L'étudiant

2012

Almaty, la plus grande ville du Kazakhstan. Un étudiant est embauché comme assistant par un réalisateur de films commerciaux. Un de ses amis n'a d'yeux que pour la pulpeuse starlette et profite d'une pause pour lui offrir du thé. Cet ami en renverse une tasse sur sa robe et la starlette appelle son mari, directeur de banque, à la rescousse. Il débarque avec ses gorilles qui tabassent durement l'ami de l'étudiant.

L'étudiant n'a pas gagné d'argent pendant ses vacances car le tournage s'est arrêté suite à l'incident provoqué par l'ami. Sa logeuse se plaint qu'il ne pourra lui payer son loyer. L'étudiant a en effet tout juste assez d'argent pour acheter du pain chez l'épicier du coin. Celui-ci est refuse tout crédit même à une vieille femme qui a besoin d'une petite avance sur sa pension. L'étudiant est impressionné par l'argent qu'il garde en caisse. L'étudiant rencontre un poète au chômage depuis la libéralisation d l'économie kazakh. Il le suit chez lui où le poète encoure les reproches de sa femme sur son ivrognerie. Touché par la triste situation des deux filles du couple, la jolie Saniya et son angélique petite sœur, leur laisse son dernier billet.

Un jour de pluie, il croise la starlette son mari dans leur gros 4x4. Plus tard le 4x4 sera immobilisé dans le lit d'une rivière que le banquier avait imprudemment voulu traversé à gué. Au-dessus du pont, les habitants assistent à la veine tentative d'un vieux paysan de venir en aide au banquier en tirant sa voiture avec son âne fourbu. Enervé par l'échec de cette tentative, le banquier frappe la tête de l'âne avec son club de golf. Il démarre ensuite sa voiture sous els regard consternés des habitants.

Un des cours de l'étudiant est dispensé par une jeune professeure faisant l'apologie de la réussite des oligarques kazakhs. Elle explique qu'ils suivent la seule voie possible, celle que suivent même les animaux, la loi du plus fort. Un soir l'étudiant échange une médaille l'ordre de Lénine provenant de sa famille contre un pistolet chargé de trois balles.

Chez sa logeuse, l'étudiant voit aussi une émission sur la mise à mort d'une hyène par deux lions affamés. C'en est trop, décidant d'être un lion lui aussi il part chez l'épicier décidé à le tuer.

Au moment de passer à l'acte, il hésite pourtant, ressort du magasin puis finalement, dépose le pain acheté et rentre une nouvelle fois pour abattre l'épicier de deux balles. Une jeune femme entre malencontreusement dans le magasin et il la tue de sa dernière balle. Effrayé par son geste il vide néanmoins la caisse, empêche le livreur de pain d'entrer, puis ressort. Il jette un regard désolé sur la petite fleur de plastique qui s'agite, dérisoire, dans la voiture de la jeune femme qu'il vient de tuer. Troublé, il oublie le pain qu'il avait déposé sur le capot d'une voiture lorsqu'il était sorti une première fois du magasin.

Accablé par la culpabilité de son double meurtre et persuadé qu'il sera bientôt arrêté, l'étudiant reste prostré dans sa chambre. Pourtant, le policer qui frappe à la porte s'était juste trompé d'adresse ; pourtant sa logeuse qui voit les actualités télévisées relatant le double meurtre ne songe pas que le pain sur le capot, pièce à conviction accablante, pourrait être celui de son étudiant. Mieux même, en passant devant le magasin, l'étudiant s'aperçoit que des jeunes gens se sont empressés de reprendre le bail et ont effacé toutes les traces des meurtres. Il les informe du drame de la veille dont ils n'étaient pas au courant.

Dans une ruelle de la ville, il est attiré par un car de police venu constater un décès : c'est le poète qui est mort. Il les conduit à son domicile. Plus tard il assiste aux obsèques du père. La jeune sœur de Saniya, vient lui donner quelques victuailles et l'embrasser sur la main.

En entrant, il constate que sa mère et sa sœur sont venus lui rendre visite. Il se monter peu bavard et est victime de cauchemars. A l'université un vieux professeur exilique que les humains n'ont pas à se comporter comme des animaux puisque leur condition est justement d'être différent.

Accablé de remords, l'étudiant va se confesser auprès de Saniya. Peu de temps après, il se livre à la police.

Le livre du poète est publié. La jeune sœur de Saniya l'ouvre et le lit. Il est dit que ceux qui vivent par les sentiments vivent intensément. Cela semble être le cas de Saniya, venue rendre visite à l'étudiant. Celui-ci est heureux de cette preuve d'amour.

Darezhan Omirbaev n'a jamais caché son admiration pour Robert Bresson. Son attention au cadre et aux sons, renouvelée à chaque plan, en est ici un très bel hommage. Ses acteurs, ressemblent aux modèles bressonniens avec leur même étrange impassibilité extérieure vis à vis des évènements. Mais, plutôt que de travailler la recherche spirituelle de ses personnages, c'est plutôt la présentation de deux mondes irréconciliables que propose le réalisateur dans le Kazakhstan en pleine mutation.

Il y a le petites gens qui s'interrogent sur le sens du devoir et de la morale et les défenseurs du nouveau pouvoir économique qui imposent brutalement la loi du plus fort. Les plans magnifient cette opposition sans chercher à la dramatiser, à la résoudre dans l'intrigue. Les oligarques ne sont pas punis d'avoir frappé un homme, interrompu un tournage, tuer un âne à coups de club de golf, d'avoir concouru à enseigner la loi du plus fort à l'université

Au plus profond de la déchéance morale une lueur surgissait pour sauver le Raskolnikov de Dostoïevski. Ici, l'étudiant connaitra la même rédemption avec la jolie, sourde et muette Sanyia. Chez les nouveaux riches, aucune conscience morale n'a surgi ; c'est un jugement sans appel.

Jean-Luc Lacuve le 24/03/2014

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Festival de Cannes 2012, Un certain regard (Student). D'après Crime et Chatiment de Dostoeïvski. Avec : Nurlan Baitasov (L'étudiant), Maya Serikbayeva (Saniya), Edige Bolysbaev (Le poète), Bakhytzhan Turdaliyeva (La mère de l'étudiant). 1h30.
Genre : Drame social