Editeur : Carlotta-Films. novembre 2013. Nouveau master restauré. Version Originale / Version Française. Sous-Titres Français. Durée du Film : 102 mn. Le DVD : 17 €. Le Blu-ray : 20 €.

Suppléments :

  • Désintégration (23') Comment Robert Aldrich a transcendé le film noir par Philippe Rouyer, critique de cinéma et enseignant à l’Université Paris I.
  • Mike Hammer, l'homme aux mille visages (28') Larry Cohen, créateur de la série Les Envahisseurs, se remémore les adaptations au cinéma et à la télévision des aventures de Mike Hammer, notamment J’aurai ta peau dont il a écrit le scénario.
  • Fin controversée (la fin courte d'avant 1997)
  • Bande annonce

Une jeune femme blonde court sur une route près de Los Angeles en pleine nuit, essayant désespérément de se faire prendre en stop, et parvient à arrêter la voiture du détective privé Mike Hammer. La femme, nue sous son trench, dit s’appeler Christina et s’être échappée d’un asile psychiatrique où on l’avait internée de force. Ils sont alors rattrapés par un groupe d’hommes qui les enlève ; Christina est torturée et tuée tandis que Mike est battu et laissé pour mort. Mais celui-ci survit miraculeusement et, sur son lit d’hôpital, décide d’enquêter, obsédé par les derniers mots de Christina : « Souvenez-vous de moi. »…

Après les succès en 1954 de Bronco Apache et Vera Cruz, tous deux initiés par Burt Lancaster, Robert Aldrich accepte la proposition du producteur Victor Saville d'adapter le best-seller de Mickey Spillane à condition de traiter son héros, Mike Hammer, comme il l'entend. Coproducteur du film, Aldrich confie à son scénariste A.I. Bezzerides le soin de forcer le trait sur le côté névropathe de Hammer, cynique et détaché de tout sauf de sa propre vanité. Bezzerides, transpose l'action de New York à la côte ouest et transforme le grand sac plein de drogue du roman en une fameuse boite qui a quelque chose à voir avec le nucléaire. Film noir violent et sexy, parsemé de vamps et de cadavres, thriller totalement paranoïaque, au rythme effréné et au dénouement effrayant, En quatrième vitesse est rapidement salué par les meilleurs critiques et élevé au rang de film culte.

Mike Hammer, détective

Christina le juge d'amblée : "Vous n'avez qu'un seul amour vrai et durable, vous. Vous êtes de ces hommes complaisants qui ne pensent qu'à leurs vêtements, à leur voiture, à eux-mêmes". Elle devine qu'il fait des pompes... "Dans une relation, vous prenez, vous ne donnez jamais"

La commission d'enquête criminelle venue toute spécialement de Washington, irritée par son refus de répondre sur les circonstances de l'accident le renvoie à son minable métier de détective pour dossiers de divorce. Alors que sa secrétaire Velda recherche son amour il la contraint à coucher avec des clients pour obtenir des preuves d'adultère. Elle el prévient vainement "D'abord tu trouves un fil conducteur, qui te conduit à une ficelle et la ficelle t'amènera à une corde. Et c'est au bout de cette corde que tu te balanceras".

Aldrich dote son héros d'un intérieur ultra moderne au 10401 Wilshire Boulevard. Répondeur enregistreur, tableaux et statues décorent son appartement.

Une série d'à-coups violents pour un polar métaphysique

Les vingt plans du prégénérique sont très connus et donnent le ton du film accompagnés des halètements de la femme qui court et retrouve difficilement sa respiration :

(1) Les pas d'une femme qui courent le long des pointillés centraux d'une route, (2) un court plan rapproché taille puis (3) un plan large d'elle sur la route s'approchant en plan rapproché épaule, le regard fixé vers une voiture qui ne s'arrête pas. (4) Reprise brève des pas, (5) du plan général se terminant en plan rapproché épaule avec, cette fois la vision de la voiture qui ne s'arrête pas. (6) De nouveau, pour la troisième fois, les pas sur la route. (7) Un plan plus bref de l'avancée de la femme vers la caméra. (8) Les phares de la voiture de Mike Hammer. (9) Plan large de la jeune femme courant (10), plan large de la voiture s'approchant à grande vitesse de la femme sur la route, (11) plan serré sur elle, (12) sur lui freinant. (13) La voiture stoppe. (14) Elle le regarde, (15) il la regarde en colère, (16) elle le regarde. (17) Elle s'approche de la voiture qui peine à démarrer. (18) Il lui dit de monter. (19) Elle fait le tour de la voiture. (20) La voiture démarre. Sur le plan 21, lui et elle de dos avec la route devant eux, défile le générique à l'envers (du haut vers le bas, nous obligeant à le lire de bas en haut).

