Federico Fellini nait le 20 janvier 1920 à Rimini, station balnéaire sur la côte adriatique, dans une famille de la petite bourgeoisie italienne. Son père est représentant en champagne comme le père de Marcello dans la Dolce vita.

Fellini au collège de Fano
Fellini au Lycée de Rimini

Enfant maigre et pâle, Federico cultive avec complaisance cet aspect inquiétant. Il l'accentue en s'habillant de noir et se montre à l'affût d'affirmer ses talents de comédiens. Il met en scène un faux suicide de de fausses méditations, accroupi sur une table pour attirer l'attention.

Fellini ne s'est pas enfui de chez lui pour suivre un cirque comme le dit la légende. Il s'est seulement échappé une journé du collège de prêtres à Fano où il est scolarisé durant quatre ou cinq ans. Les prêtres, les clarissimi, extremment sévères et bornés avaient un petit col blanc comme Anita Ekberg dans la dolce Vita. Le jeune Fellini sort du collège un matin et voit un cirque avec deux tentes installé sur la place. Dans la première tente, il surprend une grosse fille qui enfile un tutu. Puis il entend un grognement dans la seconde tente. Là, il voit un zèbre allongé avec autour, un homme âgé à collerette de clown et toute une famille rassemblée autour de l'animal. Le vétérinaire diagnostique une indigestion due au chocolat et Fellini, envoyé chercher de l'eau, participe à l'amélioration de la santé du zèbre et est accepté naturellement par la troupe durant cette journée. Le soir, il assiste au spectacle et affirme s'être enfui du collège où on ne lui donnait pas à manger. Il dort dans la roulotte et est ramené au matin au collège.

C'est au collège de Fano que Fellini voit ses premiers films , ceux avec Tom Mix qui ne mle marquent guère. Plus décisif, une photo nue de la femme de chambre du grand hôtel intercalée après la tour de Pise et la chapelle Sixtine. "Vous venez de voir le diable avait dit le prêtre en cachant vite la diapositive intercalée là par on ne sait qui". C'est en 1928 qu'il voit Les temps modernes qui marque son entrée dans le cinéma. La musique des Temps modernes est pour Fellini comme le carillon d'une inspiration cinématographique à venir. Chaplin appartient à son patrimoine fantastique et sentimental. Il réfute pourtant son influence pour la Strada comme on l'a trop dit car il ne descelle pas la même préoccupation spirituelle dans l'œuvre de Chaplin.

Fellini entre au lycée à Rimini et y vit d'une façon proche de celle racontée dans les Vitelloni.

Fellini à son arrivée à Rome
Fellini dans l'Amore de Rossellini

Fellini croit à l'originalité des artistes venus de la province. "Leur œuvre s'accomplit sous le signe de la fantaisie. C'est à dire que, quelque chose qui a été contraint à l'immobilité par le silence et la torpeur se développe par une voie fantastique". En attendant il s'essaie au journalisme et à la caricature.

Quand il arrive à Rome à dix huit ans, Aldo Fabrizi, est un comique populaire. Fellini le rencontre par hasard dans une rôtisserie où l'acteur lui prête quelques sous alors qu'il manque de monnaie et l'invite à dîner. Ils deviennent amis et Fellini écrit pour lui de petites histoires. Fellini accompagne Fabrizi lorsqu'il monte sa compagnie (proche des Feux du Music-hall). Pendant un an, Fellini sera le poète de la compagnie. Il écrit des sketchs et des chansons est acteurs parfois. Fellini garde un bon souvenir de cette tournée à travers l'Italie pendant la guerre et la découverte du sud.

Fellini s’introduit dans le milieu du cinéma où il travaille en tant que gagman. Il échappe aux combats pendant la guerre. Durant l’automne 1942, en travaillant pour le siège de la radio italienne, il rencontre Giulietta Masina qu’il épouse le 30 octobre 1943 à Rome. Lors de l’occupation allemande, de septembre 1943 à juin 1944, il collabore à deux autres films de Aldo Fabrizi, Campo dei fiori mis en scène par Mario Bonnard et L’Ultima Carrozzella mis en scène par Mario Mattoni. Durant l’été 1944, Fellini a un fils qui ne vivra que quelques semaines. Il est employé par l’Alleanza cinematografica italiana (ACI), maison de production de Vittorio Mussolini, un des fils du dictateur, pour lequel, il a tourné en Lybie, durant l’hiver 1942-1943, une partie du film Gli ultimi tuareg dont il a écrit le scénario. Le film a été suspendu par la grande nouvelle du débarquement allié. Rome est libérée le 4 juin 1944. La chute du fascisme interrompt pour un temps son travail cinématographique.

