Ridicule

Patrice Leconte
2000

Genre : Drame social

Avec : Charles Berling (Le baron Ponceludon de Malavoy), Jean Rochefort (Bellegarde), Fanny Ardant (Madame de Blayac), Judith Godrèche (Mathilde), Bernard Giraudeau (L'abbé de Villecourt), Bernard Dhéran (Montalieri), Carlo Brandt (Milletail), Jacques Mathou (Abbé de l'Epée), Urbain Cancelier (Louis XVI). 1h42.

« Dans ce monde (c'est-à-dire à la cour), un vice n'est rien mais un ridicule tue. »

En 1780, le baron Grégoire Ponceludon de Malavoy jeune aristocrate provincial désargenté et candide, arrive à la Cour de Versailles désirant demander au roi Louis XVI les moyens d'assécher les marais de la Dombes, sources d'épidémies qui déciment les familles de ses paysans. Faute de pouvoir être reçu en audience, il tente de faire carrière en menant une vie mondaine qui lui permettrait de se faire remarquer. Il participe à cette vie de cour où l'honneur et les mots d'esprit sont le centre d'une effervescence raffinée et décadente.

Le marquis de Bellegarde lui prête main-forte, en lui donnant le gîte et en l'introduisant à la Cour où Grégoire fait montre d'un talent que redoutent les courtisans déjà installés. En conséquence, des intrigues se nouent entre un favori éphémère du roi, l'abbé de Villecourt, sa maîtresse, Madame de Blayac (qui devient en même temps la maîtresse du baron), Grégoire de Ponceludon et Mathilde de Bellegarde, fille du marquis.

Le jeune baron est confronté à de nombreuses intrigues avant de pouvoir rencontrer le roi en privé, une rencontre « fortuite » dans les jardins du château de Versailles étant arrangée par ses protecteurs. Invité à une démonstration de tir d'un nouveau canon, le baron, qui vise une charge d'ingénieur, propose une amélioration de la pièce. Cela vexe un officier d'artillerie qui l'insulte. Pour ne pas perdre la face, le baron est obligé de provoquer l'officier en duel et le tue. Aux yeux de tous, Mathilde de Bellegarde, qui assiste au duel, se jette dans les bras du baron. C'est au tour de Madame de Blayac de perdre la face : toute la Cour sait que son jeune amant l'a abandonnée et se réjouit de sa déchéance. Ce faisant, le baron échoue dans son projet d'obtenir une charge, car le roi refuse alors de recevoir « pour le moment » un homme qui a tué l'un de ses officiers.

Grégoire, invité à une réception où on le fait trébucher (croc-en-jambe) au cours d'une danse de manière à le ridiculiser, tare impardonnable, quitte Versailles avec Mathilde après avoir prononcé une diatribe dans laquelle il dénonce l'absurdité et le "ridicule" du combat de courtisans, pouvant faire plonger les humiliés dans la misère la plus sombre.

Quelques années plus tard, en 1794, alors que la révolution a contraint nombre de nobles à l'exil, le marquis de Bellegarde alors réfugié en Grande-Bretagne, semble nostalgique de cette période. Toujours fidèle à sa volonté d'assainir les terres de Dombes, le citoyen Grégoire Ponceludon (il a renoncé à la particule) obtient du gouvernement révolutionnaire, en sa récente qualité d'ingénieur hydrographe du Génie civil, de réaliser cette importante entreprise aux côtés de Mathilde, devenue son épouse.

A travers les aventures de Grégoire Ponceludon de Malavoy, issu d'une famille d'ancienne noblesse tombée dans la précarite, une étude de la cour de Louis XVI et ses antichambres à Versailles en 1780, ou déjà la spiritualité avait pour ennemi mortel le ridicule.

On notera la présence d'un personnage historique assez intéressant vis-à-vis des thèmes du langage, de l’expression et de la compréhension au travers de Paul, l'élève sourd du marquis de Bellegarde, qui est envoyé auprès de l'abbé Charles-Michel de L'Épée. L'abbé de L'Épée fut un des premiers à s’intéresser à la question de l'enseignement public pour les sourds, en ménageant une place primordiale à la langue des signes comme langue d'instruction.

La fille du marquis de Bellegarde, incarnée par Judith Godrèche, personnage typique du siècle des Lumières, férue de sciences et de techniques, s'est embarquée dans la création d'un scaphandre primitif (elle manque de se noyer en le testant dans un puits), alimenté par une pompe à soufflets, dénommé « machine hydrostatergatique ». Ce détail est historiquement correct, le modèle réel étant le scaphandre de Fréminet (1774).