Mohsen Makhmalbaf est issu d'un quartier populaire de Téhéran. Et c'est dans cette atmosphère particulière qu'il puisera plus tard les sujets de ses films. Abandonnée dès sa naissance par son père, sa mère se retrouve dans l'obligation de travailler et Mohsen est élevé par sa grand-mère, une femme très pieuse. Elle l'emmène à la mosquée et lui transmet une haute idée d'un islam attachant et chaleureux.

Très jeune, sous l'influence de son beau-père, il milite au sein d'une organisation islamiste qui lutte contre le régime du Shah. A 17 ans, il est incarcéré à la suite d'une attaque contre un commissariat de police et reste emprisonné de 1974 à 1979. En prison, il côtoie des militants de "groupuscules religieux et révolutionnaires de gauche", mais perd ses illusions quant à la création d'une société idéale. Libéré à la Révolution, il estime que la politique ne peut résoudre tous les problèmes culturels et éducatifs et s'oriente vers l'art. Il publie un roman, plusieurs nouvelles et écrit des essais sur le théâtre islamique. Il fonde avec d'autres artistes, le Centre de propagande pour la pensée et les arts islamistes, puis après deux autres romans (Le jardin de cristal -1982, traduit en anglais, et Le bassin du Roi-1983), il s'oriente brusquement vers le cinéma.

II réalise son premier long métrage Nassouah le repentant en 1983, un film maladroit avec un parti pris très religieux. A cette période, Makhmalbaf ne s'était quasiment jamais rendu au cinéma et son fanatisme était tel qu'il se bouchait les oreilles dans la rue pour ne pas entendre de la musique profane.
Il enchaîne néanmoins film sur film avec Deux yeux morts et Fuite entre Diable et Dieu (1984) puis, dans un contexte politique favorable à un renouveau du cinéma en Iran, Boycott (1985), son quatrième film où Valeh le héros, incarne l'engagement religieux de son auteur. Makhmalbaf y révèle une nouvelle maîtrise de l'art cinématographique.

Il s'enferme alors aux Archives du film iranien pour visionner, stupéfait d'admiration, tous les films importants de l'histoire du cinéma de son pays et du reste du monde. II est fasciné par la création d'images, alors que toute présentation des êtres animés est interdite par le Coran. Pur produit de la Révolution islamique, Makhmalbaf commence à incarner paradoxalement son critique le plus implacable. Le camelot en 1987, connaît un véritable succès en Iran et est diffusé dans nombre de festivals internationaux. En trois sketchs, il met en scène des laissés pour compte du système dans des styles néoréaliste, Hitchcockien et Fellinien.

Son film suivant, Le cycliste (1988), remporte encore un grand succès auprès du public et des critiques iraniens. II relate l'épreuve que doit subir pour payer l'hospitalisation de sa femme, un réfugié afghan contraint de tourner en rond pendant une semaine sur sa bicyclette. C'est particulièrement avec ses deux derniers films que Mohsen Makhmalbaf s'impose comme l'un des cinéastes les plus originaux d'Iran avec Abbas Kiarostami, Dariush Mehrjui, Bahram Beyzaï et Kiyânush Ayyari.

La noce des Bénis en 1989, traite des difficultés de réinsertion d'un photographe de presse à son retour du front de la guerre Iran-Irak. Makhmalbaf apporte une force et une violence incroyable au cinéma pour critiquer et dénoncer la misère physique et la dégradation morale d'une société corrompue. En 1990, il tourne Le temps de l'amour en Turquie. Le film qui porte sur une relation entre une femme mariée et un jeune homme fait scandale auprès des intégristes en Iran. Les nuits de Zayanderod est lui aussi interdit de sortie par les autorités qui lui reprochent une certaine déviance par rapport à ses idées religieuses d'origine. Mohsen Makhmalbaf est alors devenu tellement populaire en Iran qu'un homme au chômage, amoureux du cinéma et parfait sosie du réalisateur, usurpe son identité et s'installe dans la villa d'une famille bourgeoise sous prétexte de repérages. Ce fait divers eut un grand retentissement et Abbas Kiarostami en tira le sujet de son fameux Close-up.

Nasseredin Shah, l'acteur de cinéma (1992) est un hommage plein d'humour et d'une grande élégance formelle à l'histoire du cinéma iranien. Il relate le voyage en Europe au début du siècle de Shah Nasseredin qui y découvre le cinéma et importe dans son pays le premier appareil de projection.

Ses deux films suivants Salam Cinéma (1995) et Gabbeh (1996) seront présentés et bien accueillis au festival de Cannes. L'un est une mise en abyme de son propre travail : il y raconte comment des milliers de jeunes candidats répondent à une annonce pour tourner dans un de ses films, l'autre met en scène les déboires de Gabbeh, séparée de force de son amant par son père. Sorti dans une trentaine de pays, ce film a fait de Makhmalbaf l'un des deux cinéastes iraniens (avec Kiarostami) les plus connus et diffusés. Kandahar tourné clandestinement en 2001, emprunte la forme d'un carnet de voyage au coeur d'un pays où l'enfermement, l'emprisonnement de la femme sont symbolisés par les fameux tchadris. Le réalisateur y dresse, quelques mois avant l'actualité guerrière afghane, le constat humain et économique, brut et sans équivoque d'une région.

