Une visite au Louvre
2003
Genre : Documentaire
Tiré de Ce qu'il m'a dit..., dialogue entre Paul Cézanne et Joaquim Gasquet, chapitre du livre Cézanne (1921) de Joachim Gasquet. 0h44.

Un panoramique sur le Louvre de jour.

Série 1 : commentées en voix off par les exigences et les questionnements passionnés de Cézanne sur son art : treize plans. Un plan noir pour dire qu'il n'aime pas les primitifs, que Giotto et Cimabue, qu'il connaît mal, l'ennuient. Deux plans pour dire l'élan de La victoire de Samothrace, trois plans pour exprimer son dégoût pour La source de Ingres, L'assassinat de Marat et La remise des aiglons de David. Deux plans pour dire que tout commence avec les Vénitiens, avec Véronèse et ses Noces de Cana, un plan pour un autre tableau attribué à Véronèse puis deux plans pour Le concert champêtre du Titien et La cuisine des anges de Murillo. Deux plans enfin pour Le couronnement de la Vierge du Tintoret, son tableau préféré.

Un plan fixe du vent dans les arbre et deux péniches passant sur la Seine, vues du musée

Série 2 : neuf plans Un plan pour revenir sur Ingres (L'apothéose d'Homère) et dire son admiration de Delacroix (Femmes d'Alger dans leur appartement) puis L'Entrée des croisés dans Constantinople (mal conservé comme Le radeau de la Méduse alors que Femmes d'Alger a gardé toute sa splendeur. Deux plans pour finir par Courbet : Rut du printemps, combat de cerfs et L'enterrement à Ornans que le Louvre ne voulait pas exposer. Si cela avait du se prolonger Cézanne proposait de brûler le musée national.

Plan final : un panoramique à 360° dans les bois de Buti.

Il existe au moins deux versions de ce film. Les vingt-cinq plans durent 44 minutes dans la première version et 49 minutes dans la seconde : le premier plan et le plan intermède sur la Seine, filmés à des moments différents durant un peu moins longtemps. Pour le reste la reprise fait défiler les mêmes plans sans que je n'ai réussi à percevoir de différence dans le commentaire lu par Julie Koltaï. Selon le souhait des deux réalisateurs, les spectateurs qui le souhaitent ont toutefois la possibilité de n'assister qu'à l'une ou l'autre version. Ce serait dommage...

Difficile de faire plus simple, élégant et heureux que ces vingt-cinq plans pour écouter la parole de Cézanne. 15 ans après Cézanne, déjà inspiré par les conversations de Joaquim Gasquet avec le peintre, une visite des oeuvres d'autres artistes.

L'investissement des Straub réside tout entier dans le fait de reproduire une parole aussi exaltée que celle du jeune Cézanne, celui de la tentation de saint Antoine plus que celle de celui qui voudra représenter le monde à l'aide du plan de la sphère et du cône. En ce sens le choix de Julie Koltaï, féminine et furieuse est tout à fait remarquable

Le plan final peut probablement s'interpréter comme un équivalant cinématographique du tableau de Courbet : Rut du printemps, combat de cerfs. Cézanne minimise le réalisme de Courbet (qu'il attribue à l'influence néfaste de Proudhon) pour le maintenir dans le romantisme en faire celui qui a réintroduit la nature dans la peinture, en l'occurrence celle des sous-bois de Buti où ils ont filmé tous leurs films italiens depuis Ouvriers et paysans. En filmant une petite rivière semblable à celle que l'on voit dans le tableau de Courbet, les Straub pourraient affirmer tenir la même position : être des réalistes profondément romantiques

Cézanne fut abordé en 1895 par Joachim Gasquet un poète aixois de vingt-trois ans, fils d'un de ses amis d'enfance, enthousiasmé par els deux toiles du peintre qu'il venait de découvrir dans une exposition locale. Pour un Cézanne de cinquante-sept ans, abreuvé de sarcasme et toujours inquiet à l'égard de son œuvre, Gasquet sera son confident de prédilection. Comme le souligne François Solesmes dans sa préface au Cézanne de Joachim Gasquet "la gloire de l'artiste chez Cézanne ne doit rien qu'à lui-même ; en revanche, la figure de l'homme avec ses dilections et ses répugnances, ne s'imposerait pas à nous avec autant de netteté si un jeune homme, simple amateur de peinture, ne s'était montré un portraitiste accompli."

"Toute les fois que je le pourrai, je transcrirai les paroles même de Cézanne. Je n'inventerai rien - que l'ordre dans lequel je les présente. Après de longues méditations, je me suis décidé à les grouper toutes pour mieux en marquer la portée, en trois grands dialogues. Autour de trois conversations, imaginaires, entre cent autres que j'eus en réalité avec lui, dans les champs, au Louvre et dans son atelier, j'ai ramassé tout ce que j'ai pu recueillir et tout ce dont j'ai pu me souvenir de ses idées sur la peinture : il parlait, et je crois qu'il pensait, ainsi."

 

critique du DVD
Editeur : Montparnasse, avril 2009. Format : 1.37.
critique du DVD

Coffret Straub - Huillet, volume 4.

DVD 1 : Amerika - Rapports de classes. DVD 2 : Cézanne, Une visite au Louvre. DVD 3 : En rachâchant, Lothringen, Humiliés

 

 

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Thème : Le cinéma dans la peinture
dvd aux Editions Montparnasse