Les garçons de la bande
1970

Dans un appartement de l'Upper East Side de New York, Michael, homosexuel cynique au train de vie princier, organise une fête d'anniversaire pour son ami Harold. Michael révèle à son amant, Donald, que toutes ces fêtes l'épuisent et qu'il aimerait mettre un peu d'ordre dans sa vie au moment où il doit accepter une période de chômage. Il a ainsi décidé d'arrêter de boire et de fumer pour éviter l'impression de dégoût de soi qui surgit au lendemain des gueules de bois. Michael doit en outre accepter un invité de dernière minute : son ami de fac Alan, homme marié qu'il soupçonne d'être un "homo refoulé".

Les premiers convives arrivent : Hank, professeur de mathématiques, jaloux de son jeune amant, Larry. Ils sont accompagnés d'Emory qui se complet dans des poses efféminées, extravagantes et maniérées mais qui assure l'ambiance et même le repas avec ses lasagnes à la marijuana. Michael s'aperçoit immédiatement que Donald et Larry ont été amants. Il demande à tous de ne pas afficher leur homosexualité quand Alan passera prendre un verre. Il n'a fait son coming out qu'après ses années d'université et teint à garder de bonnes relations avec lui et sa femme, Fran.

C'est au tour de Bernard, un jeune noir, d'arriver mais, Harold tarde à apparaître. Puis c'est Alan qui téléphone pour dire qu'il ne viendra pas. Mais au moment où la fête bat son plein, il sonne à la porte. Hank va lui ouvrir et si le courant passe entre les deux hommes, il n'en est pas de même avec Emory qui ne fait rien pour respecter la règle de discrétion demandée par Michael. Qui plus est, Larry se montre jaloux de la complicité naissante entre Hank et Alan.

Comme l'atmosphère se fait électrique, Michael entraine Alan dans la chambre pour discuter tranquillement avec lui. Alan s'indigne des manières efféminées d'Emory sans révéler à Michael pourquoi il est en crise et tenait tant à le voir. Michael le laisse se remettre et rejoint ses amis.

C'est alors que surgit le jeune Tex, habillé en cow-boy. C'est le "cadeau" d'Emory pour Harold, un jeune prostitué... qui est arrivé en avance au cas où cela lui permettrait de s'échapper plus tôt. Alan rejoint le groupe et va s'éclipser quand Emory le provoque une fois de trop : Alan crie son dégoût devant cette "pédale homosexuelle" qu'il cogne de plusieurs coups avant d'être maitrisé par le groupe. Effondré il rejoint la chambre alors que sonne Harold arrivé très en retard. Comme Michael, déstabilisé, le lui reproche, celui-ci avoue sa difficulté grandissante à se faire beau pour une soirée. Son humeur sarcastique alourdit encore l'atmosphère.

Le repas, le déballage des cadeaux ressoude pourtant le groupe. Mais la pluie entre en scène et, lorsqu'Alan descend une nouvelle fois pour s'en alle,r Michael le retient au salon pour participer au jeu homo dont il édicte les règles : le gagnant sera celui qui réussira à téléphoner à celui qu'il aime vraiment et à lui déclarer sa flamme. Bernard s'y résout le premier et ressent du dégoût à déranger la mère d'un ami qui ignorait tout de cet amour platonique qu'il n'avoue d'ailleurs pas. Emery téléphone à son ancien professeur dont il fut amoureux mais refuse de donner son nom. Hank laisse un message d'amour pour Larry. Celui-ci s'énerve et réclame son besoin de liberté pour aimer Hank. Ce dont celui-ci, convaincu de l'amour de Larry, finit par accepter. Harold refuse de jouer.

Michael, excédé, tente de faire avouer son homosexualité refoulée à Alan, lui révélant tous les indices qui jadis lui avait fait croire à son penchant contrarié. Il le force aussi à téléphoner. Mais c'est à sa femme que s'adresse le message d'Alan. Celle-ci parle avec Michael qui la connait bien et tenait à son amitié. Morfondu de s'être trompé sur le sens de la visite d'Alan, sans doute une simple brouille conjugale, Michael s'effondre dans les bras de Donald une fois ses invités partis. L'alcool, exacerbant ses frustrations, l'a une nouvelle fois rendu ignoble. Il se promet de cesser. Donald l'y encourage mais Michel redevient aussitôt cynique : "Montrez moi un homosexuel heureux ; je vous montrerai son cadavre". Il s'en va assister à la messe de minuit pour calmer ses angoisses.

