Stage des samedi 19 et dimanche 20 février 2011 au Cinéma Lux
animé par N. T. Binh

Samedi 19 février : Ange, To be or not to be, Lubitsch le patron, La veuve joyeuse.

Dimanche 20 février : The shop around the corner, Ninotchka

Samedi 19, accueil des premiers stagiaires à la cafétaria à 9h30 et intervention de N. T. Binh avant la projection à 10h00 de Ange

Dès son arrivée à Hollywood, Lubitsch possède le final's cut. Il devient son propre producteur afin de maintenir ce privilège exceptionnel. Au générique des films apparait ainsi "A Lubitsch production" avant qu'il ne soit aussi crédité de la réalisation. Sa réputation en la matière grandit. Il est surnommé "The director of the directors" car chacun cherche à s'inspirer de ses films.

Comme producteur, il doit non seulement en contrôler le budget mais surtout être à l'initiative de l'œuvre et a la charge de la mener à bien. Lubitsch contrôle l'ensemble de la chaine de réalisation de son film. Il achète les droits des œuvres à adapter. Il choisit les acteurs et n'hésite pas à proposer des échanges pour des acteurs sous contrat avec d'autres studios. Il choisit les scénaristes. Chacun d'eux raconte combien Lubitsch devrait être crédité de la fonction de coscénariste tant il les pousse à tirer le meilleur parti de chaque situation. Lubitsch assiste aussi tous les jours au montage et les monteurs témoigneront aussi de cette pratique exceptionnelle.

Lubitsch utilise aussi les projections tests auprès du public (pratique en général redoutée des réalisateur tant le public peut passer à côté de ce qui leur teint à cœur et se faire ensuite censurer par leur producteur) pour mettre au point sa mise en scène et pratiquer des ratakes (pour affiner ou préciser une signification, un gag).

Lubitsch se plait à la Paramount, studio où, contrairement à la MGM, ce ne sont pas les stars autour desquels se font les films mais plutôt les réalisateurs tels Cecil B. de Mille ou Joseph von Stenberg. La Paramount est cependant mal gérée, plusieurs fois au bord de la faillite. En 1935, ses dirigeants choisissent, pour l'unique fois dans l'histoire des studios hollywoodiens, un réalisateur comme directeur. Ils auraient pu choisir Cecil B. DeMille dont les succès populaires sont plus importants mais leur choix se porte sur Lubitsch dont le prestige est tout aussi grand et qui est connu pour sa rigueur et sa responsabilité envers les budgets qui lui sont confié.

Au bout d'un an, Lubitsch est néanmoins remercié. Non pas qu'il ait mal géré le studio, dont les recettes ont légèrement augmenté, mais parce qu'il a fini par se mettre tout le monde à dos. Incapable de déléguer, il veut que chaque film qui sorte soit digne de lui et se heurte aux egos. Mae West ou Sternberg sont excédés d'un perfectionnisme tout azimut.

Lubitsch revient donc à la mise en scène avec Angel. Ce chef d'œuvre qui sera plébiscité par les cinéphiles français dans les années 50 60 est pourtant un échec aux Etats-Unis. Il s'agit, comme souvent, de l'adaptation d'une pièce mineure retravaillée par Lubitsch en comédie mélancolique sur la gravité des sentiments. Elle sera jugée trop sophistiquée, trop européenne, conventionnelle et compassée par la critique américaine.


Lubitsch laisse le spectateur travailler. Il ne faut pas lui assener ce qu'il doit comprendre tout seul. Il faut lui montrer deux + deux. Le quatre doit venir dans la tête du spectateur. Dans le triangle amoureux classique : femme, mari, amant l'un des trois, chez Lubitsch, ignore quelque chose que les deux autres et le spectateur savent. Il ya moins de surprise que de suspense car le spectateur attend la réaction de celui qui ne sait pas. Complice de la mise en scène le spectateur est gratifié de la de la réaction du personnage qu'il attendait. Cet art de moins montrer pour mieux suggérer, Lubitsch l'avait déjà acquis auprès de la Warner, toujours en manque d'argent. Marie Pickford s'était plainte de ce qu'il s'intéressait moins aux acteurs qu'aux portes.

