platonov d’une balle en plein cœur. Quelques minutes avant, Platonov avait crié : « Honte ! J’ai honte ! Je devrais me tuer ». Ce qu’il tente en vain de faire dans le film…

En "sauvant" Platonov , Mikhalkov accentue le bancement incessant entre dérision et émotion. La bourgeoisie a la bonté inadéquate, irréaliste et vaine. La dérision avec le suicide raté est contrebalancé par la foi dans l'espérance et l'amour qui peuvent sauver un être humain. "Si tu es vivant, je suis vivante, le monde entier pour moi, c'est toi. Il faut savoir aimer mon Michel ! Tant que nous saurons aimer, nous vivrons longtemps et heureux;"

Mikhalkov joue le rôle du médecin, futile, détestable, mais aussi misérable et cosncient de son état il a "honte de vivre pour rien et de boire, en sachant bien qu'il n'y aura rien d'autre, rien;" S'il refuse d'abord son aide à Gorokhov c'est quil ne supporte plus son métier : "La nuit, les routes défoncées, les vieux chevaux les diarrhées,

Sophie n'est pas plus courageuse : "Mon dieu épargnez-moi ! Je vous en supplie, épargnez-moi !" ditelle voulant vivre dans l'idéal du passé :" Que le passé reste pour nous le passé. L'histoire est trop vieille pour qu'on lui cherche une suite".

Platonov peut apparaitre cynique. Lorsque Glagoliev lui jette à al afce "Je tiens à vous dire que je vous hais". il lui répond " Vous ne condamnez que ce que votre âge ne vous permet plus;"

En dépit de la désolation du présent, c'est de lui seul qe peut venir le salut mais il est sns doute trop tard pour les personanges : "Il n'y a jamais d'après. C'est faux de croire qu'on a la vie devant soi, qu'elle sera longue et heureuse qu'on peut vivre comme ça pour voir, qu'on pourra corriger après. Il n'y a jamais d'après, jamais.

Sa vie dénuée de sens, il sait d'où en vient l'origine : "Il suffit de mentir une seule fois et de trahir une seule fois l'idéal que l'on s'est forgé pour ne plus jamais pouvoir briser le carcan des trahisons et des mensonges"

critique du DVD
Editeur : Potemkine et Agnès B. Decembre 2009. Coffret 4DVD.
DVD

DVD1 : Le nôtre parmi les autres. DVD2 : L'esclave de l’amour. DVD3 : Partition inachevée pour piano mécanique. DVD4 : Cinq soirées.

Suppléments : Présentation de chacun des films par le critique Pierre Murat. Entretiens avec le réalisateur Nikita Mikhalkov, le scénariste et décorateur Alexandre Adabachian et le compositeur Edouard Artemiev. Documentaire sur Vera Kholodnaïa, star du cinéma tsariste.

 

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(Niezakontchennaïa pisca dlia mekanitcheskovo pianino). Avec : Aleksandr Kalyagin (Platonov), Yelena Solovey (Sofia Yegorovna), Yevgeniya Glushenko (Aleksandra), Kseniya Minina (Liza), Sergei Nikonenko (Yakov), Yuri Bogatyryov (Sergei Pavlovich Voynitsev), Antonina Shuranova (Anna Petrovna Voynitseva), Sergei Guryev (Petechka), Oleg Tabakov (Pavel Petrovich Sherbuk), Nikolai Pastukhov (Glagolyev). 1h43.
Partition inachevée pour piano mécanique
Voir : édition DVD