En adaptant un grand succès de Broadway, William Friedkin livre l'un des premiers jalons du cinéma gay.

Une pièce à succès des années 70 qui tombe dans l'oubli dans les années 80

C'est le producteur de Qui a peur de Virginia Woolf ?, Richard Barr qui accepte de produire la pièce de Mart Crowley alors inconnu. Elle est présentée en 1967 dans une petite salle de New York d'une centaine de places. Dès le lendemain de la première, le public gay afflue. Ce cœur de cible de la pièce est bientôt dépassé et la pièce s'installe Off-Broadway pour 1001 représentations. Elle sera jouée dans plusieurs capitales. Elle devient ensuite trop noire au moment de l'émancipation gay et tombe dans l'oubli. Elle ne redevient à la mode qu'en 1996, lors de sa reprise à New York.

Mart Crowley refuse plusieurs offres d'Hollywood. Il veut produire, adapter et garder les acteurs de la pièce. Il ne peut toutefois garder Robert Moore, le metteur en scène à la réalisation qui n'avait, pas plus que les acteurs, aucune expérience de cinéma. Mart Crowley avait vu L'Anniversaire d'après Harold Pinter monté par William Friedkin et il lui propose la réalisation.

Une mise en scène qui garde les atouts de la pièce

Friedkin propose d'abord un instantané de Upper East Side de 1967, une rapide présentation des personnages dans leurs occupations quotidiennes, puis l'atmosphère trépidante dans un cadre clair pour la préparation de la fête par Donald et Michael. Progressivement, la lumière s'assombrit. Le film reste en huis clos dans les trois pièces principales de l'appartement de Michael, la terrasse que les invités désertent bientôt à cause de la pluie, le salon où se déroulent le jeu cynique des appels téléphoniques et la chambre où s'isole un moment Alan.

Le film est tourné dans l'appartement de Tammy Grimes, une actrice connue de Friedkin. Les décors sont reconstitués en studio pour les scènes nocturnes. Friedkin exige des répétitions même si les neuf acteurs ont joué la pièce ensemble durant trois ans afin de les placer dans des cadres d'ensemble aux angles variés avec parfois quelques personnages isolés .Friedkin use d'un montage dynamique et rapide sur un rythme qui n'a rien d'artificiel vu la complexité psychologique des personnages.

Tous les personnes ont en effet une psychologie complexe, fouillée et intéressante car fait d'ombres et de lumière, de joies et de frustrations. Le retard d'Harold, l'arrivée inopinée d'Alan et l'alcool vont progressivement déstabiliser le groupe qui va s'enfoncer dans un jeu cynique dont seuls les plus aimants et sincères s'y retrouveront, Alan, Hank et Larry. Les autres devront faire avec les frustrations de la vie.

 

Test du DVD

Editeur : Carlotta-Films, février 2013. Nouveau master restauré, version originale, sous-titres français. 17 €

Suppléments : La bande-annonce. Acte 1 : La Pièce : Appuyé par de nombreux témoignages, le dramaturge Mart Crowley se souvient de la génèse et du succès inattendu de sa pièce (13 mn). Acte 2 : Le Film : L'adaptation cinématographique des Garçons de la bande. Acte 3 : "40 ans de Garçons de la bande" : Un regard rétrospectif sur la réception du film et son héritage (5 mn).


Retour à la page d'accueil

(The boys in the band). Avec : Kenneth Nelson (Michael), Frederick Combs (Donald), Cliff Gorman (Emory), Laurence Luckinbill (Hank), Keith Prentice (Larry), Peter White (Alan McCarthy), Reuben Greene (Bernard), Robert La Tourneaux (Cowboy Tex), Leonard Frey (Harold). 1h58.

dvd
Voir : Photogrammes
Genre : Portrait d'hommes