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Noctambules (Nighthawks)

1942

Nighthawks
Edward Hopper, 1942
Huile sur toile, 84,1 x 152,4 cm.
Chicago, The Art Insitute of Chicago

Dès son achèvement en 1942, Nighthawks est considéré comme une réalisation importante et est acquis l'année même par l'Art Institute of Chicago. Il est aujourd'hui le plus célèbre tableau de Hopper, icône de la culture américaine, retravaillé et parodié de nombreuses fois dans la culture populaire.

Les bâtiments en brique à l'arrière plan rappellent Tôt le dimanche matin (1930) alors que la juxtaposition d'un intérieur commercial bien éclairé avec une rue pavée et sombre rappelle Drug Store (1927). C'est néanmoins le seul tableau de Hopper à montrer une vitre courbe et transparente.

Le motif est inspiré d'un bar-restaurant se tenant à l'un des croisements de Greenwich Avenue, que Hopper fréquentait souvent. La structure possède une forte dynamique. Les fenêtres panoramiques permettent de distinguer dans sa continuité la rue à l'arrière plan, le bar puis la rue qui fait l'angle alors que l'ensemble n'est eclairé que par les néons (qui appparaissent alors aux Etas-Unis) du bar. Si la chaleur semble ainsi émaner de l'intérieur du bar, une tension contradictoire provient du mystère des personnages qui s'y tiennent ; leurs expressions et postures figées peuvent laisser présager le déroulement d'un drame.

Cinéphile, l’artiste s’est nourri des films de l’âge d’or hollywoodien des années 1930 et 1940. "Quand je n’arrivais pas à peindre, disait-il, j’allais au cinéma pendant une semaine ou plus." Bien qu’il n’ait jamais revendiqué une influence particulière, Hopper n’en a pas moins utilisé les techniques de la mise en scène et du cadrage pour concevoir ses toiles : le jeu des ombres et des contrastes, la construction d’une image fortement géométrisée en sont les paramètres les plus évidents. Mais ce qui caractérise aussi ce tableau, c’est la narration. Hopper affirmait s’être inspiré d’une nouvelle de Hemingway, Les tueurs, dans laquelle deux tueurs à gages assassinent un ancien boxeur. Lorsque Robert Siodmak adaptera Les tueurs à l’écran en 1946, il s’inspirera à son tour de ce tableau pour la séquence d'ouverture.

Nighthawks ,
Edward Hopper, 1942
Les tueurs (Robert Siodmak,1946)
voir : photogrammes

Interrogé sur le sens que l’on pouvait donner à ses œuvres, Hopper, lors d’une interview donnée à une radio américaine en 1961, refusait d’y voir l’expression d’une "quelconque mentalité américaine", ajoutant encore que c’était au spectateur d’en tirer sa propre interprétation.

Jean-Luc Lacuve, le 15 janvier 2012