Alors que l'état iranien commençait à se désengager, à partir de 1997, de la production cinématographique au profit du secteur privé, le réalisateur crée la Makhmalbaf Film House, corporation familiale des plus dynastiques. Elle a entre autres produit La pomme et Le tableau noir (récompensé à Cannes en 2000) de Samira Makhmalbaf, sa fille et Le jour où je suis devenue une femme de Marzieh Meshkini, sa femme.

Source : Dilap

Filmographie :

1983 Nassouah le repentant
  (Tobeh Nosuh)
   
1984 Fuite entre Diable et Dieu
  (Este'aze)
   
1984 Deux yeux morts
  (Do Cheshman Beesu)
   
1985 Boycott
  (Baykot)
   
1987 Le camelot
 

(Dastforoush). Avec : Zohreh Sarmadi, Esmail Soltanian, Morteza Zarrabi, Mahmod Basiri. 1h35.

Ce film en trois épisodes, produit par le "bureau artistique de l'organisation pour la propagande de la pensée islamiste", donne trois aperçus des entrailles de la pauvre­té urbaine en Iran : un couple à la recherche d'une personne pour adopter leur nou­veau-né, la solitude d'un homme mentalement déficient ayant sa mère à charge et l'histoire d'un jeune contrebandier accusé d'avoir livré ses comparses à la police. Même si chaque épisode raconte une histoire différente, ils abordent tous les trois la notion religieuse de la prédestinée.

   
1987 Le cycliste

 

(Bicycleran). Avec : Moharram Zaynalzadeh (Nasim), Samira Makhmalbaf, Mohammad Reza Maleki, Esmail Soltanian, Firouz Kiani. 1h15.

Nassim, refugié afghan en Iran, a besoin d'argent pour faire soigner sa femme malade. Il s'engage dans un pari fou : pédaler pendant une semaine sur une bicyclette.

   
1989 La noce des bénis

 

(Arousi-ye Khouban)
   
1990 Le temps de l'amour
  (Nobat e Asheghi)
   
1991 The nights of Zayandeh-Rood

 

(Shabhaye Zayendeh-Rood)
   
1992 Il était une fois, le cinéma

 

(Nassereddin Shah, Actor-e Cinema)
   
1993 Images from the Ghajar Dynasty
   
   
1993 The actor
  (Honarpisheh)
   
1995 Salaam Cinema
   
   
1996 Madresei keh baad bord
 
   
1996 Gabbeh

Avec : Shaghayeh Djodat (Gabbeh), Abbas Sayah (l'oncle), Hossein Moharami (un vieil homme), Rogheih Moharami (une vieille dame), Parvaneh Ghalandari. 1h15.

Dans le sud-est de l'Iran, une tribu nomade spécialisée dans le tissage des Gabbeh, sorte de tapis persan, est en train de disparaître. Au bord de la rivière, une vieille femme semble converser avec le fabuleux tapis, des motifs duquel apparaît une jeune fille nommée Gabbeh, qui commence à raconter son histoire d'amour.

   
1996 A Moment of Innocence

 

(Nun va Goldoon)
   
1998 Le silence

(Sokout). Avec : Tahmineh Normatova (Khorshid), Nadereh Abdelahyeva (Nadareh), Goibibi Ziadolahyeva (la mère de Khorshid), Araz M. Shirmohamadi. 1h20.

Khorshid, un garçonnet de 10 ans, vit avec sa mère dans un village du Tadjikistan. Il est aveugle. Nadereh, la petite protégée du luthier chez qui il travaille, l'accompagne chaque jour. Elle est son regard. Khorshid lui, vit et découvre la vie au travers des bruits de la ville, qui l'entraînent parfois jusqu'à le perdre.

   
1999 The door
  Segment de Kish Tales (Ghessé hayé kish)
   
2000 Testing Democracy

 

Segment de Tales of an Island
   
2001 Kandahar

(Safar e Ghandehar). Avec : Niloufar Pazira (Nafas), Hassan Tantai (Tabib Sahid) et Sadou Teymouri (Khak). 1h25.

Nafas est une jeune journaliste afghane qui s'est réfugiée au Canada durant la guerre civile des talibans. Elle reçoit une lettre désespérée de sa petite soeur, restée là-bas, et qui a décidé de mettre fin à ses jours avant la prochaine eclipse de soleil. Nafas part donc secourir sa soeur à Kandahar et tente, pour ce faire, de franchir la frontière irano-afghane.

   
2002 The afghan alphabet
  Alefbay-e afghan
   
2005 The chair
   
   
2005 Sex & Philosophy
   
   
2006 Scream of the ants
   
   
2009 The man who came with the snow
   
   
   
   

Retour à la page d'accueil

né en 1957
25 films
   
   
1