Liliane

1933

Thème : Pré-code

(Baby Face). Avec : Barbara Stanwyck (Lily Powers), George Brent (Trenholm), Arthur Hohl Arthur Hohl (Ed Sipple), Douglas Dumbrille (Brody), Donald Cook (Ned Stevens), Alphonse Ethier (Adolf Cragg), John Wayne (Jimmy McCoy Jr.), Robert Barrat (Nick Powers), Grace Hayle (Mme Hemingway). 1h16.

Après avoir été vendue aux hommes par son propre père et abandonnée par sa mère, Lily Powers végète dans quartier pauvre d'une ville du sud des États-Unis. Quand son père meurt, elle décide de s'envoler pour New-York pour réussir sa vie. Ambitieuse, la jeune femme trouve rapidement un emploi dans une banque et grâce à ses talents de séductrice, elle gravit très vite les échelons. Prenant les hommes comme des objets, Lily est sans pitié, jusqu'au jour où elle tombe réellement amoureuse de son patron..

Pour ne pas être en reste avec La femme aux cheveux rouges (Jack Conway, 1932) produite par la MGM avec Jean Harlow qu'un critique qualifie de "film le plus dépravé jamais sorti d'Hollywood", la Warner se hâte de tourner sa propre version du thème de la femme gravissant la hierarchie sociale grâce à ses charmes. Ce sera Liliane (Baby Face), tiré d'une histoire de Darryl F. Zanuck.

Barbara Stanwyck y incarne une provinciale cynique qui va à New York et couche pour arriver au sommet. Joseph Breen, chargé de faire appliquer le code Hays, exige quatre minutes de coupes et de changements dans le film. Il déplore que "nulle part, l'héroïne n'est dénoncée pour sa façon éhontée d'utiliser les hommes." Breen essaye d'édulcorer le contenu et les personnages sordides du film mais le public n'est pas dupe. "Hourra pour le péché" écrit le Liberty Magazine. "Si vous croyez qu'il ne paye pas, regardez Barbara Stanwyck, qui pèche pour arriver au sommet de la plus grande banque de Manhattan"

Si Liliane est moins ouvertement provocateur que La femme aux cheveux rouge, il n'en est pas moins provocateur, car les hommes tels qu'ils y sont dépeints justifient pleinement l'attitude de l'héroïne. Lily arrive en guenilles et sans le sou au pied de l'immense building qui abrite la banque. Au grès des étages, les tenues se font de plus en plus sophistiquées, la séduction plus subtile et les cibles à conquérir, toujours plus puissantes. À tour de rôle, les chefs de service, directeur et vice-président, succomberont tous, leur rang, âge et supposée morale étant balayés par le désir irrépressible qu'éveillera en eux Lily.

La présence glaciale et la froide détermination de Lily dissimulent pourtant un vrai dépit se révélant par intermittences, que ce soit ce soir de Noël passé en solitaire où le terrible fait divers qu'elle provoquera mais qui, comme souvent, révélera l'inconsistance masculine. La rencontre avec Trenholm, un homme sachant ce qu'elle est prêt à l'aimer au-delà du simple assouvissement charnel, fera peut-être vaciller l'ambitieuse. C'est en tous cas ce que suggère la conclusion du film, certes justifiée par la censure. Une séquence retrouvée en 2004, incluse dans la version restaurée du film, la rendra pourtant bien plus cinglante et amorale, confirmant ainsi que Liliane demeure l'un des films Pré-Code les plus brillants de son époque

 

Source : Justin Kwedi pour Iletaitunefoislecinema.com