La fièvre dans le sang

1961

Genre : Mélodrame

(Splendor in the Grass). Avec : Natalie Wood (Deanie Loomis), Warren Beatty (Bud Stamper), Barbara Loden (Ginny Stamper), Pat Hingle (Ace Stamper), Audrey Christie (Mme Loomis), Zohra Lampert (Angelina). 2h04.

Dans une petite ville du Kansas en 1929, Deanie et Bud, tous deux élèves du collège, s'aiment, mais le mariage leur est interdit par leurs familles. Le père de Bud est un riche propriétaire de puits de pétrole dont celui de Deanie n'est qu'un petit actionnaire. Et ils sont jugés trop jeunes. Bud se montre plus soumis envers son père et ses préjugés moraux. Ginny, sa sœur nymphomane, mourra dans un accident d'auto.

Bud essaie en vain de satisfaire les ambitions déçues de son père, mais celui-ci se suicide, ruiné par le krach. Bud fait la connaissance d'une jeune italienne, Angelina, dont les parents tiennent un restaurant. C'est elle qu'il épousera tandis que Deanie est soignée pour troubles nerveux dans une clinique psychiatrique, où elle tombe amoureuse d'un autre malade. A sa sortie, elle se rend dans sa ville natale pour annoncer à sa mère qu'elle va se marier. Puis, en compagnie de deux anciennes camarades de collège, elle rend visite à Bud, cultivateur, marié et père de famille, qu'elle revoit sans amertume et quitte définitivement, se souvenant de la "splendeur dans l'herbe".

De longues scènes, prolongées au-delà de ce que leur strict contenu dramatique exige, découpées et montées pour que l'acteur et le corps de l'acteur soient rois, montrent des personnages malades, frustrés, névrosés dont l'angoisse naît lentement, monte, explose ou bien n'explose pas et, dans ce cas, les détruit encore plus irrémédiablement.

Ce style de direction d'acteurs porte en lui-même sa philosophie et son point de vue sur le monde. Il n'est apte qu'à décrire des univers en décomposition qu'un bouleversement de valeurs va bientôt balayer. Il chante avec une intensité parfois poignante une décadence qui n'a même pas eu sa grandeur.

Transplanté ailleurs, il devient vite odieux et n'est qu'une complaisance insoutenable. Ici, il est parfaitement adapté au sujet "historique" traité par le script de William Inge : à savoir les ravages du puritanisme dans l'âme de l'Amérique des années 30 vus à travers toutes les couches, riches et pauvres, de la société ; ses rapports avec la maladie mentale et donc avec la psychanalyse; les tragédies individuelles qu'il engendre et l'espèce de bonheur déchirant (qui n'est pas le bonheur) auquel parviendront avec le temps les survivants. A cet égard la dernière scène du film - retrouvailles entre Deanie et Bud est l'une des plus belles de l'oeuvre de Kazan.