Editeur : La vie est belle, mars 2012. Coffret 3DVD. Durée du film: 6h50. 26 €.

Suppléments :

  • Rencontre avec Jacques Parsi, conseiller littéraire du film : DVD1 - Manoel de Oliveira : un homme et un style (12 min) / DVD2 - Le Soulier de satin (13 min) /DVD3 - Un film (14 min)
  • Dossier d'analyses de L’Avant-scène, consacré au Soulier de satin : 50 pages en PDF.

Dans l’Espagne des conquistadores, Dona Prouhèze, mariée à Don Pelage, est incapable de résister à l’attraction que Rodrigue exerce sur elle. Avant de se rendre à leur premier rendez-vous, elle offre à la vierge son soulier de satin, symbole de son acceptation du châtiment : devenir boiteuse si elle commet l’adultère.Le film envoûte par sa longueur même. Le contexte (la conquête du Nouveau Monde par l'Espagne) et la thématique (dans l'axe cornélien du renoncement à l'amour par devoir) sont emportés par la splendeur de la langue de Claudel.

   

Oliveira, après une introduction complexe, va utiliser le seul plan séquence comme outil de mise en scène, limitant le mouvement à trois possibilités : celles dues aux personnages, à la caméra ou aux décors. Les personnages sont presque constamment face à l'appareil de prises de vue. Les seuls contrechamps se situent lors du face-à-face entre Rodrigue et le roi parce qu'il y a cette fois une réelle confrontation conflictuelle.

C'est la force de la voix qui est privilégiée. Cette force de la voix culmine dans la scène où Rodrigue est avec Don Camille dans une pièce du château de Mogador. Elle aussi dans la forteresse, Doña Prouhèze lui fait remettre un billet ("Je reste, vous partez"). Fou de douleur, Rodrigue l'appelle par son nom et lui crie son amour. Contre toute vraisemblance, l'ombre de Doña Prouhèze se matérialise alors derrière un rideau sur le mur du fond. L'esprit de la jeune femme répond donc à son appel et cette réunion, devant la caméra, d'un corps et d'une âme ne peut se faire que dans l'espace purement virtuel créé par le cinéaste. Mais ces ombres chinoises derrière un écran secoué par le vent figurent aussi magistralement cette rencontre impossible entre les amants, toujours différée durant des années dans la réalité et pendant des heures dans le texte.

Le chemin de Saint-Jacques de Compostelle est personnifié par une femme, dont la parole pose que la Terre sépare et que le Ciel réunit. La lune parle, ce qui évoque les féeries de Georges Méliès aux tout premiers temps du cinéma. Précisément, ces prodigieuses aventures sont rendues par un mélange de tons et un croisement de genres : tableaux vivants, miniatures, ombres chinoises ; cruauté des conquêtes, épopée évoquant Ulysse ou naïveté de personnages extravagants comme le serviteur Isidore semblant sortir tout droit d'une bande dessinée, séquence mi- fantaisie, mi- fantastique d'une femme noire dansant nue dans la nuit, personnage qui se gonfle telle une baudruche comme dans un dessin animé... Mais aussi, réflexions morales et politiques sur le progrès scientifique et technique, sur les échanges commerciaux ou religieux entre l'Occident et l'Orient.

Mais il était ausi une fois, aussi, des personnages. Dans l'Espagne des conquistadores du XVIe-XVIIe siècle, Dona Prouhèze, mariée à Don Pelage, qui aimait Don Rodrigue. Pleine de ferveur, la jeune femme remet son soulier à la Vierge, afin de parcourir boiteuse le chemin vers son amant : acte de foi et sentiment du péché. Tout au long des quelque sept heures de film, correspondant à l'intégralité de la pièce, en quatre journées, les amants se cherchent, se croisent, se manquent, à l'image d'une lettre qui passera de main en main pendant des années. Leur voyage fait parcourir le monde, sur terre, sur mer, du palais de l'Escurial à l'Amérique et ses Indiens, d'une citadelle en Afrique au Golfe du Mexique, de la voie Appienne de la campagne romaine à l'église Saint Nicolas de la Mala Strana à Prague ; et l'on évoque le Maroc, le Japon.

La pièce de Paul Claudel est divisée en quatre journées, à l'instar du théâtre espagnol. Le projet d'origine était de tourner en 35 mm la quatrième de ces journées, celle qui porte le titre de Sous le vent des îles Baléares, avec, en prologue, la scène des adieux entre Prouhèze et Rodrigue. Le film aurait ainsi la longueur d'un film raisonnable d'un peu plus de deux heures. Le reste a été tourné en 16 mm par souci d'économie et a été par la suite gonflé en 35 mm grâce à l'apport inespéré d'une puissante société de production américaine, la Cannon, et l'ensemble fit partie de la sélection de la Mostra à Venise en septembre 1985 où il obtint un Lion d'or spécial du jury.

 

 

Rencontre avec Jacques Parsi, conseiller littéraire du film

 

 

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Les éditions La vie est belle
 
présentent
 
Le soulier de satin de Manoel de Oliveira