Un petit village palestinien de Cisjordanie situé sur la ligne séparant Israël et les territoires occupés. L'emménagement du ministre israélien de la Défense. Au milieu? Une citronneraie faisant office de mur symbolique, lequel finira par être véritablement édifié, victime de bien des maux. Susceptible d'être une base d'où mener une action terroriste à l'encontre du ministre et pour ainsi dire d'Israël, on donne l'ordre de raser tous les arbres et de ce fait l'existence d'Alma. Héritage d'une vie, mémoire d'un père décédé, souvenirs d'enfants partis, raflés selon le bon vouloir du gouvernement.

Eran Riklis nous présente avec finesse et empathie, l'histoire de deux peuples voisins mais séparés par des discours idéologiques divergents, l'Histoire, la guerre et une haine omniprésente depuis des décennies. Une haine à laquelle ne répondent pas nécessairement tous les habitants à en juger l'attitude de Mira, femme du ministre Israélien, préférant s'opposer (et partir) au lieu de cautionner les excès perpétrer par l'Etat et l'injustice ainsi subie.

La réalisatrice n'a pas cherché à tomber dans ce que certains appellent la banalité de l'horreur, surexposée par les médias. Nulle goutte de sang, aucune fusillade et pourtant l'intensité dramatique est ancrée dans ce combat féminin. L'histoire de ces deux nations et les sous entendus se suffisent à eux même, nul besoin d'en rajouter. Morts et violons ne forment pas un duo indispensable à la compréhension d'une situation géopolitique tendue et incertaine, des désastres perpétré par l'être humain, de la peur de populations entières.

Au cœur de ce film se trouve non pas une histoire d'amour, bien que l'idylle entre Salma et son avocat prenne une place assez importante, mais une amitié, une compassion entre deux femmes. Ces dernières, séparées par un grillage, image se voulant largement métaphorique, dialoguent par l'intermédiaire d'interviews et de journaux à défaut de pouvoir se parler. Mira appuie Salma dans sa lutte pour la préservation de ses citronniers lesquels dépérissent jour après jour, allégorie des civiles victimes d'attentats terroristes, d'individus se trouvant au centre de problèmes militaires et politiques.

Pas de retournement de situation, les citronniers sont bel et bien rasés, Mira quitte son mari, la vie continue malgré tout.

C'est un message d'espérance que nous transmet Eran Riklis qui loin de tomber dans l'utopie caricaturale d'une réconciliation constante et fiable à la suite de la polémique des citronniers, cherche à nous présenter deux femmes, deux peuples décrétés ennemis pouvant s'apprécier et se comprendre. Derrière l'horreur et la terreur il n'y a pas que l'horreur et la terreur. Elle mène sa réflexion au-delà du conflit israélo-palestinien, sur le courage et l'intégrité, sur l'être humain en général lequel ne s'avère pas être seulement un loup pour son prochain mais aussi une épaule sur laquelle s'appuyer.

Justine Lévêque le 03/07/2008

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Les citronniers
2008
 
Eran RIKLIS