Femmes de la nuit

1948

Voir : Photogrammes
Genre : Drame social

(Yoru no onnatachi) Avec : Kinuyo Tanaka (Fusako Owada), Sanae Takasugi (Natsuko Kimijima).

À Osaka, trois ans après la défaite, Fusako Owada va vendre au marché aux puces quelques affaires usées ; la vendeuse d'habits essaie de la convaincre de se prostituer, mais Fusako est offensée.

À la maison, où elle soigne son très jeune fils tuberculeux, sa belle-sœur Kumiko lui annonce qu'elle a entendu à la radio qu'elle doit contacter le patron de son mari pour avoir des nouvelles de celui-ci longtemps porté disparu. Elle y apprend hélas que son mari est mort. Fusako reçoit les condoléances d'usage et une vague proposition de travail auprès du patron. Plus tard, son fils meurt.

Dans une rue commerçante, Fusako accompagnée de Kumiko, croise sa sœur cadette Natsuko, exilée en Corée pendant la guerre et qui avait perdu sa trace après la défaite. Celle-ci lui apprend que leurs parents sont morts et demande à venir habiter chez elle. Son patron Kuriyama arrive chez elle sur ces entrefaites et ils sortent ensemble dans la boite de luxe où danse Natsuko.

Kuriyama essaie de séduire Fusako qui se dérobe attendant une proposition plus sérieuse de sa part. Mais, après une alerte à la police, à laquelle elle échappe de justesse, elle surprend Kuriyama et Natsuko ensemble en rentrant chez elle.

Fusako, trompée dans ses espoirs, pense alors qu'elle n'a plus qu'à retourner au marché aux puces et à la prostitution.

Alors qu'elle a disparu depuis quelques jours, Kumiko débarque chez les deux sœurs déclarant à Natsuko avoir volé de l'argent à sa famille et vouloir vivre avec elles. Natsuko échoue à lui faire entendre raison et Kumiko s'en va à l'aventure dans les rues d'Osaka. A la gare, elle est repérée par un voyou qui se dit étudiant et qui prétend l'aider. Il la fait boire pour abuser d'elle et la voler. Kumiko, dépouillée de tout jusqu'à ses vêtements par le clan des prostituées pillardes, se laisse aller à la prostitution.

Natsuko apprend de son côté que sa sœur fait le trottoir et va à sa recherche ; mais elle est arrêtée par la police et conduite au poste. Fusako, reconnaissant la voix de sa sœur, prend sa défense. Elle apprend par une doctoresse que Natsuko est syphilitique et attend un enfant, qu'elle décide d'avoir malgré le désintérêt de Kuriyama qui est d'ailleurs immédiatement arrêté pour trafic d'opium.

Fusako, écœurée par tout ce qui arrive, se sachant elle-même syphilitique retourne se prostituer afin de contaminer tous les hommes de Tokyo. En voyant l'affiche d'une maison religieuse qui s'occupe des femmes en détresse, Elle décide toutefois de se soigner pour aider sa sœur à accoucher de l'enfant de Kuriyama. Hélas celui-ci est mort-né.

Fusako retourne à la prostitution. Un jour elle reconnaît Kumiko en la jeune prostituée que s'apprêtent à couvrir de coups ses amies prostituées. Elle décide de l'aider et de la tirer de cet enfer. Mais les autres prostituées ne veulent pas de cet abandon, Elles la battraient à mort si d'autres prostituées ne partageaient pas le discours de Kumiko qui appelle à la fin de l'enfer de la prostitution. Sous un vitrail représentant la Vierge Marie et l'enfant Jésus, Fusako et Kumiko parviennent à s'échapper.

Le film ne possède ni l'ampleur tragique ni la beauté plastique des autres films de Mizoguchi. C'est un film expressionniste où s'affrontent le bien et le mal dans une démesure de bruits de cris et de discours opposés.

Le film connaît de brusques sautes plastiques. Amorcé comme un constat néoréaliste sur le japon détruit de l'après-guerre, il flirte avec une spiritualité proche de Pasolini pour décrire la chute de Kumiko. Il trouve ensuite une étonnante symbolique théâtrale opposant l'enfer (les pavé et la terre noire dans laquelle semblent engluées les prostituées, les arbres dénudés, les ruines de l'ancien monde) et le paradis (le vitrail miraculeusement intact de la vierge à l'enfant).

La séquence de la maison de redressement avec musique religieuse d'orgue pendant le discours moralisateur du docteur-directeur est chargée d'une discrète ironie : une ellipse renvoie brutalement Fusako à la prostitution. C'est en allant au bout de l'enfer qu'elles s'en sortiront peut-être.

Jean-Luc Lacuve le 28/01/2007

critique du DVD
Editeur : Carlotta, juin 2007. Langue : japonais. Sous-titres : français. Son : mono. Format : 1,37.
Coffret Mizoguchi les années 40

Coffret 3 DVD, 5 films : DVD1 : Cinq femmes autour d'Utamaro. DVD2 : L'épé Bijomaru et L'amour de l'actrice Sumako. DVD3 : Les femmes de la nuit et Flamme de mon amour.