Dans un jardin je suis entré
2013

Avi Mograbi, réalisateur israélien, vient rencontrer le palestinien Ali Al-Azhari à Beyrouth pour le documentaire qu'ils doivent faire ensemble sur le fantasme d'un Moyen-Orient d'avant 1948, dans lequel les communautés n'étaient pas séparées par des frontières ethniques et religieuses.

Ali est le professeur d'arabe d'Avi Mograbi, langue dans lequel le film doit se faire puisque telle était la langue de la famille Mograbi qui a immigré de Damas et Beyrouth vers Tel-Aviv dans les années 1920. Jusqu'à la guerre de 1948, ils ont circulé librement entre ces trois villes. Après la guerre, les frontières ont été fermées. À ce jour, Israël est en état de guerre avec la Syrie voisine et le Liban. Ali se méfie d'un film dont il ne contrôlerait pas l'image qu'il donne de lui, d'un palestinien en appelant à la paix et à l'ouverture des frontières. Ali Al-Azhari voudrait connaitre la forme, le scénario du film qu'ils vont faire ensemble.

Avi lui donne sa parole qu'il prendra en compte la moindre de ses observations, qu'il aura le contrôle du montage final. et qu'il peut même prendre un avocat pour défendre ses intérêts si sa mort survenait avant la fin du tournage. Les deux hommes se serrent la main pour conclure le contrat du film à venir

Avi voudrait partir de l'histoire de sa famille telle qu'il la perçoit au travers de l'album photo de sa mère. Il aimerait faire un film sur l'histoire d'un cousin de son père qui a grandi à Beyrouth. Une partie de fiction est inséré sous forme d'un récit épistolaire : c'est une histoire d'amour entre deux Juifs, qui vivaient à Beyrouth et se sont retrouvés séparés par la frontière quand l'un a émigré en Israël.

Mais bien vite la faconde d'Ali impose son propre parcourt comme celui du déchirement des communautés. Il voudrait revenir à Safuriyya où il est né, près de Nazareth, en 1948. Sa famille a été expulsée par les forces israéliennes. Leurs biens ont été confisqués et il a grandi comme un réfugié dans son propre pays, à quelques kilomètres de son village ancestral.

Pour ce voyage Ali emmène son frère et sa fille, Yasmine. Ali raconte qu'enfant, sa mère lui désignait les Juifs comme des croquemitaines, mais que ça ne l'a pas empêché d'épouser une Juive. Yasmine a une douzaine d'années. Elle est déchirée par sa double identité puisqu'elle est à la fois juive et palestinienne et qu'elle défend en même temps ces deux héritages. Elle supporte difficilement le racisme anti arabe dans son école de Tel-Aviv.

A Safuriyya, Ali découvre une pancarte plantée dans un jardin public du village où il est né interdisant l'entrée aux étrangers sous peine de prison. Ali est en colère contre cet écriteau comme si les juifs n'avaient pas retenu les leçons du nazisme. Il appelle Yasmine pour le voir et braver l'interdiction mais l'enfant est terrifiée parce qu'elle croit sincèrement qu'ils risquent d'être jetés en prison. Elle fuit puis revient sur ses pas et partageant la colère de son père essaie de déterrer la pancarte en grattant la terre avec les pieds.

Sur une plage de Tel-Aviv, Avi fait part à Ali de son amour tout récent pour une palestinienne de Beyrouth qu'il vient de rencontrer pour raison professionnelle. Il pense cet amour condamnée car la jeune femme ne pourra se monter avec un israélien. Ali lui conseille de vivre cet amour, au loin sur l'une des îles de la méditerranée.

Le fantasme d'un Moyen Orient d'avant 1948, c'est celui de la grande Syrie. Jusqu’en 1918, La Syrie, le Liban et la Palestine formaient une seule région continue qui était sous domination ottomane. Après la Première Guerre Mondiale, la France et le Royaume-Uni ont divisé la région en zones d’influence distinctes (accord Sykes-Picot). La Syrie et le Liban sont alors passés sous mandat français et la Palestine sous mandat britannique. Le Liban a obtenu son indépendance politique en 1943 et la Syrie en 1946. Après la guerre de 1948, la Palestine a été divisée en trois parties disjointes : l’Etat d’Israël (78% de la surface), la Cisjordanie, sous administration jordanienne, et la Bande de Gaza sous domination égyptienne. La création de l’Etat d’Israël et la Nakba (catastrophe) palestinienne sont les deux faces d’un même événement historique. A la suite de la guerre de 1948, des centaines de milliers de Palestiniens sont devenus des réfugiés. Tandis que certains fuyaient “volontairement” les combats, la plupart a été expulsée de force par les autorités israéliennes. L’Etat d’Israël a été créé en tant qu’État Juif et le peuple Palestinien a été exilé à travers tout le Moyen-Orient. Environ 150.000 Palestiniens sont restés en Israël et sont devenus citoyens israéliens. Les Palestiniens, contraints de fuir leurs foyers mais restés en Israël après 1948, sont surnommés des Présents-Absents. Absents, selon la loi sur les Biens des Absents (1950), qui a confisqué de tous les biens des Palestiniens saisis pendant la guerre, et Présents selon la loi sur la nationalité (1952), qui permet leur citoyenneté. Un citoyen Palestinien d’Israël sur quatre est un présent-absent qui vit à proximité de ses terres et foyers confisqués.

 

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Avec : Avi Mograbi , Ali Al-Azhari, Yasmine Al-Azhari-Kadmon. 1h37.

Genre : Documentaire
Thème : conflits israélo-palestiniens