3 B : Une vague nouvelle

1998

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0h27

Comme l'indique son titre, Une Vague nouvelle tente de remonter aux origines de la Nouvelle Vague. L'épisode s'ouvre par un dialogue sur la vérité, présentée comme ayant la propriété de n'être pas transmissible.

La Nouvelle Vague est contemporaine de son article "Montage mon beau souci", phrase qui revient également dans les autres épisodes, et l'on sait, en voyant des extraits d'Alphaville mis en rapport avec Les Trois Lumières de Fritz Lang, combien le montage (image d'Eisenstein) est essentiel pour Jean-Luc Godard. Il nous rappelle ici que la Nouvelle Vague a succédé au pâle cinéma de l'après-guerre ("le cinéma français crève") et s'est construit en regard des grandes figures telles que Alfred Hitchcock : des extraits de Vertigo sont alors mis en rapport avec Les Quatre cents Coups.

Si Godard se souvient de la Nouvelle Vague, c'est surtout dans son rapport avec la Cinémathèque Française. En effet, "les enfants terribles" qui ont participé à la Nouvelle Vague se sont formés auprès du Musée du cinéma de Langlois, d'où la métaphore de Godard qui qualifie le cinéma de "musée du réel". Installé à son pupitre et mimant les gestes d'un chef d'orchestre, Jean-Luc Godard a la prétention de faire à son tour des "musées du réel", les numérotant ici de 1 à 6 , comme les six derniers épisodes des Histoire(s). La relation de Jean-Luc Godard à la Cinémathèque est vécue ici comme religieuse, de l'ordre de la révélation : "Un soir nous nous rendîmes chez Henri Langlois et alors la lumière fut." A l'époque, seule la Cinémathèque montrait "le vrai cinéma", "celui qui ne peut se voir" (images de Frank Borzage…). "Nous fûmes donc éblouis davantage que Le Greco en Italie […] Nous étions sans passé et l'homme de l'avenue de Messine nous fit don de ce passé, métamorphosé en présent". On comprend alors combien les Histoire(s) du cinéma doivent à cette conception d'une histoire faite de confrontations des films.

Godard doit reconnaitre que la Nouvelel Vague est passée: "Notre seule erreur fut alors de croire que c'était un début, que Stroheim n'avait pas été assassiné, que Vigo n'avait pas été couvert de boue, que Les Quatre cents Coups continuaient alors qu'ils faiblissaient." Et lorsqu'à la fin de l'épisode une voix féminine lui demande : "Quand même, Becker, Rossellini, Melville, Franju, Jacques Demy, Truffaut, vous les avez connus !", il répond avec le temps du passé : "Oui, et c'était mes amis."

Le choix est ici surprenant et révélateur de sa position actuelle : on peut reconnaître des extraits de Grandeur et décadence d'un petit commerce de cinéma, de King Lear ou de One plus one, mais rien de A bout de souffle ni de Pierrot le fou.