Juste après la libération, Fellini devient caricaturiste au Marc Aurelio. Les Américains contrôlent la presse et la radio. Il n'y a plus de journaux ni de cinéma. Il apprend l'anglais. Les Américains lui semblent être des barbares, enfantins des géants ivres bagarreurs. Il ouvre alors un négoce, une sorte d’échoppe, le Funny Face Shop, où il dessine des caricatures et des portraits de soldats alliés sur des décors de la Rome Antique. Il écrit en anglais les textes des caricaturistes avec Bompiani et Guasta. Fellini ne se déclarera jamais gêné de cette étiquette de caricaturiste car le sens de l'outrance et de la charge, c'est une vision qui suppose un jugement moral sur les choses.

Dans cette boite pleine de bruit et de fureurs, rentre un jour un homme pâle, l'aspect d'un émigrant qui regardait avec cette pénétration et cette mollesse caractéristique de Rossellini. Il arrête une rixe en cours avec un Japonais non satisfait du dessin de Fellini et lui propose de collaborer à un court métrage sur la vie de don Morosini qui fut fusillé par les Allemands. Il est propble que Rossellini connaissiat les dessins de Fellini mais il voulait aussi qu'il use de son influence pour que Fabrizi accepte de jouer le rôle du prêtre pour un cachet modeste. Le soir, Fellini, après son travail de caricaturiste dans la journée, travaille ainsi au scénario de ce qui va devenir Rome ville ouverte.

Rossellini n'est pas pour Fellini un maître dont il se serait inspiré dans ses mises en scène. C'est un maître qui lui a révélé dans Rome ville ouverte et surtout dans Païsa, le mode d'expression qui lui convenait. Il était alors lié à lui par une amitié vittelonesque. Pour L'amore, il va jusqu'à se fait blondir les cheveux et se laisse pousser la barbe. Le film devait servir comme complément de programme pour La voix humaine. Fellini propose comme sujet un souvenir d'enfance et prétend que c'est une nouvelle d'un romancier russe pour donner plus d'autorité à sa proposition. Il n'avoue cette supercherie qu'un peu plus tard... quand le sujet a plu à tous. Le souvenir provient de ses étés à Gambettola, un village près de Rimini où vivait sa grand-mère. Gaetanaccio portait à la taille des couteaux pour castrer les cochons et ceux-ci le sentaient. Il fascinait les paysannes qui le prenaient pour le diable. La paysanne de L'amore prend ainsi le diable pour saint Joseph.

Jusque là ses expériences de cinéma lui semblent un peu bâclée. Il ne pensait pas faire carrière. Pour Païsa, il suit Rossellini de la Sicile jusqu'au Pô. Il rencontre Martelli qui sera son opérateur jusqu'à la dolce vita.

C’est en 1950 que Federico Fellini fait ses débuts en co-réalisant avec Alberto Lattuada I Luci del varietà. En 1952, il réalise en solo Lo seicco bianco sur un sujet conçu par Michelangelo Antonioni. Il travaille aussi pour la première fois avec le compositeur Nino Rota qui devient son musicien attitré jusqu’à sa mort en 1979. Tullio Pinelli et Ennio Flaiano complètent l’équipe fellinienne en tant que scénaristes jusqu’au milieu des années soixante.

Huit mois après la sortie de La dolce vita, Fellini dit ne pas comprendre ce sur quoi repose le scandale suscité par le film. On argue que les religieux ont été scandalisés par le faux miracle, que la fête finale a été qualifiée d'orgie. Mais des archevêques ont aussi dit en chair qu'il fallait le voir comme un film dénonçant les travers de la société contemporaine.

Les aristocrates sont décrits comme désœuvrés. Or, la grande bourgeoisie qui adore les aristocrates s'est sentie offensée. A Milan, le soir de la première, Fellini est sifflé. On lui crache à la figure. Mais le film remporte immédiatement un énorme succès qui divise l'Italie.

Pour Fellini, le néoréalisme avait représenté le peuple avec un réalisme très crû. Cela avait été accepté car le peuple est indiffèrent à ce qu'on le représente d'une manière ou d'une autre. Le scandale est créé par la bourgeoisie qui n'aime pas être critiquée. Car Fellini décrit un monde, une société, dont les bases s'effritent, une série de personnages qui acceptent sans sourciller, s'en plus s'en étonner, le péché. C'est cette acceptation du péché qui est généralisée jusque dans les familles bourgeoises les plus conformistes. C'est l'histoire d'un édifice qui est en passe de s'écrouler parce que les fondations ont cédé. Mais Fellini le souligne, ce n'est pas un procès exposé par un juge mais par un complice. Cette tendresse, cette sympathie, dit-il, c'est la qualité majeure du film.