Toutes les séquences du film sont remarquables, déjouant sans cesse l'attente du spectateur. Depuis la voiture qui surgit de nulle part, la torture à mort de Christina évoqué par ses pieds et ses cris puis une tenaille tenue à mi-corps par des tortionnaires dont on ne voit pas le visage. Mike Hammer placé dans la voiture devrait mourir lorsqu'elle est jetée de la falaise. Dans le roman, il est clairement dit qu'il parvient à s'en extraire et s'accrocher à un arbre. Ici la voiture dévale et se retrouve en feu. La séquence se termine par un fondu au noir et l'inspecteur lui dit à son réveil qu'on ne l'a pas revu depuis trois jours. Cette allusion possible à la résurrection du Christ est renforcée par le fait que lorsqu'il va voir Nick son copain garagiste, celui-ci évoque la résurrection de Lazare.

La violence ne cessera ensuite d'être omniprésente, le violent tabassage du gangster qui suit Mike est suivi d'une seconde raclée qu'il lui inflige le précipitant en bas d'un escalier. Ensuite lorsque Sugar tente de le frapper dans la villa de Carl Evello c'est hors champ qu'à lieu la réaction de Hammer qui effraie celui qui accompagne Sugar sans que l'on sache pourquoi. On comprendra dans une scène suivante que Hammer s'est servi d'une redoutable petite matraque.

Cette violence ne cesse ainsi d'être en adéquation avec les références mythiques du film, celle de la religion catholique mais aussi de la mythologie avec les références à Pandore ou la femme de Loth, femme transformé en sel ou la tête de méduse dont ceux qui la regardent seront transformés non en sel mais en feu et en cendre. Le Dr. Soberin, avant de mourir, supplie Lily de ne pas ouvrir la boite en ces termes : Je suis tel Cerbère aboyant de toutes ses têtes aux portes de l'enfer....

L'enfer c'est bien évidemment le feu nucléaire. Les dialogues évoquent "le projet Manhattan, Los Alamos. Trinity". La fin n'est certes pas l'apocalypse nucléaire comme on l'a trop vite dit. Mike et Velda échappent à la destruction de la maison en se réfugiant dans la mer. Mais le feu est lâché et le son fait par le feu nucléaire évoque le mal diabolique avec lequel l'humanité va devoir faire face. Peut-être est-ce la marque du monde contemporain. Le chef de la bande, le Dr. Soberin exprime cette possibilité pour le sentiment d'éclore au milieu de la plus extrême violence : "Que cherchons nous, des diamants, des rubis de l'or, se stupéfiants peut-être. Comme cette terre était civilisée ! Mais le monde devant plus primitif, ses trésors deviennent plus fabuleux !" Il dit enfin en conclusion face à l'égoïsme monstrueux de Hammer : "Peut-être le sentiment triomphera-t-il là où l'avidité a échoué. Vous mourrez mais votre amie vous pouvez la sauvez".

Ni Nihilisme ni apocalypse donc mais la conscience d'un monde devenu d'une violence extrême où le sentiment ne peut éclore que par bouffées.

Désintégration (23') par Philippe Rouyer, critique et enseignant à Paris I.

Philippe Rouyer expose comment Robert Aldrich a transcendé le film noir avec En quatrième vitesse.

Aldrich avec ses cinq films de 1955-56, ne révolutionne pas le cinéma de genre mais lui laisse sa patte, celle de la distance et du cynisme. La fin ne justifie pas les moyens. Accepte la proposition du producteur mais veut traiter Mike Hammer comme il l'entend. Il va ensuite créer sa propre compagnie. Bezzerides, roman un grand sac plein de drogue transforme une fameuse boite qui a quelque chose à voir avec le nucléaire. Dans les dialogues, on entend aussi projet Manhattan, Los Alamos. Les brulures sur le visage du journaliste et le nihilisme de l'explosion finale sont en phase avec ce héros fasciste qui provoque plus ou moins la fin du monde.

Bezzerides transpose l'action de New York à la côte ouest. Mais Los Angeles est ici une ville sans existence tout comme la route du pré-générique. Seuls existent les escaliers et les portes donnant au film une dimension théâtrale car construit comme une suite de bulles cauchemardesques

Les références mythologiques abondent : Pandore ou la femme de Loth, femme transformée en sel, tête de méduse non transformée en sel mais en feu et en cendre. Je suis tel cerbère...

Hammer devrait mourir dans la voiture jetée de la falaise. Dans le roman, il est clairement dit qu'il parvient à s'en extraire et s'accrocher à un arbre. Ici la voiture dévale et se retrouve en feu. La séquence se termine par un fondu au noir et l'inspecteur lui dit qu'on ne l'a pas revu depuis trois jours, allusion à la résurrection du Christ et lorsqu'il va voir Nick son copain garagiste, celui-ci évoque immédiatement de Lazare dimension métaphysique du film noir. L'histoire d'apocalypse nucléaire reviendra dans L'ultimatum des trois mercenaires.

 

Mike Hammer, l'homme aux mille visages (28') par Larry Cohen

Larry Cohen, créateur de la série Les envahisseurs, se remémore les adaptations au cinéma et à la télévision des aventures de Mike Hammer, notamment J’aurai ta peau dont il a écrit le scénario.

 

Retour à la page d'accueil

 
présente
 
En quatrième vitesse de Robert Aldrich