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Le buste colossal du Vishnou du Mebon occidental d’Angkor fut considéré, dès sa publication dans le Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient en 1936, comme l’un des plus grands chefs-d’œuvre de la statuaire khmère.
Stylistiquement (proportions, modelé, costume et bijoux, incrustations), l’œuvre est datée de la seconde moitié du 11e siècle. De nombreux éléments, tant historiques que techniques, montrent sans peu de doute que ce bronze monumental a été réalisé au sein de la fonderie royale d’Angkor.
La représentation de Vishnu étendu sur le cobra polycéphale Ananta (« Celui qui est infini, éternel ou illimité ») – autrement désigné sous le nom de Shesha (« Ce qui reste, au sens de résidu, après l’anéantissement de toute chose à la fin d’une ère cosmique ») – est une image cosmogonique indienne, que les Khmers ont largement reprise à leur compte pour évoquer le pouvoir créateur et purificateur du divin.
Très vraisemblablement accompagné par son épouse Lakshmi (« Beauté » ; « Fortune »), le dieu Brahma (auquel il donne naissance à l’aube d’une nouvelle ère), et peut-être d’autres divinités encore, Vishnu était allongé sur le corps d’Ananta, dont les têtes multiples devaient se redresser derrière son buste. Placée au centre du petit temple atypique pour lequel elle avait été conçue, cette sculpture est un témoignage de l’excellence des fondeurs khmers, à l’époque de l’apogée d’Angkor.
Revoir les dorures et la polychromie du Grand Vishnou
Chose remarquable, le Vishnou du Mebon occidental a été, pour sa finition, entièrement doré à l’amalgame de mercure, une technique apparemment bien maîtrisée pour la grande statuaire par les artisans de cette époque. La bien meilleure tenue de ce type de dorure, par rapport à la dorure à la feuille, était sans doute recherchée pour une telle statue, à la fois exposée en plein air et installée dans un environnement particulièrement humide. Cette dorure a en outre été rehaussée d’une riche polychromie, notamment sur le visage : sourcils, moustache et barbe incrustés d’un composé à base de plomb ; blancs des yeux et plis de beauté du cou plaqués ou incrustés d’argent ; lèvres colorées de rouge par l’ajout de cinabre.
Pour tenter de déterminer l’aspect originel de la statue – au moins de la tête et du buste, les mieux conservés – une couverture photogrammétrique a été menée, suivie d’un patient travail de reconstruction virtuelle, en collaboration avec Pascal Mora de la plateforme de recherche et de production Archéovision œuvrant dans le domaine de la 3D appliquée au patrimoine culturel (Bordeaux). La surface originale a été recherchée sous l’épaisse couche de corrosion, alors que les éléments de décor, souvent peu lisibles, ont été reconstitués par analogies. Il en a été ainsi pour plusieurs éléments qui ont été coulés séparément puis assemblés, que ce soit sur la tête (diadème-couronne, couvre-chignon, cache-nuque, pendants d’oreilles) ou sur le corps (nœud postérieur du sampot « en ailes de papillon » au niveau de la ceinture). Une proposition de restitution 3D de la tête et du buste du Vishnou, d’après les résultats de l’étude stylistique et technologique, est présentée au sein de l’exposition.
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De même, plusieurs dispositifs multimédias sont proposés aux visiteurs, notamment une tentative de reconstitution du temple du Mebon ou encore des extraits de l’analyse de l’œuvre au Centre de recherche et de restauration des musées de France (Paris) et de sa restauration au laboratoire Arc’Antique (Nantes).