Un souvenir d’archives

2021

Avec : Isabelle Ullern, Pascale Butel. 0h27.

En l’abbaye d’Ardenne, dans la salle de lecture de l’Institut Mémoires de l’Édition Contemporaine (IMEC), philosophe et chercheuse, ouvre une à une les boîtes contenant les archives de Sarah Kofman qui écrivit notamment L'enfance de l'art,  une interprétation de l’esthétique freudienne (1985) et Rue Ordener, rue Labat (1994) évoquant son enfance juive avant puis sous l'Occupation, la déportation de son père et son terrible sort d'enfant caché. Elle se suicida peu après cette publication, laissant ses étudiants sidérés.

Des gros plans des mains ou du visage d'Isabelle Ullern aux voûtes de l'abbayeaux voûtes de l'abbaye, les cadres flous disent l'état d'hytpnose de la chercheuse, à l'affut d’un signe, d'un état qui a précédé le livre qui l'a touchée ; absorbée par le détail comparatif, Isabelle Ullern est parfois récompensée de son état d'immersion. La main écrit ce que la bouche absorbe; hypnose; matériaux de rêverie profonde. C'est une addiction, le danger de sombrer en fascination, dans la curiosité insatiable. Il y a heureusement, dit-elle, l'interruption par l’extérieur : les repas, la fermeture, le week-end.

Isabelle Ullern ose ouvrir les cartons des notes personnelles, répertoire  dessins, agendas sur les années 80-83 et 92-94, , la semaine de sa mort : jeudi 13, vendredi 14 samedi 15  "institut Goethe" ; 17 octobre indiqué "la rentrée" et rien après. Elle a l'Impression d'être indiscrete, loin de la philologue sérieuse. et puis c'est la découverte d'un document ahurissant en état d’occupation : document délirant et effectif. En 1942, son père, rabbin, demande pour Sarah, un acte de nationalité française à la prefecture. C'est quelque mois avant la rafle du veld’hiv alors que, depuis octobre 40 existent les restrictions sur le statut des juifs et le port de l'étoile jaune. Le père, "ramassé" (selon le terme de la police française) chez lui le 16 juillet 1942sera déporté et assassiné à Auschwitz. La mère de Sarah l'élévera avec ses cinq autres enfants, isolée dans Paris.

Christophe Bisson a réalisé en 2014 Sarah (K) documentaire autour des dessins de Sarah Kaufman (1934-1994), qui fut sa professeure de philosophie en 1993. C'est donc ici une autre manière d'aborder le souvenir de Sarah Kaufman; cette fois autour des archives déposées sur les étagères de l'abbaye d’Ardennes et du travail passionné d'Isabelle Ullern, philologue hyptnotisée par son sujet d'étude.