En 1934 le code Hays, en vigueur depuis 1920, est durci. Lubitsch joue de la censure pour mieux suggérer qu'Ange travaillait autrefois dans une maison close. Plus difficile de montrer que les époux n'ont plus de relations sexuelles alors qu'il est, de toutes façons, interdit de les suggérer, même entre époux. Les studios, qui ont eux-mêmes mis en place l'autocensure, ne sont toutefois pas dupe des ruses de Lubitsch et l'encourage à faire passer ces idées subversives tant qu'elles ne transgressent pas le code.


Quel Paris est décrit dans le film ? Les scénettes avec le chauffeur de taxi et la marchande de violettes montrent un petit peuple cupide.

Lubitsch disait "Je connais Paris en France, Paris-GM et Paris-Paramount, c'est celui que je conais le mieux". Blake Edwards le confirmera plus tard pour Victor Victoria, déplacer le lieu de la comédie en Europe permet de faire passer plus facilement les thèses progressistes. Paris est le lieu des amours illicites, du luxe et de la volupté, de l'escale, des idylles sans lendemain, et de la libération des pulsions. Dans Sérénade à trois, on vit à Paris dans des mansardes une vie de bohème. Qui dit retour aux USA, dit retour au carcan social.

L'Angleterre est le lieu de l'inhibition et de la répression. S'y joue un théâtre social, référence à Shakespeare où les valets sont le miroir déformant du snobisme des classes dirigeantes. Il ne s'agit même pas d'une opposition maitres-valets comme chez Molière (tradition que reprendont Sacha Guitry dans Désirée ou Renois dans La règle du jeu) et encore moins d'un appel à al lutetdes classes comme préfiguré dans Beaumarchais. Les domestiques sont encores plsu récationnaires que els maitres ainsi de celui en désaccord avec les idées de son patron et qui le quitta quand celui-ci entra au partie travailliste.

En 1935, Lubitsch fait un séjour en Union soviétique admiration dont il se servira beaucoup pour Ninotchak. Ici la grande duchesse glisse à un aristocrate un peu inconséquant qui exprime son admirationde la révolution "Vous avez envie de gagner votre vie ? " Lubitsch utilise Marlène Dietrich pour son accent étranger et pour son backgroung des rôles avec Sternberg ("Je pourrais être une espionne, une aventurière, une meurtrière dit-elle à Halton).

Lubitsch s'amuse du cliché qui veut que on aille à Hollywood, méprisé par l'élite culturelle, pour gagner de l'argent. Très peu de ses films se passent aux USA. Ici, seul Halton est américain. Illusions perdues se passe à New York et il attendra 1943 et Le ciel peut attendre pour réaliser avec la Fox, studio spécialiste de "l'Americana", son seul film vraiment américain... qui sera son plus gros succès. Contrairement à Capra, vrai auteur populaire américain, Lubitsch ne remportera jamais d'Oscar. Certes les comédies sont ddésavantgées par rapport aux drames mais Capra moissonne cinq Oscars pour New York Miami.

Après le succès de Haute pègre. Lubitsch tente une incursion dans le mélodrame pacifiste avec L'homme que j'ai tué qui sera un échec. Tout pareillement Hitchcock tente de faire du Lubitsch, auteur qu'il admire avec Joie matrimoniale connaitre le même insuccès en voulant changer de registre.

Lubitsch lit un article dans la presse où on lui reproche de rester confiné dans la comédie sophistiquée des années 30 et de montrer des individus coupés du social. Il en tirera les leçons dans The shop around the corner où les personnages sont confrontés au chômage, à un patron.

Comment interpréter la scène finale ?

 

 

Compte-rendu : Jean-Luc Lacuve le 21/02/2011 (suite à suivre dans la semaine...)