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Sacre de l'empereur Napoléon Ier

1807

Sacre de l'empereur Napoléon Ier et couronnement de l'impératrice Joséphine dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 2 décembre
Louis David , 1806-1807
Huile sur toile 621 cm X 979 cm
Le Louvre, Paris

Dans ce tableau commandé par Napoléon 1er, David met en scène le caractère fastueux du Sacre et son message politique et symbolique. Témoin oculaire de la cérémonie, il en rendra avec réalisme la foule chamarrée mais il devra aussi répondre aux intentions de l’Empereur. Une fois en atelier, il devra concilier valeur documentaire et solutions artistiques. Il relève ainsi le défi de réaliser un ouvrage monumental à la gloire de l’événement et de l’inscrire, comme une œuvre à part, dans l’histoire de la peinture.

Un double couronnement

Paré de la gloire militaire depuis les campagnes d’Italie et d’Egypte, Napoléon avait le pouvoir absolu depuis le coup d’état du 18 Brumaire. Proclamé  Empereur en mai 1804, il organise son sacre le 2 décembre de la même année à Notre-Dame de Paris pour affirmer sa légitimité. Il s’ancre ainsi dans la tradition monarchique et catholique française. Bien plus, comme Charlemagne 1000 ans plus tôt, il était sacré empereur par un pape. Cependant, pour marquer son indépendance vis-à-vis de l’Eglise, Napoléon se couronne lui-même, face à l’assistance et non au maître-autel. David le peint d’abord dans cette attitude d’auto - couronnement et le représente finalement couronnant l’Impératrice. Ce geste donne de l’Empereur une image moins autoritaire et plus noble : celle d’un « chevalier français », dira t-il.

Alliance de l’Histoire et de l’Art

Pour l’ordonnancement général, David s’est inspiré du Couronnement de Marie de Médicis de Rubens (au Louvre). Il a étudié la cérémonie sur place et a fait poser la plupart des participants. Dans l’atelier aménagé  à cet effet, il recompose la scène à l’aide de maquettes en carton et de figurines en cire."Aussi beau que Rubens !'', disait Géricault parlant du Sacre. Mais ici, l'animation baroque fait place à un parti pris de rythmes verticaux qui donnent à l'oeuvre sa solennelle grandeur.

David use avec une maîtrise consommée de procédés nouveaux pour lui : éclairage contrasté groupant des masses heureusement distribuées, empâtements, coloris sonore. Le peintre distingue les personnages essentiels en les plaçant au centre et en les éclairant d’un faisceau de lumière. Ainsi l’arcade forme autour du couple impérial un cadre solennel et la foule les entoure, tel un écrin scintillant. A droite se trouve le Pape entouré des cardinaux et des évêques. Au premier plan, vus de dos et de trois-quarts, les grands dignitaires de l’Empire portent les signes du pouvoir impérial dont le sceptre surmonté de l’Aigle, la main de Justice et le Globe. Les deux frères et les deux sœurs de l’Empereur se trouvent à gauche. A l’arrière plan, du haut de la tribune officielle, la mère de Napoléon domine la scène. Tous les regards convergent vers la couronne. Pour la mettre en valeur, le peintre a déplacé un pan de rideau vert, mordant sur le pilastre. Le profil de Joséphine agenouillée,  rajeunie pour la circonstance, se découpe sur la belle chape ocre jaune du porte-croix, juste devant Murat qui porte encore le coussin de sa couronne. Les velours, les fourrures, les satins et les lamés des costumes et du mobilier sont rendus au moyen d’une palette colorée exceptionnelle.

On marche dans ce tableau

Ce tableau-portrait collectif qui réunit la famille de l’Empereur, sa cour   et le clergé habillés en costume d’apparat, dégage une impression de réalité totale. Pourtant le peintre s’est permis quelques libertés avec l’Histoire et avec le protocole. Il a réduit l’architecture de Notre-Dame pour donner plus d’ampleur aux personnages. Laetitia Bonaparte, Madame Mère, absente lors du Sacre qu’elle désapprouvait, figure dans le tableau sur ordre de son fils. Quant au geste de bénédiction du Pape, qui avait dans un premier temps les mains posées sur les genoux, c’est encore Napoléon lui-même qui l’a voulu. Les sœurs sont immobiles alors qu’elles avaient été obligées de soutenir la traîne de l’Impératrice.

Grâce à ces choix, jugés nécessaires pour un tableau aux dimensions inédites et dont le personnage principal est un héros fascinant, l’Empereur s’y est reconnu : "Quel relief, quelle vérité ! Ce n’est pas de la peinture ; on marche dans ce tableau". Conscient de l’importance de son œuvre pour l’avenir, l’artiste lie sa gloire à cette toile en disant : " Je me glisserai à la postérité à l’ombre de mon héros".