Editeur : Carlotta-Films. Juillet 2011. Nouveau master restauré haute définition. DVD 20 €.

Suppléments :

  • Préface de Pierre Berthomieu (8 mn)
  • La bande-annonce

Jane Hudson, une Américaine célibataire et quadragénaire, réalise son rêve en allant passer ses vacances à Venise et espère bien y trouver la concrétisation de tous ses idéaux romantiques. Dès son arrivée, chaque instant la voit s’extasier face à la beauté de la langue italienne et l’atmosphère magique de la Cité des Doges. Au hasard des rencontres, Jane fait la connaissance de couples de touristes. Mais sa fascination se mue lentement en douce mélancolie, et le poids de la solitude grandit en elle. Un matin, Jane entre dans le magasin d’antiquités de Renato de Rossi, qui lui propose de l’initier à la vie vénitienne…

Vacances à Venise est certes un "Travelogue", un film de paysages européens où la découverte des monuments anciens s'accompagne de la découverte de l'amour, mais il est aussi plus que cela. Tourné au plus fort de la saison estivale dans une Venise rayonnante, le film est un tableau impressionniste aux couleurs flamboyantes, empreint du bleu azur de la lagune et du reflet doré des parures vénitiennes. Mais derrière la carte postale surgit la souffrance d'une femme solitaire, à la fois captivée par le charme romantique de la ville et apeurée par son parfum de frivolité voluptueuse. Il est un pied de nez à la bienséance qui voudrait qu'une vieille fille de quarante ans soit privée d'amour. Il est aussi un jeu constant entre l'éblouissement et le doute corrupteur.

Jane s'est constituée une carapace confortée par sa passion du super8 et l'alcool (Cinzano, Bourbon). Le vent chaud de Venise, le chant des gondoliers et la frontale et belle déclaration d'amour de Renato de Rossi en auront raison. Le film oscille entre une promesse souvent renouvelée (la fresque sur Murano dès le premier voyage dans Venise, les rendez-vous de la place saint Marc) et l'échec (la fleur de Magnolia qui s'échappe au bout des doigts).

Le doute corrupteur se marque par des détails, le sot d'ordures balancé dans le canal, la carte postale érotique proposée par le jeune Mauro, la chasse aux jolies touristes par les jeunes italiens, le prix du verre à pied rouge, par la révélation de l'infidélité d'Eddie Yaeger avec la Signora Fiorini, par les enfants cachés de Renato de Rossi.

Comme les rendez-vous de la place saint Marc avaient réussi à vaincre la peur de Jane, les splendides couchers de soleil sur Murano finiront par faire revenir les peurs... irrémédiablement ?

 

Préface de Pierre Berthomieu (8 mn)

Vacances à Venise se situe au beau milieu de la carrière de David Lean. Il est alors le grand cinéaste britannique, révélé dix ans plus tôt par Brève rencontre (1945). Il n'est pas encore le cinéaste hollywoodien à grand spectacle, célébré pour Le pont de la rivière Kwai ou Docteur Jivago.

Vacances à Venise est emblématique de la transition d'une part parce qu'il s'agit du premier film tourné par Lean hors des studios britanniques même si son financement est anglais. Il s'agit d'autre part d'un retour à la couleur, expérimentée dans Heureux mortel (1944) ou L'esprit s'amuse (1945) mais qui ne convenait alors pas au caractère doux amer qu'il recherche pour ses chroniques. Apres dix ans de noir et blanc, Vacances à Venise, exotisme aidant, joue pleinement la carte du technicolor saturé et flamboyant. Jack Hildyard, son nouveau chef opérateur sera aussi celui de son premier film américain, en Scope celui-là : Le pont de la rivière Kwai.

Pour cette chronique intime, le format 1,37 permet sans doute de privilégier l'effet de découverte d'une perspective grandiose lors de l'ouverture d'une fenêtre ou au déboulé d'une rue obscure alors que le Scope impose d'emblée le paysage même si Lean saura toujours garder une dimension intimiste à ses films à grand spectacle.

 

 

 
présente
 
Vacances à Venise de David Lean