La bonne année

1973

Avec : Lino Ventura (Simon), Françoise Fabian (Françoise), André Falcon (Le bijoutier), Charles Gérard (Charlot), Claude Mann (Claude), Mireille Mathieu (Elle-même). 1h55.

En prison depuis près de six ans en tant qu'auteur d'un hold-up, Simon est libéré à la veille de la nouvelle année. En vérité, les autorités vont continuer à surveiller le gangster pour qu'il les mène au butin du vol – des bijoux qui avaient disparu avec le complice de Simon, Charlot... En cette soirée de la Saint-Sylvestre, donc, Simon se retrouve libre, et son premier réflexe est de se rendre chez la femme qu'il aimait à l'époque du hold-up : Françoise.

C'était il y a six ans : Simon avait fait la connaissance de Françoise à Cannes, car la jeune femme était propriétaire d'une petite boutique d'antiquités jouxtant la bijouterie Van Cleef, que Simon et son complice Charlot avaient précisément l'intention de dévaliser. Tout en répétant et en préparant minutieusement le hold-up, Simon est donc amené à voir Françoise presque tous les jours. Et, comme Françoise est une femme très séduisante, Simon l'invite à sortir, à dîner... bref, il tombe amoureux d'elle ! Tout pourtant les sépare : Françoise est une femme très cultivée, qui parle art et littérature, tandis que Simon, forcément, reste toujours axé sur le concret et l'aspect matériel des choses. Tout en courtisant Françoise avec assiduité, Simon continue à mettre au point le hold-up avec Charlot : il se déguise en vieillard milliardaire et se lie d'amitié avec le bijoutier, de façon à ce que ce dernier les laisse entrer un soir après l'heure de fermeture. Mais, le fameux soir, Simon reste prisonnier dans la boutique à cause d'un système de sécurité imprévu ! Charlot, lui, réussit à s'enfuir de justesse avec les bijoux...

Six ans plus tard, ce n'est plus la même Françoise que Simon retrouve : elle est plus froide, plus pragmatique, n'a que des liaisons superficielles. Mais Simon, par sa solidité et sa ténacité, parviendra à la reconquérir, de même qu'il retrouvera Charlot... et le magot !

Simon est un homme qui sait rester très concret : il séduit en prétendant avoir acheté une table 40 000 francs, qu'il a, en fait, acheté 30 000 et que Françoise était contente de revendre 35 000. Ce matérialisme goguenard est en adéquation avec la morale matérialiste du gangster : "La psychologie, c'est l'art de posséder les gens avant qu'ils vous possèdent" et son autosatisfaction : "Qu'est ce qu'un homme ? C'est quelqu'un qui va jusqu'au bout".

Bien plus originale, la liberté dont fait preuve Françoise, aussi bien intellectuelle que sexuelle. En adéquation avec la liberté suivant les années 68, elle affirme : "La culture aujourd'hui, c'est les faits divers, les manifs, la rue." Simon ne devra pas s'offusquer qu'elle ait pris un amant en l'attendant : "C'était ma façon à moi de ne pas mourir, ma façon de t'attendre."

Formellement, on notera les quelques flashes mentaux où Simon imagine ce qu'il aunait pu faire ou ce qui pourrait se passer. Le passé (la séduction) est en couleur, le présent (plus incertain) en noir et blanc. Le début du film est la fin de Un homme et une femme (1966) que projette le directeur de la prison à ses prisonniers... qui sifflent le film.

Jean-Luc Lacuve le 05/01/2017