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Marché noir

1961

Black Market
Robert Rauschenberg, 1961
Huile, aquarelle, crayon, papier imprimé, reproductions imprimées, bois, métal, boîte en fer blanc et quatre écritoires sur toile, avec corde, tampon en caoutchouc, tampon encreur et divers objets, 127 x 150,1 x 10,1 cm
Cologne, Museum Ludwig

Black Market (Marché noir) a été exécuté pour l’exposition L’Art en mouvement organisée par le Stedelijk Museum d’Amsterdam en 1961. Comme dans d’autres Combines painting du début des années soixante, qui relient la peinture à la sculpture, l’œuvre accrochée au mur se poursuit au sol par une ficelle qui la relie à une valise en bois ouverte contenant divers objets, sur laquelle est inscrit « Open ».

Le collage d’éléments à la surface rappelle Monogram. Quatre blocs-notes dont on peut soulever la couverture en métal ainsi qu’un panneau de signalisation « One Way » (sens unique) attirent le regard du spectateur, lui indiquant un sens de lecture qui va de gauche à droite. La peinture, appliquée avec une gestualité proche de l’Expressionnisme abstrait, relie et souligne les objets collés à la surface de l’œuvre.

Black Market était à l’origine une œuvre interactive nécessitant la participation du spectateur. En effet, par une carte écrite en dix langues à l’intérieur de la boîte posée au sol, Rauschenberg invitait les spectateurs à prendre un objet contenu dans la valise après l’avoir remplacé par un objet personnel. Cet objet devait être dessiné sur un des quatre blocs-notes collés à la surface du Combine où le spectateur devait apposer aussi sa signature. L’artiste proposait ainsi un commerce avec le public, une sorte de marché noir comme l’indique son titre car, par ce procédé, l’œuvre faisait entrer des objets qui ne sont pas de l’artiste dans l’œuvre et dans le musée. (Pour une lecture approfondie de cette œuvre, voir l’article de Branden W. Joseph, catalogue de l’exposition).

En insistant sur le caractère personnel des objets que le spectateur peut apporter à l’œuvre, Rauschenberg souligne leur signification auprès du donateur. Le véritable trafic que ce marché implique serait, selon Branden W. Joseph, « un trafic de significations ». Le spectateur n’est pas le producteur de l’œuvre, mais entre dans un jeu sémantique qui en change le sens. Le mouvement que l’œuvre était tenue représenter n’est pas mécanique mais devrait suivre plutôt celui de la vie. La vie de l’œuvre qui se prête aux transformations apportées par le public, la vie qui se reflète aussi dans les miroirs métalliques des blocs-notes absorbant les va-et-vient des spectateurs.