La frappe

2010

(Pasookkoon). Avec : Lee Je-hoon (Ki-tae), Seo Jun-Young (Dong-yoon), Park Jung-min (Hee-june "Becky"), Cho Sung-ha (Le père). 1h56.

Des adolescents qui se battent violemment. Que s'est-il passé ce jour-là ? C'est aussi cette question qui taraude le père d'un des jeunes garçons, décédé dans des circonstances mystérieuses. Le père du garçon, pris de remords à l'idée de ne pas avoir pu le sauver, décide de trouver les raisons qui se cachent derrière la mort de son fils et va à la rencontre de ses camarades de lycée. Il découvre peu à peu que derrière l'amitié qui semblait lier son fils à deux autres garçons se cachent des secrets insoupçonnés.

Ki-tae, Dong-yoon et Hee-june, surnommé "Becky", sont des amis inséparables qui ont pris l'habitude de jouer au base-ball le long de la voix de chemin de fer que bordent d'immenses tours d'immeubles identiques. Ki-tae tient à sa balle, ce qui amuse Dong-yoon et Becky amis depuis le collège. Ki-tae et Becky sont dans la même classe mais leur amitié vient brusquement de dégénérer. Ki-tae a même brulé les affaires de classe de son ami et l'a frappé lorsqu'il a tenté de les récupérer.

Le père interroge un ami de Ki-tae qui reste muet sur cette rixe à laquelle il prit part mais qui lui donne les coordonnées de Becky. Celui-ci n'a pas grand-chose à lui dire, l'événement tragique, la mort du fils eu lieu âpres qui ait déménagé dans un autre lycée. Le père s'interroge sur l'absence du second ami de son fils à son enterrement, Dong-yoon. C'est donc Ki-tae, le plus violent des trois qui est mort. Celui qui martyrisait son ex-ami Becky. Pourquoi cela ? Ki-tae supportait mal que Dong-yoon et Becky rient derrière son dos de son mal-être à chaque fois que l'on parlait de sa famille. Ki-tae souffre en effet de l'absence de sa mère; ce dont son père avait pris conscience en découvrant dans un de ses tiroirs des photos des temps où la famille était réunie. Ki-tae avait aussi une attitude étrange avec les filles. Alors qu'il savait que Becky était amoureux de l'une des filles, il avait dédaigné les avances de celle-ci mais n'avait pas voulu l'avouer à Becky. Alors la situation s'était si bien dégradé que Becky avait pris la décision de quitter le lycée non sans avoir dit ses quatre vérités à Ki-tae: en jouant au dur, il était certain de n'avoir jamais d'ami mais jutes de s'entourer d'une cour d'hypocrites.

Lorsque après le départ de Becky, Dong-yoon était venu narguer Ki-tae celui-ci lui avait brutalement asséné que sa petite amie avait la réputation d'être une fille facile. Dong-yoon ébranlé avait bien failli rompre avec elle mais avait été bouleversé de la tentative de suicide que son amie avait fait ensuite, sans doute mise au courant de la raison probable de la rupture par Ki-tae lui-même. C'est du moins ce qu'avait soupçonné Dong-yoon qui était venu se venger en frappant Ki-tae. Mais ses acolytes avait pris la relève et tabassé Dong-yoon contre sa volonté. Ki-tae était ainsi venu s'excuser auprès de celui qu'il considérait comme son ami ; Dong-yoon l'avait alors brutalement rejeté;

Dong-yoon explique cela au père de Ki-tae qu'il a enfin accepté de rencontrer dans un café.

Désespéré par son rejet par ses deux amis, Ki-tae s'était suicidé en se jetant par la fenêtra de l'immense immeuble. C'est du moins comme cela que Dong-yoon se l'imagine maintenant qu'il revit cette scène dans ses cauchemars. Il se souvient comme il aimait discuter avec Ki-tae, comment il s'amusait bien avec lui le long de la voie de chemin de fer. Comment n'avait-il pas vu la fragilité de Ki-tae, désespéré de l'absence de sa mère rêvant d'être un grand frappeur de base-ball juste à partir de son attachement pour la balle reçue dans sa petite enfance heureuse.

La caméra portée, la répétition de scènes de harcèlements dont le spectateur occidental peine à reconnaitre les personnages, la chronologie sans cesse bouleversée par des flashes-back qui plongent dans des périodes du passé peu identifiable, l'incertitude quant au nom du fils décédé dont le père recherche la trace, l'ignorance de la façon dont est mort ce fils et même la fausse piste consistant à utiliser la scène initiale pour donner à penser que Becky est mort sous les coups; toute cette incertitude, toutes ces répétitions semblent durant un temps n'être qu'un moyen de cacher la relative banalité du sujet abordé : le harcellent moral dont est victime un lycéen de la part de ses camarades.

Ce n'est qu'en découvrant Becky puis Dong-yoon, la souffrance qu'ils ont enduré en se protégeant de l'agressivité de Ki-tae que l'on perçoit mieux que, comme eux, nous n'avions pas compris la fragilité de Ki-tae s'enfonçant dans l'agressivité avec désespoir pour masquer le manque d'amour dont il est victime et qu'il cause lui-même faute de ne pas se livrer à ses amis. Les deux dernières scènes du film : le cauchemar de Dong-yoon rappelé au milieu de la nuit par le père de Ki-tae et sa conversation imaginaire avec lui, le long des rails, amènent à repenser le film sous l'angle du mort.

Jean-Luc Lacuve le 16/05/2014