Le village

2004

Avec : Bryce Dallas (Ivy Walker), Joaquin Phoenix (Lucius Hunt), Adrien Brody(Noah Percy), William Hurt (Edward Walker), Sigourney Weaver (Alice Hunt). 1h48.

Edward Walker est le chef d'un village replié sur lui-même, perdu en pleine campagne. Isolée du reste du monde, la petite communauté vit dans la peur : des créatures maléfiques hantent les sinistres bois des alentours. Tous savent que si un villageois pénètre dans ce lugubre bosquet, "ceux dont on ne parlent pas" viendront se venger. Une trêve a été conclue entre les monstres et les humains : chacun chez soi et les vaches seront bien gardées. Malheureusement, le jeune Lucius Hunt est bien décidé à quitter le village et traverser les bois. Ivy Walker, la fille aveugle de Edward, est la seule à comprendre son désir. Saura-t-elle le convaincre de ne pas briser le fragile équilibre que tente de maintenir son père ?

Pour Jean-Pierre Rehm, Cahiers du cinéma de septembre 2004, n°593 :

" Fruit creux d'un complot entretenu, le danger est mis en scène par les Anciens, afin de préserver intact leur projet : s'isoler dans la clairière d'une innocence à l'écart du monde et de ses villes maudites. Malgré les costumes désuets, on comprend vite que l'action ne se situe pas hier mais aujourd'hui. L'extérieur c'est notre monde contemporain.

Le conte le plus sobre, le plus poignant n'est qu'illusion destinée à donner le change, à substituer une violence fabriquée et contrôlable à une autre réelle et incontrôlable, celle que les anciens ont décidée de fuir.

La fiction est un enclos, non pas à côté du réel mais élevée au sein de l'actualité. La fiction est ici moins menacée par les violences prosaïques du monde alentour, que par l'essoufflement de son utopie, la fraude de sa magie, l'effritement de sa propre foi en elle-même.

Deux raisons à cette érosion fatale : on y souffre autant (mort injuste d'un enfant, idylle refusée à Kitty, la sœur d'Ivy, éconduite par Lucius) folie et jalousie meurtrière de Noah Percy. Seconde raison, l'édification isolationniste est tenue à bout de bras par quelques-uns qui ne reculent devant aucun expédiant, gâchant fêtes nuptiales comme funérailles.

La fiction ne guérit plus du réel, c'est elle au contraire qui est malade et en passe de s'effondrer. Elle que le réel doit soigner et préserver."