Lorsque Dominique Delouche interroge alors Fellini sur la definition du néoréalimse donnée par Rossellini : "Le néoréalisme est un acte d'humilité devant la vie" celui-ci continue en ajoutant "..et devant la caméra". Le néoréalisme fut certes apès la guerre, une impulsion énorme, une sorte de croisade pour tout le monde. Mais cela a finit par produire une humilité impersonnelle, dépourvue d'émotion.

Zavatani , l'ami de Fellini, s'emporta contre La Strada, contre la situation italienne qui cherche alors à faire mourir le néoréalisme. La Strada était un bon film mais qui n'allait pas dans la direction du néoréalisme manquant d'ancrages social géographique et historique exactes. La conscience est l'objet du néoréalisme et le film, trop vague dans sa conscience de classe, lui semble en trop manquer. La Strada est ausi vivement attaqué par Truffaut ("putanat, ficelage épais, symbolisme grossier"), Rohmer et Rivette ("recherche de l'effet, présence de clichés d'école, exhibitionnismes felliniens"). Les trois jeunes critiques choisissent Le voyage en Italie de Rossellini comme film moderne contre La Strada. En 1957, au moment de Cabiria, Fellini a pris pour Bazin la place de Rossellini, rejoignant puis dépassant Orson Welles dans son panthéon personnel. Pourtant, en 1960, les critiques des Cahiers encensent Antonioni et L'avventura au détriment de Fellini qui reçoit la palme d'or pour La dolce Vita .

Quand Fellini et et Moraldo Rossi, son ami et assitant se séparent, c'est le rapport de Fellini à la réalité qui change, explique le critique Mario Sesti. Moraldo Rossi est le script de Fellini sur son premier film, Courrier du cœur. Entre le cinéaste est lui démarre une longue amitié. Moraldo et Fellini font leurs sorties nocturnes ensemble et Moraldo récolte et complète nombre d'anecdotes que Fellini transfigure notamment dans La dolce vita. Tous les grands créateurs ont besoin de gens qu'ils "pillent" puis qu'ils abandonnent. Pour Fellini, lâcher Moraldo Rossi n'a pas été sans conséquences.

Après la démesure de son Satyricon en 1969, d'après l'œuvre de Pétrone, Fellini, désormais débarrassé de l'héritage néoréaliste, plonge dans ses souvenirs d'enfance avec Les Clowns en 1970, téléfilm sorti aussi dans les salles de cinéma, Fellini Roma en 1972 et, surtout, Amarcord en 1973, qui évoque son adolescence à Rimini, sa ville natale.

Avec Le Casanova de Fellini en 1976, il renoue momentanément avec le baroque fastueux du Satyricon. Mais sa veine intime reprend le dessus, avec un nouveau téléfilm qui sera également exploité dans les salles de cinéma : Répétition d'orchestre en 1979.

A partir des années 80, Federico Fellini bat contre la crise du cinéma italien. Il lui devient difficile de monter ses projets. Après La Cité des femmes E la Nave va ... met deux ans à se réaliser.

La télévision devient la cible de Fellini. Avec son défilé d'individualités, son catalogue non hiérarchisé de visages et de paroles, elle est la caricature de son univers. Dans Ginger et Fred, il dénonce la berlusconisation de Italie et les méfaits de la télévision. Il fermera les portes de Cinecittà en 1990 après la réalisation du film La Vocce delle luna. Par la suite, il tourne quelques films publicitaires. Il est à nouveau honoré d’un dernier Oscar pour l’ensemble de son oeuvre.

En 1993, Federico Fellini est hospitalisé suite à un infractus. A l’automne, une nouvelle attaque le plonge dans le coma qui lui est fatale. Federico Fellini meurt le 31 octobre 1993 à Rome. Son cercueil est exposé sous une grande toile bleu rappelant le décor d’Intervista durant une journée entière au Studio 5 de Cinecittà. Ses funérailles sont un deuil national et international. Tous les plateaux de tournages ont gardé une minute de silence en son honneur.

 

Sources :

 

 

Retour à la page d'accueil

Biographie de Federico Fellini